Les élections partielles du week-end dernier, malgré le fait qu'elles soient limitées à 4 circonscriptions, sont très révélatrices. Les sièges sont revenus aux élus qui ont été invalidés, parce qu'ils avaient violé le code des élections lors du scrutin du 7 septembre. Malgré une campagne dirigée contre eux, par tous leurs concurrents et en particulier les candidats du PAM, mais aussi par les médias puisque ces élections ont été médiatisées comme jamais, auparavant, un scrutin partiel ne l'a été, ils l'ont remporté haut la main. Ce taux de participation, très faible, y est pour beaucoup. Il est normal qu'une élection partielle mobilise moins que lors d'un scrutin national, mais là les taux sont tellement faibles que l'on peut se poser la question de la représentativité. A Mohammedia l'heureux élu a eu 53 % des voix, mais la participation n'était que de 17 %. Nous détenons là, la clé de l'analyse du scrutin. La faiblesse de la participation profite, en premier lieu, aux notables, aux candidats soupçonnés de faire valoir d'autres arguments que ceux admis en démocratie pour convaincre les électeurs. Abderrahman Youssoufi, voulait renforcer les partis en optant pour le scrutin de liste et donc l'élargissement de la base électorale. Dans son analyse, il pensait politiser les élections et rompre les liens de sujétion entre les candidats et les électeurs. Il pensait aussi que cela rendrait plus onéreux et plus hasardeux, l'opération d'achat des consciences. L'intention était louable, mais l'approche ne tenait apparemment pas compte des réalités. L'extension des circonscriptions a largement participé à la baisse de la participation, révélant que l'électeur Marocain reste attaché aux liens personnels avec le candidat, surtout dans un environnement où la vie partisane est en décrue. Les notables l'ont compris, ils divisent la circonscription et ne font campagne que dans la partie où ils ont le plus de chances de recueillir des suffrages. Une circonscription à 4 sièges est transformée dans les faits en quatre circonscriptions uninominales… Dès lors, il suffit de quelques milliers de voix, pour se faire élire dans une circonscription où le nombre des inscrits dépasse le quart du million. L'autre phénomène, c'est l'émergence des «chennakas», ces «élites» de quartier qui influent sur le vote et qui traitent au gros. Leur force c'est la proximité, ils ont tissé des liens avec les élus et les autorités et rendent service aux habitants du quartier, qui les remercient en votant suivant leurs instructions. C'est par ce biais qu'il y a usage de l'argent, d'où la difficulté de l'appréhender. De larges couches de la population ne se déplacent pas, pour diverses raisons, liées à la fois à la confiance dans la classe politique et à l'intérêt pour la chose publique. Il faut reconnaître que ces couches, souvent instruites, n'ont que peu d'intérêt pour les institutions électives. Cette situation ne peut être changée ni par voie législative, ni par une campagne médiatique, le mal est enraciné et il faut prendre son mal en patience. Seule l'éducation, en prenant en charge cet aspect civique pourra nous préparer des générations attachées à des institutions représentatives au niveau de nos aspirations. Ecole, société civile et partis politiques devraient s'atteler à ce chantier de longue haleine. C'est le seul moyen de s'assurer que les opérations votatives, et les institutions qui en sortent, ne resteront pas un luxe cher payé. n