Mehdi Manjra, Abdelaziz Khattabi C'est l'heure des bilans. Et des pronostics également. Le début de l'année est souvent un moment propice pour tenter de dévoiler l'avenir, prédire les événements futurs… Madame Soleil, quoi. Au Maroc, on a beaucoup plus de chance que les autres pays connus pour le nombre astronomique d'astrologues ! Car pour savoir ce que nous réservera l'année 2004, il y a deux éminences grises, deux visionnaires. L'un, comme vous l'auriez deviné, est astrologue. L'autre, son voisin de palier est futuriste. Le premier s'appelle Abdelaziz Al Khattabi. Le deuxième est notre Medi national : Mehdi Manjra. Qu'ont-ils en commun ? Hormis l'outil de travail, l'astrolabe pour l'un et l'ordinateur pour l'autre, tout le reste. Entre autres : la frustration. Tous les deux fustigent l'indifférence que subissent les éclairés de la nation. Ils en veulent à tout le monde et surtout aux responsables. Des vertes et des pas mûres. Mais ce n'est pas là le plus intéressant. Notre Medi national parle amèrement de l'année 2004. Pour le futuriste le plus perspicace, l'avenir c'est déjà le passé. Eh oui. D'aucuns diraient qu'on n'a pas besoin d'être futuriste pour le savoir. Mais Medi persiste et signe: “nous y récolterons ce que nous avons semé en 2003”, déclare-t-il à “Assahifa”. Un peu plus loin, il ne trouve aucune contradiction à critiquer - c'est le moins que l'on puisse dire - l'élite pour “manque d'une visibilité à long terme”. Une question, cependant : si c'est le futuriste qui est intimement convaincu que l'avenir est déjà derrière nous, pourquoi donc demander aux autres d'être des visionnaires ? Franchement, on a le sentiment d'être blasé ! Mais, Dieu merci qu'il y a Abdelaziz Khattabi qui prendra le témoin. Plus pessimiste, plus sombre, certes, mais il n'en demeure pas moins qu'il se hasarde, lui, sur les sentiers impénétrables de l'avenir. “L'année 2004, martèle-t-il, connaîtra des soubresauts périlleux”. Dans l'interview accordée à “Al Akhbar” de cette semaine, l'astrologue est tranchant : sous d'autres cieux, les services auraient recouru à ses services. A en croire ses propres dires, le FBI ne daignerait pas d'ausculter la Boule de ses collègues yankee ! Donc : “Les services secrets marocains sommeillent (sic). Ils ne s'intéressent pas au domaine”. Décidément, nos agents secrets ne réalisent pas les bienfaits de l'éveil ! S'ils ne passent pas leurs nuits à contempler les astres à côté de notre devin attitré c'est qu'ils sont déjà au lit ! Or, il y a urgence. La sécurité du pays mérite bien des moments de romance à contempler les constellations, suivre les mouvements des étoiles et quelques cours d'astrologie. Et pourquoi pas, de prévoyance ! Khattabi sait de quoi il parle. Justement, il est écrit dans un manuscrit astrologique qui date de l'époque médiévale que “celui qui sait, vaincra les astres”. Conclusion : pour parer à la fatalité, il n'y a qu'à apprendre par cœur les leçons de Nostradamus ! Le célèbre agent de liaison entre ciel et terre. Khattabi plane encore plus haut et plus loin: “la stratégie de l'Etat doit prendre en considération l'avis des astrologues et leurs prévisions”. Mieux “les manuels scolaires et les cursus universitaires doivent impérativement comprendre l'astrologie”. Après l'Etat, les citoyens deviennent tous des astrologues. Même Baddou Zaki saura, à l'instar des coachs des grandes équipes européennes, forcer le sort et remporter la Coupe d'Afrique. «Le Real Madrid recourt aux astrologues». Chose somme toute normale. L'équipe nationale n'a pas remporté la Coupe d'Afrique depuis belle lurette. Or, Baddou Zaki, conclut l'astrologue sentencieusement, ne peut à lui seul réaliser cet objectif. Il lui faut un astrologue”. Vous le voyez bien : au moment où tout nous semble perdu avec notre Medi national, l'astrologue arrive pour nous sauver. On a essayé toutes les recettes. On c'est l'Etat, les citoyens et Baddou Zaki aussi. On a frappé à “toutes les portes qui ne donnent sur rien, et la seule par où on peut entrer, qu'on aurait cherché inutilement depuis 1956, on s'y heurte. Et elle s'ouvre”. Comme par miracle. La lumière jaillira, et tout est sauvé. Enfin, un exemple à méditer : “si Saddam avait suivi plus docilement les conseils de ses astrologues, toute l'histoire aurait changé”. Comme quoi, il est la victime de “la guerre des étoiles”.