Polémique sur la visite du Premier ministre espagnol à Sebta et Melillia Le Premier ministre espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero, a effectué une visite de deux jours au tout début du mois de février dans les deux villes occupées de Sebta et Melillia. Une initiative qui a soulevé de vives polémiques tant du côté marocain, à travers les protestations des Marocains de Sebta et Mellilia, qu'espagnol par les réactions du Parti Populaire. José Luis Rodriguez Zapatero a trahi la confiance des Marocains. Il est revenu, du haut de sa primature toute fraîche, sur ses engagements antérieurs et sa ligne politique à l'égard de son voisin du Sud, le Maroc. En se rendant dans nos murs, en l'occurrence les deux présides occupés Sebta et Mellilia, au tout début de ce mois de février 2006, José Luis Rodriguez Zapatero, a rompu le contrat de «bon voisinage» conclu entre les deux pays, après huit bonnes années de courts-circuits que nous devons à Aznar. Oui, José Luis Rodrigez Zapatero ne nous aime pas, ou plus, comme il n'a pas cessé de le répéter, du temps même où il était chef de file de l'opposition espagnole. Sa tournée dans les deux enclaves colonisées, une première dans son genre après 25 ans (la dernière en date est celle d'Adolfo Suarez en septembre 1980), relève de la pure provocation et enfonce davantage le clou dans les relations maroco-espagnoles. C'est en ces termes que les associations islamistes marocaines modérées, représentées à Sebta et à Mellilia (lire entretiens), qualifient la visite du chef du gouvernement espagnol des deux présides en territoire marocain. Côté officiel, gouvernement et partis politiques confondus, la réponse est plutôt réservée pour ne pas dire très prudente. On a eu droit, à titre d'illustration, à des formules bien réfléchies telles que « inopportune », « déplacée », «provocatrice» ou même « attentatoire aux sentiments des Marocains ». Dans une déclaration officielle diffusée mercredi 1er février dernier, le porte-parole du gouvernement, Nabil Benabdallah, a indiqué que "cette visite intervient dans un contexte incompatible avec la dynamique que nous connaissons et voulons. Elle n'apportera pas du nouveau quant à la nature du problème des deux présides occupés". Et d'ajouter: "La visite de Zapatero ne s'inscrit pas dans cette perspective globale que nous voulons pour les relations maroco-espagnoles, et de ce fait nous ne pouvons que la déplorer ". Bien qu'il n'ait à aucun moment revendiqué la souveraineté de l'Espagne sur ces deux enclaves occupées, le chef du gouvernement espagnol a vivement été critiqué pour ce déplacement qu'il pouvait très bien éviter. Sur ce point précis, les Espagnols, eux-mêmes, via une extrême droite qui ne dit pas son nom, n'ont épargné guère Zapatero lui reprochant de ne pas avoir réaffirmé la souveraineté de l'Espagne sur ces deux villes. Comment pourrait-on donc dépasser ce sac de nœuds conflictuel ressuscité la semaine dernière par les socialistes espagnols ? Certainement pas avec la visite intempestive du chef du gouvernement ibérique, le 31 janvier et le 1er février 2006 à Sebta et à Mellilia. Le Maroc, par la plus haute autorité du pays ou par la voie du ministère des Affaires étrangères, fait de ce dossier une revendication permanente. Aussi loin dans le temps que soit cette colonisation, le Maroc n'a jamais cessé de revendiquer le retour sous sa souveraineté d'une partie intégrante de son territoire. De même, l'ensemble des dirigeants politiques s'accordent pour dire, via leurs organes de presse, que le déplacement de Zapatero n'aura pas d'influence sur la position du Maroc qui n'abandonnera pas ses territoires et ne renoncera pas à la récupération des deux présides occupés. Prétendre le contraire, c'est la géographie qui perd la boule. L'Espagne en particulier et l'Europe en général sont condamnés, tôt ou tard, à soulever cette question, le colonialisme ayant fait son temps, dans le cadre d'un dialogue franc et sincère avec le Maroc. Il n'y a pas prescription en matière de colonisation. Hong Kong et Macao, respectivement occupés par l'Angleterre et le Portugal depuis 1842 et 1557, ont fini par être rétrocédés à la Chine en juillet 1997 et décembre 1999. L'argument tant agité par l'Espagne, celui de l'ancienneté de l'occupation des présides en territoire marocain, continental ou maritime, ne tient plus la route face à ces conflits similaires récemment résolus. Si Sebta, Mellilia, le rocher de Badès, les îles Zaffarines, ainsi que les îlots Leïla et Nekkour –sans oublier les îles Canaries- sont espagnols et font donc “partie du territoire de l'Union européenne" comme l'affirme sans sourciller Romano Prodi, pourquoi pas tout le Maroc ? Si l'Europe commence au Maroc, le Maroc ne peut être qu'européen et l'espace Schengen commencera de ce fait à partir de la ville de Lagouira. Chantage qui ne dit pas son nom Aujourd'hui, la représentation réciproque entre le Maroc et l'Espagne est maintenue plus que jamais, elle est réellement opérationnelle, et il faut juste l'activer pour permettre de dépasser ces sujets de litige pour aboutir au retour des deux présides dans le giron marocain. En somme, le tout pour le Maroc est de démontrer, si besoin est, que son combat pour Sebta et Melillia est sans limites, continu, permanent, incessant et exaltant, comme celui de l'Espagne pour la rocher de Gibraltar, occupée par les Anglais à la même période. Les Espagnols sont-ils sensibles à cette question ? Oui et non. Tant que le sort du Sahara marocain n'est pas encore réglé, les Espagnols, de droite ou de gauche soient-ils, peuvent toujours exercer ce chantage sur le Maroc et nous tenir par la gorge. Dire que l'histoire a horreur des anachronismes, ce n'est pas de l'incantation. C'est juste pour rappeler que le rapport de forces qu'entretient l'Espagne avec le Maroc est l'élément déterminant dans ce genre de situation. Le Maroc, à travers ses initiatives, comprend l'acharnement de l'Espagne pour le retour en son sein de Jabal Tarik, patrimoine de l'Histoire. L'Espagne devrait comprendre également l'acharnement du Maroc pour le retour de Sebta et Melillia. Une bonne façon d'effacer de tristes pages de l'Histoire commune en ce monde qui se dit en renouveau.