Le Secrétaire d'Etat américain John Kerry vient de transmettre aux commissions budgétaires du Congrès son rapport sur les mesures prises par le Maroc au Sahara concernant les droits de l'homme. Ce rapport est obligatoire avant de débloquer le versement de l'aide militaire annuelle américaine à Rabat. Le rapport remis ce lundi aux commissions budgétaires du Congrès par le Secrétaire d'Etat américain John Kerry concerne les mesures prises par l'Etat marocain pour améliorer la situation des droits de l'homme au Sahara, selon une copie du texte que détient Lakome. Ce rapport est obligatoire avant de débloquer l'aide financière militaire américaine accordée chaque année à Rabat, et ce depuis la loi votée par le Congrès US sous l'impulsion du lobby pro-polisario aux Etats-Unis et des organisations de défense des droits de l'homme. Ce rapport du Département d'Etat, une note de quatre pages, a pour but d'examiner les mesures prises par l'Etat marocain sur deux volets. Tout d'abord le respect du droit des individus à exprimer pacifiquement leur opinion concernant le statut et le futur du territoire et la documentation des violations des droits de l'homme. Deuxièmement, le libre accès au territoire des organisations de défense des droits de l'homme, des journalistes et des représentants de gouvernements étrangers. Atteintes à liberté d'expression et de réunion Le Département d'Etat rappelle que pour Rabat, prôner l'indépendance du territoire est considéré comme une menace à la sécurité nationale, ce qui entraîne selon le rapport des restrictions excessives et continues, «particulièrement sur le droit de réunion pacifique et la publication de tout plaidoyer pour l'indépendance ou pour un référendum qui inclurait l'indépendance comme option». Le rapport cite également plusieurs violations des droits de l'homme : absence de procès équitable pour des manifestants pro-indépendance, arrestation de militants lors de distribution de tracts, et même le blocage de certains sites internet «considérés controversés, comme ceux préconisant l'indépendance». Le texte ne fournit toutefois aucun exemple concret pour étayer ces propos. Le Département d'Etat revient également sur le droit d'association, rappelant que certaines associations «vues par l'administration marocaine comme n'étant pas attachées à la souveraineté marocaine», ont des difficultés pour s'enregistrer ou opérer librement. Le rapport relève que les associations non-enregistrées ne peuvent recevoir de fonds publics ni accepter de contributions. Le rapport cite les cas de l'ASVDH et de la CODESA mais précise que ces deux associations sont tout de même "très actives sur internet et pour recevoir des diplomates et des délégations de droits humains". Le rapport note à propos des médias au Maroc, que les restrictions longtemps imposées au sujet du Sahara ne sont plus autant appliquées mais qu'en parallèle l'auto-censure est encore largement pratiquée parmi les médias et les bloggeurs. Le rapport souligne également qu'à certaines occasions, des activistes sahraouis pro-indépendance ont pu participer à des conférences au Maroc et s'afficher publiquement et sans répercussion comme étant pro-polisario. Restrictions pour les journalistes étrangers Concernant le libre accès au territoire, le rapport du Département d'Etat explique que les diplomates américains et d'autres pays se rendent «régulièrement» au Sahara pour rencontrer des activistes sahraouis, des officiels de l'ONU et du Maroc. Le rapport fait aussi le point sur les visites de l'ONU en 2012 : celles de l'envoyé personnel de Ban-Ki Moon, Christopher Ross, et celles du patron des Casques Bleus, le français Hervé Ladsous, et du Rapporteur spécial contre la Torture, l'argentin Juan Mendez. En 2013 c'est la Rapporteuse spéciale sur la traite des personnes, la nigériane Joy Ngozi Ezeilo, qui s'est rendue dans le territoire. Concernant les journalistes, le rapport rappelle les deux voyages de presse organisés au Sahara par l'International Women Media Foundation en décembre 2012 et avril 2013. Le Département d'Etat relève que les journalistes étrangers doivent obtenir une autorisation préalable du ministère marocain de la Communication avant de pouvoir rencontrer des associations pro-indépendance. Il explique toutefois ne pas avoir reçu d'informations concernant des cas de journalistes interdits par les autorités marocaines de voyager à Laâyoune ou de rencontrer des activistes pro-indépendance. «Le royaume du Maroc, cependant, refuse l'entrée ou expulse les individus quand il estime qu'ils utilisent le journalisme comme couverture pour faire de l'activisme», conclut le rapport.