L'étude « Migration et compétences » de l'Union européenne dévoilée ce mardi indique que 42% des marocains interrogés envisagent d'émigrer. Mais peu d'entre eux ont la capacité réelle de le faire. Cette étude, menée par l'agence européenne ETF (European Training Foundation) en partenariat avec l'AMERM (Association marocaine d'études et de recherches sur la migration) et les autorités marocaines, a pour objectif d'apporter des données fiables sur la migration, les compétences et l'emploi dans l'UE et les pays voisins concernés. Au Maroc, ce sont près de 4000 personnes qui ont été interrogées (anciens migrants de retour au Maroc ou migrants potentiels). 42% d'entre eux font part de leur désir de quitter le pays, mais selon l'étude, seulement 9% des migrants potentiels ont les moyens nécessaires (informations, argent, documents) pour le faire. Au niveau géographique, ce sont les régions d'Agadir et de Marrakech qui arrivent en tête. « Ces deux régions, ayant une vocation touristique, permettent également un contact permanent avec les étrangers ce qui peut constituer un facteur de facilitation de l'acte d'émigrer qui ne concerne pas que les nécessiteux », note l'étude. La pauvreté et le chômage ne sont pas les seuls facteurs du désir d'émigration : « Le chômage encourage l'émigration dans une certaine mesure, mais les données de l'enquête démontrent que la migration ne concerne pas seulement les catégories sociales pauvres ou les sans-emplois. En effet, paradoxalement, la propension à migrer accroît avec les bonnes conditions sociales et les conditions économiques n'influencent pas non plus la propension à migrer d'une manière significative. La migration ne semble pas l'apanage des pauvres, mais un phénomène sociétal au Maroc ». La plupart des migrants optent pour une émigration à long terme : 53% des migrants de retour au Maroc ont passé plus de 7 ans à l'étranger. Là-bas, ils travaillent principalement dans les secteurs de l'hôtellerie/restauration, le BTP et l'agriculture. 45% ont travaillé sans contrats. Question compétences, 62% des migrants marocains disent avoir appris une langue étrangère ou avoir acquis d'autres compétences techniques ou professionnelles lors de leur séjour à l'étranger. Mais à peine un tiers ont vu leurs qualifications marocaines reconnues par le pays d'accueil. Voici le profil-type du migrant marocain, dressé par l'étude : « Selon les résultats de l'enquête au Maroc, les migrants de retour sont mieux qualifiés que la population marocaine au Maroc, surtout parce qu'ils étaient déjà proportionnellement plus instruits avant la migration. Les plus instruits sont aussi ceux qui bénéficient le plus de la période de migration en termes d'acquisition de nouvelles compétences et de l'expérience professionnelle qui rendent leur réintégration sur le marché du travail marocain à leur retour plus réussi. Cependant, étant donné que la majorité de la population marocaine a un faible niveau d'éducation, le profil typique d'un migrant marocain est un homme célibataire avec un faible niveau d'éducation qui migre une fois pour une période de dix ans en France ou en Espagne afin d'améliorer ses conditions de vie. Il n'est pas au courant des programmes (gouvernementaux) qui facilitent la migration de travail, compte sur ses amis et membres de la famille pour trouver un emploi à l'étranger, travaille en tant que salarié ou travailleur occasionnel, passe environ dix mois au chômage, apprend la langue du pays hôte, mais n'acquiert pratiquement pas d'autres nouvelles compétences et retourne au Maroc principalement pour des raisons familiales. Il n'est pas au courant des programmes visant à faciliter le retour au Maroc et il compte encore sur sa famille et ses amis pour trouver du travail. Son expérience de travail à l'étranger a amélioré ses opportunités professionnelles en comparaison avec les non migrants et il travaille en tant que salarié ou - avec une probabilité accrue après la période migratoire - comme entrepreneur. Au cours de sa migration il a envoyé des fonds au Maroc mais presque 90% de ceux-ci ont été utilisé aux dépenses courantes. Il a également fait des épargnes dont un tiers il utilise pour l'achat de propriété et un tiers peut-être à une activité commerciale. Il n'envisage pas d'émigrer de nouveau. »