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L'europe adhère, les USA récupèrent
Publié dans La Gazette du Maroc le 06 - 02 - 2006


L'AFFAIRE DES CARICATURES
La publication par la presse européenne des dessins scandaleux du Prophète, Sidna Mohamed, ne s'arrêtera pas aux frontières de la colère ni du tollé dans le monde musulman. Cette provocation risque de se répercuter négativement sur les intérêts économiques des pays impliqués. La machine est déjà en marche.
Le conseiller particulier du roi d'Arabie Saoudite, Adel al-Jubaïr, n'a pas mâché ses mots lorsqu'il déclara à partir du Pakistan où il accompagnait le souverain Abdallah ben Abdel Aziz, que «ceux qui n'ont pas respecté notre Prophète sont libres. De notre part, nous sommes aussi libres d'agir en conséquence». Un proche de ce dernier a expliqué à La Gazette du Maroc que Riyad n'a pas l'intention, cette fois, de formuler des protestations officielles, mais elle sait comment et où faire mal à ceux qui ont osé toucher Rassoulouna Al-Karim. Pour les spécialistes du décryptage des messages émanant des Saoudiens, le royaume n'hésitera plus à réviser tous les projets en cours de négociation avec les Etats qui ont franchi la ligne rouge. Lorsque le ministre saoudien des Affaires étrangères, Saoud Al-Fayçal, souligne que le boycott des produits danois est une réaction populaire, il voulait dire que la riposte officielle sera certainement d'une autre envergure.
Si tous les congrès tenus ces dernières années dans les pays musulmans n'ont pas réussi à rapprocher les Sunnites des Chiites, ces caricatures, suivies des menaces de l'Union européenne et des déclarations hostiles de certains responsables européens, notamment français, ont fini par les unir. Les condamnations officielles, presque à la même heure de l'Iran et de l'Arabie Saoudite qui tous deux ont dit «leur intention de réagir contre ceux qui insultent le Prophète», en est la preuve tangible de ce rapprochement qui devra être pris trop au sérieux par les Européens.
Même le pouvoir en Egypte, qui tente maintenant de chercher l'apaisement, craint, par contre, les surenchères des Frères musulmans; et, par là, les débordements de la rue. Ces derniers pourraient emporter tout, y compris le régime de Hosni Moubarak. Pour anticiper sur une telle éventualité, le Caire a remis sur le tapis sa demande au Conseil de sécurité de l'ONU portant sur une résolution interdisant toute atteinte aux religions. «Une initiative qui risque d'absorber le tollé qui fait boule-de-neige», nous disait, samedi dernier, Al-Allama, Ayatollah cheikh Mohamed Hussein Fadlallah. Pour ce visionnaire et homme de tolérance, ces provocations, cautionnées malheureusement par l'hypocrisie des hommes politiques européens, notamment, français, donneront des alibis aux fanatiques et extrémistes. Nous serons alors loin de l'excès des caricatures que préfère le ministre français de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, à celui de la censure.
Les représentants et agents des sociétés européennes ont fait savoir à leurs maisons mères que la situation est très différente de celle qui prévalait il y a deux ans, au plus fort de l'Intifada. Là où les populations arabes boycottaient le Coca-Cola et les Marlboro, pour protester contre les Etats-Unis, principal fournisseur de matériel militaire de Tsahal. «C'est du Prophète des musulmans qu'il s'agit aujourd'hui», commente Georges. Z, libanais, représentant d'un important laboratoire suisse aux Emirats Arabes Unis ; et de poursuivre, «Ces conneries de provocations des Européens ne serviront qu'à nos concurrents les laboratoires américains».
Tous les indices montrent jusque-là que les musulmans, partout dans le monde, ne se contenteront, comme d'habitude, des réactions temporaires de boycott des produits européens. Actions qui auront tendance à s'essouffler au fil des jours. On parle déjà de coordination des positions, discrètement certes sur le plan officiel entre les Etats musulmans pour sanctionner les pays qui ont couvert voire cautionner ceux qui insultent «Saïd Al-Moursaline». Au niveau des pays du Golfe et même l'Egypte, il est aujourd'hui difficile de tenir le discours de l'“islamiquement correct” après qu'on a touché le Prophète. Les dirigeants sont obligés d'accompagner leurs peuples s'ils comptent se maintenir là où ils sont. Pour eux, s'en prendre aux Européens est beaucoup plus facile de faire face aux Américains. Surtout que ces derniers ont critiqué l'affaire des caricatures.
Le réalisme américain
Du haut de la tribune du «Forum Al-Jazirah» qui se tient à Doha depuis le mercredi dernier sous le thème «L'information entre la liberté et la responsabilité», l'ancien président des Etats-Unis, Bill Clinton, a vivement critiqué l'affaire des caricatures visant le Prophète Sidna Mohamed. Il estima que le respect des croyances et des religions est une chose sacrée. Parallèlement, on apprend que l'actuel président, George Bush, a appelé plusieurs chefs d'Etat arabes et musulmans pour leur dire que les Etats-Unis ne peuvent accepter de telles insultes à l'égard du Prophète, quelles que soient les justifications. De son côté, la secrétaire d'Etat américaine, Condoleeza Rice a, dans une conversation téléphonique avec son homologue qatari, cheikh Hamad ben Jabr Al-Thani, partagé l'amertume que ressentent les musulmans, et comprend parfaitement l'ampleur du choc créé par ces irresponsables. Le chef de la diplomatie américaine a fini par dire que son pays est solidaire des musulmans dans cette épreuve délicate. Les proches du ministre qatari comparent cette position américaine à celle émanant d'un ministère européen qui souligna que « son pays n'a pas reçu jusque-là des protestations officielles».
Dans les hautes sphères de la capitale saoudienne, on laisse entendre que les positions floues de certains responsables européens - allusion faite aux Français- à l'égard des caricatures-scandales, vont aider le royaume à se désengager plus facilement des négociations concernant quelques gros contrats, notamment dans le domaine de l'armement. Des marchés se chiffrant à plus de 15 milliards de $. Dans ce contexte, force est de souligner que de fortes pressions sont exercées depuis des années de la part de l'administration américaine et de son lobby influent en Arabie Saoudite afin que cette dernière fasse définitivement marche arrière au lieu de reporter les échéances. Les positions des politiques français, plus précisément du pouvoir, dont les responsables se sont bousculés pour déclarer qu'ils sont pour la liberté d'expression dans l'affaire des caricatures, ne feront qu'encourager les Saoudiens à faire plaisir aux Américains. D'autant que ces derniers se sont montrés solidaires avec eux face aux provocations des Européens.
Si certains pays arabes affirment que les positions floues des responsables français sont dues aux surenchères liées à l'échéance de 2007, ils estiment néanmoins que le cautionnement de l'insulte du Prophète demeure impardonnable.
La France, dont les positions ont été fortement appréciées par les populations arabes, notamment dans le conflit israélo-palestinien et durant la guerre contre l'Irak, risque aujourd'hui de perdre cette estime, et par là, beaucoup de ces gros intérêts. Dans les Diwans des émirs d'Abou Dhabi et de Doha, on s'interroge sur les mauvais calculs effectués par les responsables français qui semblent être incapables de mesurer l'impact des pertes économiques que pourrait causer le cautionnement indirect des caricatures.
Et à un proche conseiller de Cheikh Mohamed ben Zayed, le prince héritier de l'émirat d'Abou Dhabi, de répéter :«Je ne sais pas pourquoi nos amis français travaillent contre leurs intérêts ; d'autant plus qu'ils mettent leurs amis émiratis dans de mauvais draps».
Ce qui s'appliquera aux Français dans les pays du Golfe se répercutera sans doute en Iran. La riposte de Téhéran, déjà en bras de fer avec l'Union européenne à cause du problème nucléaire, sera plus percutante. La République islamique d'Iran aura tendance dès à présent à accélérer son rapprochement vis-à-vis de la Russie, de la Chine et même de l'Inde. Ce qui sera au détriment des sociétés européennes qui, depuis des années, travaillent sur de gros projets non seulement dans le domaine des hydrocarbures mais aussi des infrastructures.
Par ailleurs, les intérêts des Européens dans le reste du monde musulman et arabe, aussi bien du Machrek comme le Maghreb, seront touchés, différemment certes. « Avec l'insulte du Prophète, rien ne sera plus comme avant, malgré notre affinité avec certains pays européens et les intérêts historiques », laisse entendre un ministre algérien qui préfère garder l'anonymat ; et, d'ajouter : « Ils sont allés trop loin cette fois.
Il ne s'agit plus d'une loi considérant le colonialisme comme étant une chose positive. Il s'agit de Sidna Mohamed ».
Cadeaux aux
extrémistes
Pour le ministre égyptien des Affaires étrangères, Ahmed Abou Al-Gheit, ces caricatures constituent un cadeau précieux aux extrémistes voire même aux terroristes. Il s'interroge par la suite sur le fait si ceux qui avaient initié ce scandale étaient conscients des réactions ou non. Il va même se demander s'ils jouent le jeu de ces extrémistes.
Si les Danois sont loin de mesurer l'impact de ces caricatures, pourquoi des médias et des responsables européens les ont rejoint dans leurs provocations. Et au chef de la diplomatie égyptienne de conclure, “Chez nous en Egypte, les chrétiens coptes sont plus concernés par cette affaire que les musulmans”. Au point que l'Inba Chenouda rappelle à tous ceux qui l'avaient rencontré ces derniers jours la phrase prononcée par le copte, dirigeant du Parti Al-wafd, Makram Obeid, à l'époque de l'indépendance : «Ma religion est copte, ma nation est l'Islam».
Si les Etats arabes et musulmans ont mis déjà en place tous les dispositifs sécuritaires nécessaires pour empêcher les représailles contre les ressortissants des pays les plus impliqués, à savoir le Danemark et la France, le risque reste toujours de mise. Ces caricatures ne mobilisent pas les seuls extrémistes mais aussi les plus modérés.
Cela dit, les premiers vont profiter du climat de révolte prévalant pour frapper sans que les autorités en place puissent réagir comme par le passé.
Car, il ne s'agit pas cette fois de la déstabilisation des régimes mais d'attaquer les «mécréants» qui avaient insulté le Prophète.
Dans ce cadre, la déclaration de cheikh Hassan Nasrallah, secrétaire général du mouvement Hezbollah, il y a deux jours, est significative.
Ce dernier disait dans un discours à l'occasion d'Achoura, commémorant le massacre de Hassan et de Hussein, fils de Sidna Ali Ben Abi Taleb, «Si la fatwa de l'imam Khomeïni à l'égard de l'écrivain Salman Ruchdi avait été exécutée il y a quelques années, personne n'aurait osé insulter le Prophète». Un message à qui de droit, du Liban au Pakistan, de l'Iran au Maghreb.


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