Il n'y a plus de doute possible sur la collusion entre le Polisario et Al Qaïda au Maghreb Islamique (AQIM). Des éléments probants sont venus confirmer une telle collusion. Enquête. Une fois de plus, le Polisario s'est laissé aller à la provocation en paradant à Tifariti. Mais cette fois-ci, Mohamed Abdelaziz n'y était point. Seul celui qui fait office de «ministre de la défense» de la fantomatique «RASD» a pu faire défiler le peu de soldatesque qui reste. L'absence du chef des séparatistes à Tifariti est due, selon plusieurs sources occidentales, aux rapports exécrables qui régissent désormais les relations entre la direction actuelle du Front avec les plus hautes autorités d'Alger. Chaque semaine, des armes nouvelles sont saisies par l'armée algérienne. Aucun doute n'est plus possible quant à l'origine polisarienne d'une bonne partie de ces armes. La connexion entre le Polisario et Al Qaïda s'amplifie à mesure que les déchirements au sein de la direction du mouvement séparatiste s'intensifient. L'implication du Polisario dans l'activisme terroriste au sein même de l'Algérie est devenue une donnée que les responsables algériens eux-mêmes peinent à occulter. Les forces de sécurité algériennes ont tué 120 militants islamistes présentés comme «terroristes» et en ont arrêté 322 autres au cours des six derniers mois, selon un bilan annoncé récemment par le ministre algérien de l'Intérieur Noureddine Yazid Zerhouni. Parmi les islamistes abattus figurent plusieurs chefs du mouvement terroriste Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI). Or, dès l'été dernier, la presse algérienne avait révélé qu'une partie des terroristes abattus venaient des rangs du Polisario (1). La question d'une dérive islamiste du Polisario a été évoquée à maintes reprises par de nombreux experts. Le développement de l'idéologie salafiste dans la région, symbolisée par l'AQIM, et l'usure de plus de trente années d'une lutte vaine ont facilité le rapprochement de la frange la plus jeune du Polisario avec des mouvances radicales. A Washington, à Paris et à Bruxelles, on ne craint plus le retour du Polisario à l'action militaire. On craint plutôt la radicalisation de sa jeunesse cloîtrée à Tindouf, sans perspective d'épanouissement aucune. La reconversion à l'islamisme radical Dès 2005, Hametti Rabani, un ancien dirigeant polisarien faisait un constat sévère mais crédible de l'état du mouvement. «Le Polisario est en situation d'échec. La majorité des anciens combattants l'ont quitté et se sont reconvertis dans les affaires en Mauritanie. De nombreux dirigeants historiques sont partis également. Restent pas mal de jeunes. Que peut leur dire la direction ? Quel espoir peut-elle leur donner? Aucun. Le mouvement est dans l'impasse, alors certains, pour ne pas désespérer, se tournent vers la religion, vers Dieu». Il y a moins d'un mois, l'Agence de presse mauritanienne (ANI) a annoncé que l'armée mauritanienne avait été placée en état d'alerte maximale après que des véhicules appartenant à l'organisation Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQIM) aient été repérés dans la zone de Ouadane au nord-est d'Atar (à proximité de la frontière marocaine). Deux voitures suspectes conduites par des terroristes vêtus d'uniformes militaires se sont infiltrées en Mauritanie en venant d'Algérie. De son côté, le journal algérien Al-fadjr avait précisé que ces terroristes avaient questionné des nomades sur l'emplacement d'entreprises occidentales au nord de la Mauritanie. Ces derniers leur avaient désigné une entreprise pétrolière française à Maqtir et à Guelb Errichat, deux sites situés à 100 km au nord d'Ouadane. Les autorités mauritaniennes ont dépêché au nord du pays une unité du premier Bataillon de Commandos Parachutistes (BCP) pour renforcer le Groupement de lutte Antiterroriste déjà déployé sur place depuis quelques mois. Le Washington Post révélera le fait que les véhicules utilisés par les terroristes venaient tout droit de Tindouf. Le 15 janvier dernier, l'émir national de l'AQIM Abdelmalek Droukdel, alias Abou Moussaab Abdeloudoud a appelé, dans un message audio de 15 minutes, les musulmans d'Afrique du Nord à «aider les djihadistes» qui se préparent à viser des intérêts occidentaux et israéliens dans tous les pays de l'Afrique du Nord. Le Etats-Unis et Israël sont spécifiquement visés, comme l'illustrent les images qui accompagnent le message audio et qui montrent des drapeaux américains et israéliens explosant au dessus d'une carte de l'Afrique du Nord. Intitulé «Gaza entre le marteau des juifs et des croisés et l'enclume des apostats», ce message a été diffusé par l'intermédiaire du réseau Shoumoukh Al-islam (gloire à l'islam). Mauritanie : le maillon faible Dans la lutte contre le terrorisme islamiste qui a pu asseoir ses bases sur une large bande sahélo-saharienne, la Mauritanie constitue le maillon faible. En effet, des complicités locales ont été avérées. Pire, des anciens cadres du Polisario se sont convertis aux affaires en Mauritanie et n'hésitent même plus à écouler sur le marché de ce pays des produits destinés à l'aide humanitaire. En fait, dès décembre 2003, ces présomptions ont été confirmées lorsque les services de sécurité mauritaniens ont procédé à l'arrestation de Baba Ould Mohamed Bakhili, membre actif du Polisario alors que ce dernier était en train de voler de grandes quantités d'explosifs dans les dépôts de la Société nationale mauritanienne. «Le 4 juin 2005, l'attaque du GSPC contre la caserne mauritanienne de Lamghiti, durant laquelle 15 personnes trouvèrent la mort, renforça les doutes existant à propos d'une collaboration entre des membres du Front et des groupes islamistes radicaux. En effet, des véhicules du Polisario auraient participé à l'attaque menée par le GSPC et, selon des témoins, certains des assaillants parlaient hassani, le dialecte parlé en Mauritanie et dans les provinces sahariennes. Ajoutons que dès le mois d'avril 2004, les autorités mauritaniennes avaient démantelé un réseau d'acheminement de volontaires de l'ex- GSPC vers le nord du Mali. Ce réseau était chapeauté par un membre du Front Polisario qui fut tué par la suite à Ménéa (Algérie) au cours d'une action du GSPC qui avait coûté la vie à 13 douaniers algériens. Un an plus tard, en avril 2005, l'arrestation de huit «volontaires» mauritaniens pour le Djihad avait mis en lumière le rôle d'un jeune membre du Polisario dans leur recrutement. Enfin, en novembre 2007, était démantelée au Mali une structure de l'AQIM entretenant des liens étroits avec certains habitants des camps de Tindouf» (2). Par ailleurs, l'implication du Polisario dans la grande criminalité est aujourd'hui connue par tous les Etats de la région et des ONG. Même l'ONU a pu s'en rendre compte. Dépourvu des fonds que les anciens pays «amis» lui procuraient généreusement, le Polisario, à travers nombre de ses dirigeants, n'hésite plus à détourner l'aide internationale et à s'adonner au trafic de drogue. Jan Egeland, conseiller spécial du secrétaire général des Nations unies, évoquait en juin 2008 le développement considérable du trafic du drogue. D'après lui, les trafiquants de drogue colombiens sont en train de s'implanter dans la région et «se battent pour obtenir le contrôle des itinéraires transsahariens qui leur permettent d'acheminer leurs drogues vers l'Europe et jusqu'au Golfe» (3). La déliquescence d'un mouvement En réalité, la proposition marocaine d'autonomie interne a scié les branches sur lesquelles le Polisario avait assis sa stratégie propagandiste essentiellement victimologique. Les capitales occidentales s'inquiètent de plus en plus de la déliquescence d'un mouvement qui s'étiole vertigineusement. De plus, les opinions occidentales sont aujourd'hui convaincues du fait que les gouvernants d'Alger sont les premiers responsables de la tension dans l'ensemble de la région. Le refus par la nomenklatura algéroise d'ouvrir les frontières terrestres avec le Maroc est venu confirmer les véritables visées des gradés algériens. L'échec de l'ensemble des stratégies socioéconomiques, malgré la manne gazière et pétrolière considérable, explique en grande partie l'acharnement des responsables algériens à privilégier la tension constante à l'encontre du Maroc. Démuni de moyens financiers, diplomatiques et stratégiques, le Polisario a perdu sa capacité de nuisance face à un pays qui a eu le courage de se remettre en question et dont la pertinence des choix suscite l'adhésion de la communauté internationale. Premier pays sud-méditerranéen à avoir décroché le «Statut avancé» auprès de l'Union Européenne, le Royaume a du même coup acquis la sympathie, voire la protection, de la communauté internationale. Les chancelleries occidentales sont de plus en plus convaincues du danger que représente aujourd'hui un Mouvement disloqué, décapité, décalé et, somme toute, balayé par les nouvelles réalités du monde. L'immigration clandestine, le trafic d'armes et de drogue, la collusion confirmée avec le salafisme terroriste et le détournement des aides internationales précipitent le Polisario dans sa tombe. Aucune puissance occidentale ou régionale ne peut permettre aux séparatistes d'entretenir le non-droit au cœur du nord-ouest africain. n (1) « Des terroristes touaregs et du Sahara occidental dans les fiefs d'Al Qaïda du sud », ElKhabar, 15 juillet 2008. (2) European Strategic Intelligence and Security Center (3) Nadja Bouchira, « Comment désamorcer la bombe du Sahel ? », El Watan, 15 juin 2008