L'USFP prépare son 7ème congrès Les préparatifs pour le 7ème congrès national de l'Union socialiste des forces populaires (USFP) vont bon train. Dans une semaine, le coup d'envoi, pour entamer la dernière ligne droite, sera donné avec la réunion du comité préparatoire. Déjà, le discours de circonstance prononcé par le premier secrétaire, Elyazghi annonce, d'entrée de jeu, la couleur. Un pari et une stratégie. Trente ans après la tenue du congrès extraordinaire des socialistes marocains qui avait, en janvier 1975, tranché sur le choix dit de “stratégie de la lutte démocratique, le parti de feu Abderrahim Bouabid aura à refondre le choix stratégique doctrinal”. Le “rapport idéologique”, cher aux socialistes marocains, serait-il caduc ? Les termes du Premier secrétaire sont très nuancés à ce propos. Il s'agira plutôt de “la réaffirmation du positionnement à gauche de l'USFP”, mais avec une rupture dans la continuité. Bien que la clarification idéologique, avec tout son cortège de dissensions et de scissions qui ont ébranlé le parti, a déjà eu lieu au 6ème congrès, le 7ème serait pour l'USFP ce qu'a été le congrès de Bad Godesberg en 1959, pour l'histoire de la social-démocratie allemande : abandonner toute référence au marxisme -et ses corollaires - en s'identifiant comme parti socio-démocrate, réformiste, acceptant l'économie de marché. L'USFP a déjà lancé une réflexion conjointe avec la Fondation Ebert, l'académie de la pensée socio-démocratique allemande. Simple coïncidence ? Quoi qu'il en soit, l'heure est à “la redéfinition de l'appartenance socio-démocratique de notre parti”, commente Elyazghi. C'est là un moment crucial, à l'instar de celui de 1975, qui verra la modification en profondeur des orientations stratégiques, en bousculant le tabou de “l'identité figée et transcendantale”. De l'identitaire au politique, les congressistes statueront également sur la révision constitutionnelle. Une première, depuis bientôt une décennie. “Le parti, déclare M. Elyazghi, doit élaborer un programme précis pour faire évaluer les réformes politiques et constitutionnelles”. Il s'agira de “quelques aspects ayant trait aux compétences du Premier ministre, la deuxième chambre, la désignation des hauts responsables de l'Etat...”. Autant de réformes impliquant une refonte de la constitution, sans pour autant remettre en question la distribution des pouvoirs. On s'en souvient encore, la nomination de Driss Jettou, à la place d'un autre premier ministre politique, avait soulevé, dans la foulée du débat, l'article 24 de la constitution. Si Elyazghi n'est pas le seul à plaider pour cette optique, il est convaincu, paraît-il, que la classe politique est prête à débattre, sinon à accepter une telle révision. Ahmed Osmane, entre autres, l'avait déjà déclaré à maintes reprises. Il n'en demeure pas moins que M. El Yazghi reste au diapason de la logique qui a prévalu au cours du vote positif de son parti de la constitution de 1996 qui, comme chacun le sait, est le cadre de l'alternance consensuelle. En clair : “la priorité, en la matière, revient au respect rigoureux des dispositions constitutionnelles pour garantir la stabilité et le bon fonctionnement des institutions”. Communauté d'idées Le message est on ne peut plus clair : si réforme il y a, elle se dessinera à l'aune de la participation de l'USFP, depuis 1998, aux commandes des affaires publiques. Qui plus est, sera au cœur du débat lors des prochaines assises. En plus du fond, il y a la forme. A ce niveau-là, la direction de l'USFP propose une innovation de taille : organiser des débats et des échanges d'idées, tant avec la base qu'avec les autres factions progressistes qui partagent les mêmes valeurs. D'habitude très jalouse de l'intimité, sinon la clandestinité de sa vie interne, l'Union socialiste franchit un pas, pour le moins inédit. S'ouvrir sur “les croyants progressistes” est certes une tradition socialiste européenne, comme c'était le cas par exemple lors du congrès du PS français en 2003, il n'en participe pas moins de la volonté de l'USFP, d'une part de “l'obligation de faire preuve de modestie et d'humilité, tout en renforçant les convergences des forces de gauche”, et d'autre part de “vendre” autrement son image de parti ouvert inébranlable et démocratique. La manière de médiatiser l'événement a été, d'ailleurs, soulevée sans ambages. L'affaire est entendue: la dernière chose qu'un parti accepte de perdre est, non seulement sa langue, mais aussi et surtout son image. Sur ce plan, c'est à un plein lifting qu'on aura droit pendant le printemps 2005. Et pas des moindres, pour sortir de l'ancienne typologie des formes de leadership. Le débat, à ce sujet, avait tenu en haleine tous les militants du parti, un certain Ramadan 2004. Après la démission de l'ancien Premier secrétaire, Abderrahmane Youssoufi, des voix se sont élevées au sein du bureau politique pour “en finir avec la direction historique”. Pour l'histoire, le charisme historique s'observe en règle générale quand les entités politiques sont traversées par des crises profondes. Les crises et soubressauts, l'USFP en a connu et pas des moindres. Le choix de M. Elyazghi semble participer de cette double acceptation : garder l'ascendant légitime de l'histoire, certes, mais s'élever au stade d'un parti moderne. Tout un programme.