Démantèlement à Casablanca d'un important réseau de vol de voitures Un réseau de vol de voitures de luxe vient de tomber, la semaine dernière à Casablanca. C'est la plus grosse prise jamais réalisée au Maroc puisqu'une cinquantaine de voitures dérobées ont été retrouvées dans cinq dépôts situés dans la périphérie de la ville. 12 malfrats ont été appréhendés, dont des ferrailleurs, des mécaniciens et des voleurs, mais l'enquête n'est pas pour autant close. Ils les adorent belles, ils prennent tout le temps de les repérer, pour ensuite passer à l'acte. Ils ont sévi à Casablanca, à Rabat, à Marrakech, et dans plusieurs autres villes marocaines, où ils ont semé la terreur et la panique. Ils opèrent depuis plusieurs années sans pour autant être démasqués par les services de l'ordre. Eux, ce sont les membres d'un important réseau de vol de voitures de luxe démantelé la semaine dernière dans la périphérie de Casablanca où ils ont élu domicile. C'est précisément à douar Lamkanssa, à Oulad Haddou, où ils ont été arrêtés en flagrant délit en train de démonter le dernier arrivage des véhicules subtilisés à quelques malheureux particuliers. Mercedes, Peugeot, Golf, Passat, BMW, des véhicules en parfait état, saisis par la Brigade de la police judiciaire de Casa-Anfa dans cinq différents dépôts des malfaiteurs. Tout commence alors par un renseignement précieux obtenu à Casablanca le lundi 6 février 2006 par un haut gradé de la police judiciaire de la préfecture de police de Casablanca. L'informateur anonyme donne une adresse supposée abriter un important dépôt de voitures volées. Aussitôt informés, les services de la PJ s'organisent et préparent la logistique nécessaire à ce genre d'opération pour arrêter en flagrant délit les malfaiteurs. Arrivés sur place, les limiers guettent, scrutent les lieux, et remarquent la présence d'un véhicule garé devant le dépôt incriminé. Un coup de fil aux services des mines de Casablanca et le tour est joué. Vérification faite avec les services de l'ordre et le véhicule suspecté s'avère effectivement déclaré volé depuis plusieurs semaines. Les limiers passent à l'acte, pénètrent dans l'entrepôt, et découvrent le pot aux roses. Une véritable fourmilière qui travaille d'arrache-pied pour découper et démonter des véhicules en toute quiétude. Démantèlement rapide L'affolement prend immédiatement les malfrats à la première question posée par les enquêteurs sur l'origine des voitures. Sans aucune résistance des malfrats, pris au dépourvu, les enquêteurs procèdent à l'interpellation des individus, quantifient dans des PV les véhicules et les pièces détachées saisies, et prennent la direction de la wilaya de police de Casablanca pour enquête. De fil en aiguille, les enquêteurs arrachent des informations sur l'existence de quatre dépôts situés dans la localité de Oulad Haddou. Les membres du réseau démantelé sont arrêtés les uns après les autres. Dans les cinq dépôts de la bande, la police a mis la main sur quelques voitures de luxe que les malfaiteurs n'avaient pas encore réussi à écouler. En tout et pour tout, les limiers de la PJ de Casa-Anfa ont mis la main sur un gros lot constitué de pas moins d'une cinquantaine de véhicules volés, 69 réservoirs, et d'importantes quantités de pièces détachées ( portes, pare brise, moteurs et autres accessoires). En une seule journée, la PJ d'Anfa a réalisé l'exploit. Le jackpot. C'est ce qui leur a valu les félicitations du général Hamidou Laânigri, patron de la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN). Durant les interrogatoires, les malfrats interpellés, pour la plupart des ferrailleurs et des mécaniciens, ont avoué faire partie d'un réseau bien organisé qui sévit depuis longtemps dans le pays. Un réseau où chacun à sa propre spécialité. Tout d'abord les mécaniciens, qui découpent les véhicules, et les ferrailleurs qui s'occupent de la revente des véhicules une fois démontés. Ils sont au nombre de dix et ont pour noms : Abderrahim Bahir (1950), Abderrahim Arich (1984), Mohamed Badri (1967), Miloud Hamdaoui, peintre de son état né en 1983 et son frère Ahmed Hamdaoui (1886), Ahmed Berkaoui (1951), M'hamed Lhmidi (1962), Mohamed Razoug (1971), Sami Boulaakoul ( 1978 ) et Larbi Arich. En leur consignant des procès-verbaux pour leurs déclarations, les enquêteurs se sont lancés à la recherche des autres éléments de la bande, les principaux acteurs. Des investigations qui se sont soldées pour l'instant par l'interpellation d'un récidiviste recherché à Agadir du nom de Mustapha Jenhani, ( alias Koraich ), né en 1961, et Ahmed Fatih né en 1971 également recherché par les services de l'ordre. L'enquête n'est pas close Une dizaine de voleurs cités dans cette grosse affaire sont toujours en fuite, mais ils finiront pas tomber, assure un haut gradé de la PJ de la préfecture de police de Casablanca. Leur procédé est simple et bête à la fois. Contrairement aux réseaux démantelés partout dans le Maroc, qui procèdent au maquillage des véhicules en leur attribuant de nouvelles plaques minéralogiques et numéros de séries ( voir encadré ), celui de Casablanca démonte tout simplement son butin, pour le vendre en pièces détachées dans les ferrailles de Sbata et à Salmiya. Une astuce simple qui permettait aux malfrats de frapper loin de tout soupçon. Le vol de voitures est une industrie organisée et bien huilée, sinon comment expliquer la célérité et la facilité avec lesquelles de très nombreuses voitures disparaissent dans la nature et ne sont jamais retrouvées. Les voleurs appréhendés s'attaquaient en général aux grosses voitures de luxe, neuves ou en très bon état. Travaillant en liaison étroite avec des réseaux des deux ferrailles de Casablanca, les malfaiteurs s'approvisionnaient à la commande et selon les besoins du marché. Le démantèlement rapide des véhicules volés et leur revente en pièces détachées sont monnaie courante à Casablanca. La logistique particulièrement sophistiquée mobilisée par les traficants rend pour les services de sécurité inopérante toute enquête des services concernés, en plus de l'indispensable renseignement au minimum, une logistique scientifique tout aussi performante. Rien que sur Casablanca, la moyenne annuelle de voitures volées est à plus de 300 véhicules dont le tiers de ces voitures a disparu à jamais. Les véhicules qui ne retourneront jamais à leurs propriétaires ont souvent été démontés et revendus en toute liberté dans des ferrailles, comme celle de Sbata et Salmiya. En attendant de mettre la main sur le reste du réseau, la bande des 12 malfrats a été présentée jeudi 9 février 2006 au procureur du Roi à la Cour d'appel de Casablanca. Affaire à suivre. Comment les voleurs procèdent-ils ? Les techniques du vol des voitures employées par les lascars sont des plus ingénieuses. La dernière trouvaille des spécialistes est un modus operandi importé d'Italie. L'astuce consiste à démonter la serrure de la portière à l'aide d'une greffe et de dupliquer la clé à partir de la serrure sur une autre clef vierge avec des limes. Le tour est ainsi joué en moins d'une minute. Au début, les spécialistes du vol de voitures utilisaient la méthode archaïque qui consiste à briser la vitre pour ouvrir la portière. Il leur suffit alors de défoncer la serrure de contact pour faire démarrer la voiture en mettant le contact direct. Par la suite, ils ont commencé à s'introduire dans le véhicule en défonçant la serrure de la portière à l'aide d'une pince ou d'un tournevis adapté. La technique a évolué quand les malfrats ont découvert qu'il suffisait de confectionner une clé de contact à partir de l'empreinte de la clef du couvercle de réservoir. Le propriétaire de la voiture croit au simple vol du couvercle de son réservoir jusqu'au jour où il ne retrouve plus sa voiture. Le maquillage du numéro minéralogique des voitures volées est tout aussi simple. Les bandits ont en réserve des marques de voitures identiques à celles qu'ils volent. Ils les achètent auparavant à la casse, d'une manière légale, avec leurs cartes grises et tous les documents nécessaires. Il leur suffit de fixer la plaque d'immatriculation de la voiture achetée sur celle du véhicule volé pour circuler sans problème. On n'arrête pas le progrès, même chez les truands. La police judiciaire arrive souvent, avec des moyens dérisoires et un effectif réduit, à mettre sous les verrous les auteurs de ces vols. Mais il ne faut pas se leurrer, le véritable problème se trouve au niveau de la prévention avec une sécurité urbaine dont l'effectif est sans commune mesure avec la démographie galopante de Casablanca.