Mohamed Karam, membre du Bureau politique de l'USFP Depuis quelques semaines, le discours de certains dirigeants de l'USFP devient de plus en plus critique. Bien plus, le Premier secrétaire Abderrahman Youssoufi n'a pas hésité à prononcer l'échec de l'expérience de l'alternance consensuelle quant à la poursuite de la transition démocratique. Son allocution à Bruxelles est édifiante à ce sujet. Mais pour mieux comprendre cette nouvelle tendance, nous avons contacté Mohamed Karam, qui est membre du Bureau politique de l'USFP et qui a bien voulu éclairer notre lanterne. La Gazette du Maroc : quelles sont, d'après vous, les raisons du durcissement récent du discours de l'USFP ? Mohamed Karam : tout d'abord, il faut dire que l'USFP n'a pas adopté une position de soutien critique au gouvernement auquel il participe avec huit ministres. A ma connaissance, l'USFP se positionne toujours au sein de la majorité gouvernementale. Et comme l'opposition s'exprime à travers les positions prises au Parlement, jusqu'à ce jour le groupe de l'USFP a toujours voté avec discipline aux côtés des partis de la majorité. Cela dit, la position exprimée par le premier secrétaire de l'USFP, dans son discours prononcé à Bruxelles, est une analyse approfondie de la situation qui découle de la phase de rupture avec la méthodologie démocratique, notamment après la désignation d'un Premier ministre en dehors des partis et en dehors des résultats des élections du scrutin du 27 septembre. Cette analyse est partagée par un grand nombre d'Ittihadis et cette position ne date pas d'hier, puisque les débats se sont poursuivis de manière naturelle au sein du Bureau politique depuis la désignation du Premier ministre. Elle reflète également la nature des débats qui ont eu lieu à la session d'octobre du Comité central de l'USFP. Pariez-vous sur le temps (2 ans d'après Youssoufi) pour revenir à la méthodologie démocratique après un remaniement ministériel ? Le remaniement ministériel n'est pas le plus important. Ce qui est essentiel, à mon sens, c'est de mettre fin à une situation où les protagonistes politiques ne jouent pas franc jeu. Il est important que la volonté politique soit conjuguée par l'adoption d'une vision claire qui ne remette pas en cause les acquis et les cumuls positifs et qui ouvre la voie de l'espoir et de la confiance dans nos institutions et dans l'action politique de la part de millions de nos jeunes. Pouvons-nous considérer que Youssoufi a exprimé l'échec de l'USFP à gérer la transition ? L'USFP n'a pas échoué dans sa gestion gouvernementale dans le cadre de l'alternance consensuelle. Autrement, il aurait été sanctionné et n'aurait pas occupé la première place lors des élections législatives de septembre. Ce qu'il faut dire, à ce sujet, c'est qu'il y a eu déception et non pas échec. C'est à partir de ce constat que bon nombre de dirigeants ittihadis se sont opposés à la participation du parti à l'actuel gouvernement et insisté sur la révision des positions en perspective du VIIème congrès de l'USFP. Le Maroc s'apprête à organiser les élections communales. Comment agiriez-vous pour dépasser la persistance de la moitié des électeurs à ne pas se rendre aux urnes ? Les prochaines élections communales sont une étape politique importante sur laquelle parie notre parti. D'une part, il faut que l'USFP sauvegarde sa place de leader et d'autre part, il faut mettre en place de nouveaux mécanismes pour convaincre les millions d'électeurs déçus d'aller voter. Il faut, enfin, inciter les jeunes de 18 ans d'aller s'inscrire sur les listes électorales et réussir à trier sur le volet les candidats. Cependant, l'actuelle situation et l'attente qui la caractérise, rendent difficile la tâche des intervenants politiques et nous incitent à innover pour mieux appréhender l'avenir et dépasser les lacunes.