L'ambassadeur d'Egypte au Maroc Achraf Youssef Zaazaa L'Egypte a célébré sa fête nationale le 23 juillet dans une ambiance caractérisée par son adhésion au processus démocratique et le lancement d'une série de réformes qui répondent aux besoins des citoyens. Rabat et le Caire restent toujours deux axes pour l'instauration de la paix et de la sécurité dans la région du Moyen-Orient et de l'Afrique du nord. Il reste néanmoins du chemin à faire pour développer les relations économiques bilatérales. La Gazette du Maroc : l'Egypte a connu dernièrement un vaste changement politique et économique, est-ce que cela répond aux besoins de la masse populaire qui demande plus de réformes ? Achraf Youssef Zaazaa : d'abord, les réformes ne sont pas arrivées soudainement, elles sont le fruit d'un long processus. En ce qui concerne les réformes économiques qui ont été initiées au début des années 80, elles sont toujours en cours jusqu'à ce jour, et ont demandé beaucoup d'efforts pour réformer les secteurs financier et monétaire. L'économie égyptienne a connu un grand changement s'étalant sur une longue période menant de l'économie orientée au stade de l'économie de marché et la mise en valeur du rôle du secteur privé. Ensuite, on a mis en place une série de projets privatisés, de même qu'il y a eu la modification des lois d'investissement. Je tiens à préciser que cette période qui a duré un quart de siècle a été suivie par plusieurs réformes dans le domaine de la reconstruction de toutes les infrastructures de l'Egypte, dont le lancement des grands projets parmi lesquels la reconstruction du Sinaï et les projets du sud de la vallée dans la région de Touchka et les environs. Sur le plan politique, l'Egypte a connu depuis la période de feu le président Anouar Sadate d'importantes réformes politiques comme le multipartisme et la fin du régime du parti unique, ce qui a encouragé la constitution de nouveaux partis politiques (18 partis), mais le parti le plus populaire reste sans conteste le parti national démocratique. L'Egypte a vécu ces derniers temps l'émergence de nouvelles associations au sein de la société civile et dont les affiliations politiques sont diverses, pour la défense des droits de l'homme et l'incitation du gouvernement à opter pour plus de réformes. Prochainement, il y aura les premières élections présidentielles directes qui vont permettre au citoyen égyptien par le biais du scrutin direct de choisir un candidat pour la présidence parmi plusieurs noms qui représentent tous les partis politiques dans la société. Ce ne sera pas les dernières dans le processus de réforme démocratique et politique, et on pourrait attendre d'autres actes semblables qui répondent aux besoins et aspirations du peuple égyptien et non pas aux pressions venant de l'extérieur. Les deux pays sont liés par une commission mixte, quel est le bilan de cette commission et est-ce qu'il y a une stratégie bilatérale pour augmenter le volume d'échanges entre Rabat et le Caire? La haute commission mixte maroco - égyptienne se caractérise par la présidence des dirigeants des deux pays. Il est prévu que la prochaine réunion de la commission ait lieu au Maroc dans les prochains jours. En fait, les travaux de la commission mixte ont donné un grand élan aux échanges commerciaux entre les deux pays (5 fois plus que les années passées). C'est une avance remarquable dans les relations bilatérales, mais nous attendons toujours l'augmentation du volume d'échanges pour le rendre au niveau des ambitions des deux peuples frères et de leurs potentialités. Nous souhaitons que les années à venir soient distinguées par le développement de la coopération bilatérale, et notamment après l'adoption de la déclaration d'Agadir par le Royaume du Maroc, ce qui permettra l'accroissement du volume d'investissement dans les 4 pays concernés (Egypte, Maroc, Tunisie et Jordanie), surtout la création de projets communs pour un produit commun dans le but d'accéder au marché européen, ce qui permet l'extension du marché. A signaler aussi que les deux pays ont signé lors des réunions de la commission mixte plusieurs accords pour organiser les opérations d'échange commercial et les investissements communs, mais les portes restent toujours ouvertes aux hommes d'affaires des deux pays pour réaliser plus de projets. Il faut dire que l'Egypte et le Maroc collaborent souvent au niveau régional et international sur le plan de la participation dans les salons internationaux ou en ce qui concerne les positions des deux pays à l'égard des négociations commerciales (le processus de Barcelone, l'Union Européenne,..), aussi l'Egypte aura prochainement à signer un accord de libre-échange à l'instar de l'expérience marocaine, ce qui permet le partage d'expériences entre les deux pays. Le Maroc et l'Egypte jouent un grand rôle dans le processus de paix au Moyen- Orient, mais nous avons remarqué récemment un mouvement égyptien individuel. Est-ce que vous coordonnez avec vos homologues marocains l'accélération de la paix dans la région? D'abord, je dois insister sur le fait que l'Egypte ne bouge pas toute seule sur l'échiquier du processus de paix au Moyen-Orient vu le nombre de briefings et autres réunions unissant notre pays avec les pays arabes frères vis-à-vis de ces questions et ce, à titre permanent à travers les contacts du président Moubarak et ses rencontres avec les dirigeants arabes ou bien lors des sommets arabes. Le rôle égyptien se caractérise par une spécificité historique et géographique, et aussi par la dimension de la sécurité égyptienne et arabe. Pour vous dire, l'Egypte a toujours été à travers l'histoire un axe des grands événements du Moyen-Orient et du monde entier. Cette spécificité implique plusieurs devoirs envers les Palestiniens, par exemple l'octroi de l'aide aux autorités palestiniennes concernant la sécurité intérieure après le retrait de l'armée israélienne de Gaza et l'impérative nécessité d'unir les différents partis palestiniens en trouvant un terrain d'entente. Dans ce sens, il existe une coordination durable et permanente entre le Royaume et l'Egypte à travers les contacts et les rencontres du président Moubarak et Sa Majesté le Roi Mohammed VI ou bien par le biais des canaux diplomatiques, non seulement au niveau de la question palestinienne, mais à l'égard de toutes les causes internationales. A cette occasion, tout le monde sait très bien que le Royaume du Maroc a joué un rôle historique important, c'est un rôle qui a un impact positif sur le processus de paix, ce qui l'aide à atteindre ses objectifs en déclarant l'Etat Palestinien indépendant, souverain sur ses territoires avec pour Capitale Al Qods. Sans oublier que Sa Majesté joue un rôle très important en tant que président de la commission Al Qods. Sa Majesté le Roi Mohammed VI mène une série d'initiatives de réformes dans tous les secteurs au Maroc, comment votre pays perçoit-il ces derniers changements ? Depuis l'avènement de Sa Majesté au Trône du Royaume, le Roi Mohammed VI a donné une grande importance aux affaires intérieures du pays, nous l'avons remarqué dans les politiques suivies ces dernières années, et ceci est reflété dans les tournées opérées par Sa Majesté dans les différentes régions du Maroc et l'importance qui leur sont données. Les signes de cette politique sont clairs dans tous les secteurs, par exemple le code de la famille, la réforme dans le domaine religieux, le Conseil suprême des droits de l'homme, l'Instance équité et réconciliation, et enfin l'Initiative nationale pour le développement humain. Il n'y a nul doute que l'Egypte observe avec beaucoup d'attention et de satisfaction les réalisations et développements au Maroc dans tous les domaines. Je tiens à préciser que les relations bilatérales entre les deux pays sont excellentes sur les plans politique, économique et culturel. Enfin je signale au passage que ma mission diplomatique au Maroc est presque arrivée à terme, je vais quitter le royaume dans quelques semaines pour retourner à mon pays natal, avec un bilan positif de réalisations, de connaissances et de bons souvenirs. Je me rappelle avoir donné plusieurs interviews au début de ma mission, et au cours desquelles j'ai dit que j'ai eu de la chance de travailler au Maroc. Je précise que ce sont des sentiments intrinsèques et sincères, aussi je nourris de grands sentiments envers ce pays. A cette occasion, je présente tous mes remerciements au Roi, au gouvernement et au peuple pour l'accueil qu'ils m'ont réservé et ce, durant toute la durée de ma mission.