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La saga d'El Nene : Parcours d'un baron pas comme les autres
Publié dans La Gazette du Maroc le 10 - 10 - 2008


Un tribunal espagnol a accepté son extradition.
Mais depuis sa prison, Mohamed El Ouazzani, dit El Nene, fait feu de tout bois pour prouver qu'il est plus espagnol que jamais. Va-t-il échapper à la justice
marocaine ? Retour sur le parcours d'un baron hors norme.
Extradera, n'extradera pas ? A quel jeu jouent les espagnols ? Cela fait bien plusieurs mois que Mohamed Taieb Ahmed, ce trafiquant de drogue notoire connu sous le nom d'«El Nene», devait être remis aux autorités marocaines. Début septembre, l'Audience Nationale, la plus haute juridiction pénale espagnole, s'était déclarée favorable à l'extradition au Maroc du narcotrafiquant, réclamé par la justice marocaine suite à son évasion de la prison centrale de Kénitra où il purgeait une peine de réclusion. Selon une sentence de la 4ème section de la chambre pénale de l'Audience Nationale, Mohamed Taieb Ahmed et Mohamed El Ouazzani, ne sont en fait, qu'une même et unique personne qui utilise l'une ou l'autre nationalité selon ses intérêts, de telle façon à dissuader les autorités espagnoles qui n'ont pas pu obtenir son extradition dans un procès devant l'Audience Provinciale et il tente actuellement d'échapper de la même manière à une action de la justice marocaine.Le tribunal espagnol qualifie les gesticulations du baron de la drogue qui se démène comme un diable pour se soustraire à l'extradition vers le Maroc de « procédés illicites, fallacieux et frauduleux en faisant valoir sa nationalité espagnole d'origine, des arguments totalement rejetés par ce tribunal. Il est évident qu'il s'agit de la même personne, même si elle a différents noms selon la nationalité qu'elle fait valoir à sa guise ». Dans son verdict, l'Audience Nationale qui s'est donc déclarée favorable à l'extradition d'“El Nene” au Maroc, a pourtant relevé que “la décision définitive revenait au gouvernement espagnol”. Ne manquant pas de culot, les avocats d'«El Nene» continuent pourtant à soutenir que le narcotrafiquant, arrêté le 23 avril dernier à Sebta, n'est pas le fameux baron de la drogue qui s'était évadé de la prison de Kénitra en décembre dernier où il purgeait une peine de 8 ans de prison pour trafic international de drogue. Un appel pour demander l'abrogation de cette ordonnance a été ainsi déposé par les avocats Javier Arias, Jose Luis Pizarro et Ricardo Alvarez Ossorio pour empêcher le baron d'être extradé vers le Maroc.
Manoeuvres
Ce n'est pas la première fois que les avocats du baron usent de subterfuges pour empêcher l'extradition d'El Nene vers le Maroc. En effet, quelques jours après son arrestation, Jose Luis Pizarro l'avocat d'«El Nene», publiait un communiqué de presse dans lequel il regrettait que son client ait choisi de recourir à la grève de la faim pour protester contre son arrestation et surtout contre son éventuelle extradition.
Dans sa lettre, l'avocat, précisait que «En tant que citoyen espagnol, M. Taieb qui est détenu à la prison de Soto del Real Madrid va respecter les décisions de nos tribunaux, mais il assurera sa défense par des moyens légaux à sa disposition pour prouver son innocence. Pour lui, «El Nene n'est pas une personne en fuite et ne s'est jamais comporté comme tel.En Décembre, après avoir purgé la peine au Maroc, il est retourné dans son pays par le poste frontière en utilisant sa carte d'identité espagnole et à la fois le passage des contrôles de police marocaine comme les Espagnols.»
Enfonçant le clou, l'avocat va encore plus loin rappelant que «M. Taieb a même comparu devant la Cour provinciale de Cadix pour résoudre certaines questions juridiques en suspens » !
Il est resté bien visible, se promenant librement dans Sebta et a même renouvelé sa carte d'identité au commissariat de la Police à Malaga. Selon le journal «El Faro de Ceuta» citant des sources proches judiciaires, précise que 10 jours avant son évasion, El Nene avait renouvelé sa carte d'identité à un poste de police de Malaga, comme tout honnête citoyen.
En même temps, le parquet a demandé à ce que le baron soit déchu de sa nationalité espagnole.
Ce qui vaudra aux magistrats d'essuyer une manif avec force slogan organisée devant le tribunal par une centaine de «parents et amis de Taïb Mohamed», appelant à la reconnaissance de sa nationalité espagnole. Une centaine de manifestants ( payés par la mère d'El Nene) ont ainsi marché sur le siège du gouvernement autonome pour réclamer sa liberté sous prétexte que l'homme recherché au Maroc n'était pas le même qu'El Nene.
Après son arrestation, l'homme a été présenté devant la cour le 25 Juin 2008. La chambre 4 de l'Audiencia Nacional a ainsi demandé à Mohamed Taieb Ahmed s'il était prêt à purger sa peine pour les crimes dont il est accusé au Maroc, il a dit non.
Son extradition n'étant pas acquise comme l'a expliqué, le journal «Elfaroceutamelilla» au cours de sa visite à la ville pour participer à un séminaire à l'UNED, le juge Baltasar Garzon a précisé qu'il y avait des mécanismes qui permettent l'exécution des peines en Espagne en dépit des demandes émises par le Maroc à l'égard d'El Nene, évitant ainsi toute procédure d'extradition. En vertu de l'article 3 de la convention de coopération juridique signée entre le Maroc et l'Espagne en 1997, l'extradition des nationaux des deux pays n'est d'ailleurs pas envisageable. Ce qui laisse le champ libre à toutes les éventualités. Aux dernières nouvelles, le narcotrafiquant a été transféré de la prison de haute sécurité dans le Soto del Real de Aranjuez de Madrid. Pour l'instant, il restera prisonnier jusqu'à ce que le gouvernement espagnol en décide autrement.
Extradition hypothétique
Rappel des faits : El Nene avait réussi son évasion de la prison de Kénitra le 20 décembre 2007 grâce à la complicité de quelques gardiens. Après sa fuite spectaculaire de la fameuse prison centrale, le baron de la drogue s'était rendu directement à Sebta où il a fêté son retour par une cérémonie digne des mariages hollywoodiens. « Le champagne a coulé à flot, il y avait un monde fou et le cortège de limousines conduit par le frère d'El Nene a traversé la ville en grande pompe. A quelques mètres de la frontière marocaine, il est sorti de sa Mercédès et il a brandi un bras d'honneur en direction du Maroc, en arrosant les policiers et douaniers marocains copieusement d'insultes obscènes », commente un sebtaoui. Même quand il était en prison, on raconte que le baron avait en permanence une suite réservée dans le meilleur hôtel de la vieille ville de Sebta pour divertir « son peuple », comme il possède plusieurs caravanes pour la célébration d'orgies, alors qu'il n'hésitait jamais à traverser la méditerrannée pour passer une soirée d'enfer entre copains et coquins à Marbella.
Malgré une absence qui a duré plus de sept ans, l'idole des jeunes marocains de Sebta était de retour et avec elle, les soirées psychédéliques et toutes les bonnes choses qui vont avec. L'homme avait l'air juste un peu plus gros que d'habitude. L'inactivité de la prison sans doute. Pour une grande partie de la jeunesse marocaine de la ville, Mohamed Taieb qui se promenait chaque soir dans la Gran Via avec son crâne rasé, accompagné de ses gardes du corps était l'exemple même du modèle d'intégration réussie.
C'est également un employeur hors pair. On raconte qu'il faisait le tour des lycées pour recruter des jeunes dont l'unique atout est d'être bien baraqués. Pour un salaire de trois mille dirhams par jour. Leur tâche ? Se tenir prêts à traverser la mer à tout moment pour convoyer la drogue. «El Nene n'a pas fait d'études, il n'a aucun diplôme, il sait juste parler l'espagnol de la rue et pourtant, les policiers et les élus de Sebta comme ceux de Malaga, l'appellent sénior quand ils ne se couchent pas sur son passage», précise Driss qui fait dans la contrebande entre Sebta et Tétouan. Ce qui fait qu'à Sebta, El Nene est une véritable VIP. L'homme claque des milliers d'Euros en dévalisant aussi bien les boutiques chics de la ville que les concessionnaires de voitures de luxe. A peine entré à Sebta, le personnage a commandé deux Ferrari pour l'été à un revendeur local. Il a de plus, la réputation de se payer le tout dernier cri des téléphones cellulaires comme il n'hésite pas à faire commande d'une dizaine de hors-bord d'une seule traite. La police aussi savait que «le roi de Ketama» comme aiment l'appeler les loubards du cru, avait débarqué à Sebta. Beaucoup de monde était d'ailleurs au courant de l'arrivée de Mohamed Taieb Ahmed à Sebta . Il n'a pourtant pas eu de problèmes pour traverser la frontière.
Le roi de Kétama
Pourquoi l'homme n'a pas été inquiété? Dès son entrée à Sebta, la police espagnole a enregistré l'arrivée de cet invité quelque peu encombrant, mais pour des raisons obscures, il n'a pas été interpellé. Pourtant, l'homme traîne avec lui un casier judiciaire gros comme ça. Arrêté 17 fois par le Corps national de police et 15 par la Guardia civile, inculpé et reconnu coupable dans plusieurs affaires impliquant le trafic de drogue, de possession d'armes et de tentative de meurtre, il avait réussi à se faire la belle de la fameuse prison de Victoria Kent (Madrid) en 2001.
«Il ne faut pas oublier qu'ici aussi, il y a de grosses pointures sécuritaires qui se font graisser la patte allègrement par des individus comme El Nene», précise un journaliste local. Qui ajoute que le baron a autant besoin de flics pourris du côté marocain que de ripoux du côté espagnol pour faire passer sa marchandise. Une constatation confirmée par l'enquête ouverte en février dernier par la police espagnole et qui avait débouché sur l'arrestation de deux agents de la Police Nationale espagnole et d'un fonctionnaire des douanes, qui ont comparu devant le tribunal de Cadix pour leur implication directe dans le montage d'un réseau de trafic de cannabis, à grande échelle. Ils avaient mis en place depuis 2001 une solide infrastructure d'introduction par le port de Cadix de grandes quantités de hachish en provenance du Maroc, dissimulées dans des camions. Les deux policiers et le douanier servaient d'informateurs et d'intermédiaires pour le reste des membres du réseau de trafiquants, dont El Nene, qui utilisaient cette voie de passage pour la distribution de la drogue en Espagne, en Hollande et en Belgique. Treize personnes au total ont été jugées dans cette affaire. Le baron a quand même fini par être arrêté le 23 avril 2008 par la brigade des stupéfiants de Sebta après avoir reçu un mandat d'arrêt international transmis aux Espagnols par Interpol à la demande du Maroc. Les agents l'ont intercepté alors qu'il se promenait tranquillement à bord du luxueux VUS Hummer noir appartenant à son frère Larbi, dans la région de Horse Source, une route côtière qui traverse la baie sud de la ville occupée.
Pourtant, c'est bien ce jeune homme, qui a, malgré ses trente années derrière lui, une carrière criminelle si faste qu'il est considéré comme l'un des plus grands intervenants dans le trafic de hachish dans le sud de l'Espagne. L'imprudence, l'attrait du danger et le goût exagéré pour la provocation, expliquent sa réputation. Sa fortune, calculée en millions d'euros, dépasse largement son âge.
D'autres trafiquants dedrogue,les plusinfluents, préfèrentinvestir leursbénéfices dansl'immobilier estimantnepas avoirassezde visibilitépour continuerà dilapiderleur fortune en soirées des mille et une nuit, mais lui, a toujours tenu à faire les choses en grand, à être le plus possible visible. La chronologie de ses frasques, vols, viols, bagarres, coups et blessures en série, meurtre, défiait régulièrement la chronique locale. L'homme a commencé sa carrière à l'âge de 14 ans quand il a été arrêté pour la première fois pour le transport de quelques kilos de hachish pour le compte des Echeeri. On raconte que Mohamed est le petit-fils d'un combattant dans l'armée de Franco durant la guerre civile espagnole, qui a bien mérité la médaille pour son courage. Mais El Nene a hérité de l'audace, mais pas pour les mêmes objectifs. Membre d'une famille très pauvre de trois frères, il a à peine fréquenté l'école, qu'il choisit de faire carrière dans la rue par la force de ses biceps.
Durant les années quatre-vingt, Mohamed Taieb a démarré sa carrière de petit convoyeur dans le transport de hachish dans le détroit, où les petits bateaux à moteur hors-bord ont cédé la place à des zodiacs beaucoup plus rapides avant d'être remplacés par les fameux Phantom de 250 chevaux. C'est là où le mercenaire du shit va parfaire sa réputation de casse-cou. A l'époque, les trafiquants de drogue Espagnols dominaient le commerce de la drogue dans le détroit et les marocains servaient juste de «mulets» se contentant de la sous-traitance au meilleur des cas. Les meilleurs pilotes du moment, étaient recrutés parmi les Latinos réputés pour leur expérience dans la contrebande et la drogue. Mohamed Taieb qui travaillait pour l'un des principaux barons de Sebta, a fini par se mettre à son propre compte.
Au milieu des années quatre-vingt-dix; El Nene avait à peine plus de 20 ans ( d'où son surnom) et il était pourtant considéré comme l'un des parrains de Sebta. Sa première sortie médiatique date de 2001. Incarcéré depuis 2000, le 5 octobre 2001, il ne rentre pas de sa permission au pénitencier de Victoria Kent de Madrid. Arrêté auparavant, à la suite de nombreuses condamnations, notamment pour avoir agressé un membre de la Guardia civil et autres joyeusetés du même acabit, sur présentation d'un contrat de travail, El Nene a réussi à se faire la belle. Il a créé une société écran (Niegler) dédiée à la vente de véhicules d'occasion à Madrid, qui l'engage comme directeur. L'ingéniosité du baron a fait le reste. Il se réfugie alors au Maroc et se fait baptiser Mohamed El Ouazzani. Malgré la demande d'extradition des autorités espagnoles, il ne sera jamais dérangé, installé dans une magnifique villa en front de mer, à Marina Smir, à quelques encablures du gotha politique qui a l'habitude de passer ses vacances dans ce coin paradisiaque. Mohamed Taieb a donc trouvé refuge et protection au Maroc, d'où il a continué à diriger son business. L'Espagne a bien demandé son extradition au Maroc, mais les autorités ont fait valoir que l'homme n'était pas espagnol, mais bien marocain !
Jusqu'à ce fameux été 2003 avec l'histoire de la fusillade devant une discothèque de Kabila au passage du roi Mohammed VI, en visite à Tétouan. El Nene et Erramach vont tomber, entraînant avec eux une kyrielle de grosses pointures sécuritaires. El Nene a été condamné à huit ans de prison pour cela.
Ce qui ne l'a pas empêché de faire régner la terreur parmi ses collaborateurs les plus proches qui le qualifient aisément de psychopathe. Grâce au trafic de la drogue et à l'argent qu'il lui rapportait, le baron était convaincu qu'il suffisait de corrompre pour que toutes les portes s'ouvrent. A la suite de la mutinerie qui avait éclaté après sa sortie en catimini de la prison d'Oued Laou le 20 septembre 2005, les langues s'étaient déliées pour un moment. « Nous avons saisi l'occasion rêvée de nous venger d'El Nene qui était dehors. Nous avons exigé l'intervention du procureur pour qu'il vienne constater de visu que ce prisonnier pouvait sortir, aller et venir librement ! », nous avait déclaré à l'époque un prisonnier qui avait participé à l'opération. Pourquoi cette haine du baron ? La cause en est qu'El Nene usait de pratiques particulièrement humiliantes envers les autres détenus. « El Nene qui jouissait de privilèges inouïs, se comportait comme le véritable directeur de la prison » ! Pour s'amuser, il imposait, entre autres, des jeux sordides aux détenus, comme celui qui consistait à simuler pour les détenus une course de chiens avec une prime de 200 DH pour le gagnant !
Sadisme
Meurtrier sans scrupules, l'homme serait d'ailleurs responsable de plusieurs meurtres qui n'ont jamais été élucidés. Des concurrents qu'il fallait éliminer ou tout simplement de simples victimes de sa colère légendaire. Quand il n'était pas en train de gérer une grosse commande, il passait ses journées à boire, manger, à consommer de la cocaïne, à faire l'amour avec des jeunes femmes à qui il forçait la main, sans scrupules. « Ce monstre n'avait pas peur de faire kidnapper une femme dans la rue par ses sbires, qu'il faisait remonter jusqu'à sa villa de Marina Smir pour la violer copieusement. Il les préfère mariées. Une ou deux filles ont bien essayé à l'époque de porter plainte, mais sans succès vu le pouvoir du personnage » rappelle un connaisseur des arcanes du trafic de drogue à Tétouan. Mal accepté dans le milieu à cause de ses méthodes barbares, El Nene n'a pas non plus la sympathie du petit peuple. A l'opposé d'un Hmidou Dib ou d'un Chrif Binlouidane, El Nene n'a pas réussi à mettre les pauvres de la région dans la poche, comme ces Robin des Bois, qui n'hésitaient pas à construire des hôpitaux, des mosquées, des habitations sociales et à acheter le mouton de l'Aïd aux démunis. Exécré même dans le milieu, El Nene n'hésitera pas au cours de sa carrière de balancer ses concurrents directs, voire même payer pour les jeter en prison.
Dans l'affaire Erramach, El Nene a joué le rôle principal dans la mise en scène qui a permis de mettre derrière les barreaux le trafiquant de cigarettes. “On parle de près d'un milliard réglé rubis sur ongle par ce baron pour neutraliser Mounir Erramach”, rappelle notre connaisseur des arcanes du trafic de drogue. Un beau salaud en définitive ! ■
Toujours plus vite, plus fort, plus dangereux…
On croirait que le Go Fast a été inventé sur mesure pour El Nene. Les rodéos sur la route, comme les traversées à fond la caisse de la Méditerrannée, c'est sa spécialité. Ce pro du trafic de drogue, doublé d'un as de la conduite, est réputé notamment pour sa capacité légendaire à semer ses poursuivants, qu'ils soient gendarmes espagnols ou membres de la guardia civile, qui ont tenté à plusieurs reprises de le coincer en pleine méditérannée, poussant l'audace jusqu'à narguer, avec force de gestes obscènes, les téléspectateurs d'une chaîne de télévision privée qui suivaient les policiers lancés à sa trousse sur des vedettes puissantes. El Nene a la réputation d'être un pilote audacieux qui n'hésite pas à braver les flots dans les pires conditions ou à effectuer jusqu'à trois voyages en une seule nuit. C'est ce que les policiers appellent un go-fast. Un convoi, deux ou trois puissants hors-bord ultrapuissants que les trafiquants utilisent pour traverser la mer, remonter de la drogue de l'Espagne. Ces canots pneumatiques équipés de moteurs hors-bord qui font la traversée de nuit en un temps record, El Nene en disposait d'une bonne vingtaine, quand il a été arrêté pour la première fois en 2003. Il a ainsi introduit de nouvelles stratégies dans le transport de la drogue. Il a inventé les bateaux pièges, des appâts, qui sont lancés à toute vitesse en mer, trois à quatre hors-bord dont un seul est chargé de hachish. Le rôle des autres embarcations est de distraire la Guardia civile. Une fois les autres hors-bord saisis et acheminés dans un port espagnol, Mohamed Taieb n'hésitait pas à se déplacer personnellement pour payer les amendes. Des bolides au moteur gonflé prennent le relais pour foncer à une vitesse vertigineuse sur les autoroutes de l'Espagne. Des Audi C5 ou des 4 x 4 Mercedes ML de 400 chevaux pilotés par des chauffeurs «bourrées» de cocaïne ou d'amphétamines pour pouvoir faire au moins 1000 kilomètres en moins de six heures. Les trafiquants utilisent en général de grosses cylindrées volées, 4x4 et berlines, pour convoyer la drogue à plus de 200km/h, de nuit, depuis Marbella et Malaga, dans le sud de l'Espagne. La consigne est de passer en force. En vogue depuis la fin des années 90, cette technique est devenue un des moyens d'approvisionnement régulier des cités. L'équipée sauvage ne s'arrête que pour livrer à bon port la fameuse marchandise, les trafiquants n'hésitant pas à foncer sur les forces de l'ordre ou à prendre l'autoroute en sens inverse. A chaque go-fast, les conducteurs empochent au moins un millier d'euros. Une voiture banalisée qui a pour mission de repérer toute présence policière précède le convoi et, plusieurs kilomètres derrière, le véhicule « mulet » chargé de plusieurs quintaux de résine de cannabis. Les convoyeurs communiquent entre eux à l'aide de téléphones portables qui servent pour une seule remontée de drogue. Une fois arrivés à bon port, il suffit de quelques minutes pour faire disparaître dans la nature plusieurs tonnes de cannabis qui sont déchargées, avant de remonter en petites quantités dans les coffres des voitures vers les banlieues françaises ou belges.


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