La Fondation de la culture islamique, une institution espagnole, mène depuis janvier une campagne pour la promotion du “manifeste contre l'Islamophobie”. “Le silence institutionnel et intellectuel dominant” contre lequel s'élève le manifeste et qui persiste malgré lui, ne nous abattra pas. Cependant, c'est construire des châteaux en Espagne que de croire possible, dans l'environnement actuel, de faire plier “la manipulation de l'information et l'ignorance qui détruisent la compréhension entre les peuples et les cultures”. De la phobie de l'Islam à l'islamophilie, il y a sans doute des espaces à prendre. Entre l'écrivain-journaliste américaine d'origine italienne, Oriana Falacci qui crache sur l'homme arabe et l'Islam, et l'écrivain italien Erri Luca qui déclare que “l'Islam est notre frère de sang”, se trouvent bien des populations à convaincre. Pour autant, nous ne sommes, Musulmans du monde entier, qu'au début de nos peines. Lorsque juste après les événements du 11 septembre, le président américain George W. Bush évoque les Croisades, ce n'est pas un banal lapsus mais l'expression d'un conscient qui a fait de l'Islam et des Musulmans un ennemi tout indiqué autant par besoin naturel d'en avoir un que par “nécessité” économique. Nous avons de cette manière contre nous Jésus et le pétrole unis dans un même combat. A peine aujourd'hui on commence à comprendre que dans le soutien des républicains américains à Israël, il y a une composante messianique. L'hebdomadaire français “Le Nouvel Observateur” (30 janvier 2003) explique qu'aux Etats-Unis la “droite évangélique ultra voit dans le retour des Juifs en Israël le signe annonciateur de la Seconde Venue du Christ”. Michael Lind, auteur d'un livre sur Bush, explique “qu'il y a toutes les raisons de supposer que George W. Bush (…) croit sincèrement que Dieu a donné à Abraham et à ses descendants la terre d'Israël (…) jusqu'à la fin du monde, comme il est écrit dans la Bible”. Naturellement, les descendants d'Abraham par Ismaël sont exclus de cette promesse. Enfants déjà de l'esclave Hajar, leur crime était, avec la découverte du pétrole au début du siècle dernier, de se trouver au mauvais endroit. Ils y ajoutent aujourd'hui le délit de se retrouver au mauvais moment. L'instant où la toute-puissance américaine, sans contrepoids, chérissant l'or noir avec la même ferveur qu'elle adore le Christ revu à la lumière de ses intérêts, entend contrôler toutes les sources d'énergie, qu'elles soient terrestres ou célestes. Avec une bonne conscience indémontable, ils sont prêts à bouffer de l'Arabe, ou du Musulman, c'est du pareil au même, dès lors qu'il essayera de s'interposer entre eux et le pétrole. L'Occident, en général et les Américains en particulier, considèrent que le sous-sol pétrolifère est le leur. Leur raisonnement à ce sujet est des plus simples. Sans eux, le pétrole ne vaut rien : c'est leur technologie qui le découvre et l'extrait, c'est leur technologie aussi qui le raffine, c'est elle également qui l'importe, l'exporte et le transporte, c'est encore elle qui le consomme et c'est enfin leur dollar qui le paye. Sans lui, le ryal saoudi ne voudrait pas un kopeck troué. Dans ce schéma, l'Occident retient contre les Musulmans, en plus du défaut qu'ils ont d'être Musulmans, les charges de sous-développement. Il n'y a pas de raison bien sûr, mais depuis toujours on connaît la meilleure des raisons.