Hassan Nadaoui Rien qu'à lire le titre, on éprouve l'effroyable sentiment d'aller se prélasser sur le sable de la plus proche plage de la ville. Histoire d'enrager un peu plus un homme qui n'aime pas les femmes. Au risque bien évidemment d'être traité de suppôt de Satan. C'est que "les femmes, suppôt de Satan", de Hassan Nadaoui est un vrai régal en matière de misogynie. Il trouve un malin plaisir à haïr le deuxième sexe, et en fait même -la haine bien évidemment- son seul plaisir. Inconnu au bataillon, le jeune Hassan Nadaoui vient s'ajouter aux légions d'horreur qui, imbu d'un machisme à la va-t-en guerre, n'hésitent pas à dire tout le mal qu'ils pensent de la nature féminine. Celui qui prétend être lauréat de la faculté des études religieuses à Tétouan, et directeur de publication s'est acharmé contre sa femme en la traînant dans la boue. "Son livre" de 150 pages est un pamphlet où seule la névrose le dispute à la médiocrité. Quand il n'en fait pas le mal suprême, Nadaoui traite la femme du majordome de l'enfer. "Voici venu le temps des femmes" s'indigne l'auteur. Damnées, stigmatisées, abhorrées et d'une redoutable veulerie, ces créatures immondes "dominent les hommes dans les sociétés arabes". On se dit que toute l'histoire est finalement une question d'un sado-masochisme inavoué, on se trompe, sadiquement. Le bonhomme dont la photo fait la couverture de cet opus a je ne sais quoi d'inquiétant. Bien fagoté, avec sa gueule de golden boy qui se cherche, les cheveux gominés, il n'épreuve que le plaisir de haïr. Cherchez la femme ! Vous la trouvez d'ailleurs : baillonnée, battue, abaissée. Ainsi châtiée, elle aura tout le mal d'ourdir quoi que ce soit avec le malin. L'esprit du mal, lui, n'a qu'à bien se tenir. Privé de sa cinquième colonne, voire de son allié stratégique dans ce bas monde, il retournera aux entrailles de la géhenne. En attendant, il faut cultiver, alimenter et entretenir la haine de sa prochaine. Nadaoui le fait : son brûlot est débilement drôle, par son outrage même "celles qui se complaisent dans l'infamie et l'indignité, sur les pages des revues et dans bandes vidéos des clips sont damnées". Idem pour les maquillées, les coiffées, celles qui sortent sans tuteurs, les voyageuses, les usagères de taxi, les chanteuses, les speakerines… toutes ces femmes sont "le bois de l'enfer". Le fqih BCBG, avec sa petite frimousse d'adolescent mal dans sa peau, fait feu de toutes les femmes. Seule vertu à ses yeux : elles sont plus "fortes et de loin, de Satan". Moulées dans leurs nouveaux collants ou légèrement vêtues, les amazones marocaines et soldates du démon, sont partout. "Elles élèvent leur voix dans les chaînes satellitaires, les parlements, les associations, les syndicats… et on en passe !" Trop ? O sancta simplicitas! Ce Nadaoui prend un plaisir pervers –le mot est involontairement craché !- mais bien heureux à être méchant. Source inépuisable de satisfaction, il est plus que normal que cette misogynie doit être pour le Musulman -à l'image de Nadaoui- ce qu'un stupa est pour le bouddhiste : un monument funéraire élevé sur les ruines de la femme ! Ce qui est de ce fait satanique, c'est de ne pas haïr assez fort le monde dominé par la chair et ses sueurs diaboliques qui sont censées vous décevoir… nécessairement ! Inutile de vous enrager ! Car vous n'êtes pas au bout de vos surprises. "Les femmes, nous édifie le prêcheur à la cravate d'enfer !, sont des terroristes, au vrai sens du terme !" Bardées d'explosifs que tout prête à penser qu'elles sont de nature physique ! "elles tuent le sens de l'honneur chez l'homme". Nées pour tuer, "elles posent des mines sataniques dans les foyers afin de les faire exploser !". A vous de conclure : si la femme fait saper un foyer, c'est qu'elle n'en fait pas partie. Alors, de quels couples Nadaoui fait allusion ou référence ? On passe. Trop y réfléchir, c'est faire le jeu des femmes. Or "ce ne sont que les ambassadrices de l'Occident laïc, et des vipères à la défense des droits de Satan ! " Ce qui implique que "les mouvements féministes sont des mouvements sataniques". On en arrive au nouveau code de la famille. On s'y attendait et là aussi Nadaoui ne déçoit pas : le plus grand bien pour le macho bigotement présentable consiste à faire tout le mal qu'il peut à tout ce qui touche à la femme. "Le nouveau code, écrit-il sentencieusement, répond à la volonté et la volupté de ces dévergondées, ennemies de Dieu, de son Prophète et des fidèles !".