Dans les casinos se côtoient toutes les couches sociales, mais aussi des profils très différents. Galerie de portraits. A ses débuts, la Mamounia était un casino de luxe. Le costume cravate était exigé, les mises minimum étaient élevées. En contrepartie, le service était personnalisé, l'accueil impeccable, les croupiers d'une haute tenue. La clientèle était d'un certain niveau et l'ambiance très feutrée. Tout cela a changé. Les nouveaux casinos, 3 à Agadir, un deuxième à Marrakech et celui de Tanger, ont «démocratisé» l'activité. Il n'y a plus d'exigence vestimentaire et toutes les bourses peuvent tenter leur chance. Cela donne une mosaïque de personnage. D'abord les pique-pièces. Ils sont combattus dans les casinos de luxe, mais on les retrouve partout dans le monde dans les super marchés du jeu. Ce sont des habitués qui flairent un nouveau, se mettent à côté de lui, commentent son jeu et lui proposent leurs conseils ou leur prière. Dès que ça tourne un peu bien, ils demandent une pièce pour tenter leur chance. Ce sont les seuls gagnants sûrs du casino, ils viennent sans le sou et repartent avec des gains ou seulement des pièces offertes par les autres joueurs. Ensuite, il y a les joueurs occasionnels, qui sont là pour s'amuser. Ils commentent tout, agacent les autres et partent rapidement. Ils sont souvent en vacances et font une virée au casino après un dîner bien arrosé. Il y a les habitués, ils représentent toute l'échelle sociale. A Tanger, si vous y allez le week-end, vous pourrez trouver un couple aussi distingué que gentil. Ils sont gros propriétaires terriens dans le Gharb. Lui joue assez gros, mais se contrôle, elle s'amuse à moindre frais. Ils peuvent se permettre un niveau de pertes et l'assument. «Au lieu d'avoir une danseuse, il a ce vice, je préfère ça, il est à côté de moi» dit la femme. Des gestes de tendresse et une extrême complicité, prouvent la solidité du couple. Le jeu ne détériorera pas les relations de cette famille, pour une simple raison : le self-contrôl. Mais juste à côté, vous avez le gros trafiquant de drogue, entouré de filles de joie très vulgaires, qui pète, rote, et empeste. Il appelle toutes les heures «j'ai besoin de dix millions». Il perd beaucoup et dérange les autres. Cependant, tout le casino est à ses pieds. Il laisse de gros pourboires et vient régulièrement. Il y a les autres, les petits joueurs, comme ce jeune garçon qui vient avec 1000 DH, compte ses pièces à chaque coup, rayonne quand il gagne et s'assombrit quand il est lessivé. Il travaille chez un notaire, le jeu n'étant pas conseillé quand on manipule l'argent des autres, il y a à craindre pour son avenir. A Agadir, il y a d'abord les coréens, ils jouent du coude pour se faire une place, font un tapage énorme, changent de table à longueur de soirée et ont un problème de communication avec les européens. Il y a aussi les fils à papa, entourés d'une véritable cour, qui flambent pour séduire les nanas qui les accompagnent et qui sont peut être les plus insupportables. Les touristes bien sûr, mais aussi quelques nababs complètent le panorama. A Tanger, beaucoup de grosses fortunes fréquentent le casino, d'abord pour y dîner, c'est une excellente table, (et gratuite en plus), ensuite pour jouer un moment. Mais pendant longtemps, c'est le casino la Mamounia qui accueillait les grosses fortunes. Elles exigeraient des tables privées, parce que même dans le vice, elles ne voulaient pas se mélanger au petit peuple. C'est fini, c'est une frime qui leur a coûté trop cher. Ainsi, un gros entrepreneur de Casablanca y allait chaque semaine en compagnie de sa femme. Ils laissaient chaque week-end des dizaines de millions. Sa femme a accouché aux portes de l'hôtel. Il a fait faillite, cela n'arrive pas qu'aux petits salariés. Il y a enfin les petits malins. L'hôtel leur offre la pension complète, ils viennent en week-end, changent de l'argent, mais jouent très peu. Leur casino à eux c'est le week-end gratos. Des gagnants assurés en somme ! Egalité: Les femmes et le jeu Il n'y a pas encore parité, mais les femmes ont bel et bien intégré le monde du jeu. Dans les casinos, il y a celles qui accompagnent un homme, qui sont majoritaires, mais qui prennent vite le virus et jouent elles-mêmes. Cela commence toujours par les machines à sous avant de passer à plus sérieux, les black-jack, le poker et enfin la roulette. Mais il y a aussi les habituées, qui viennent seules, dépensent beaucoup. Il faut savoir que la «drague» n'existe pas dans le milieu du jeu. La fièvre de celui-ci est exclusive et les femmes deviennent quasiment asexuées. Au loto et au PMU, où on peut jouer plus discrètement, elles sont aussi nombreuses. Au casino, les femmes sont soit d'un milieu aisé soit des travailleuses du sexe du haut du panier. Ces dernières ne viennent pas au casino pour trouver des clients, mais pour jouer. Au loto et PMU ce sont souvent des mères de famille, ou même des femmes de ménage. On peut en rencontrer dans quelques cafés où l'on joue au Rami, mais pas dans les grandes parties de poker, sauf celles qui se camouflent en soirée entre copains, mais elles y jouent rarement. En général, elles restent plus prudentes que les hommes. Mais à Agadir et Marrakech, on a déjà enregistré des faillites au féminin à cause du casino et de la fièvre du jeu. Multiplication:Histoire des casinos Le Maroc post-indépendance n'a connu qu'un seul casino. A Mohammedia, le Miramar disposait d'un casino. Celui-ci était lié au bordel select le plus célèbre de l'histoire du Maroc, le Sphinx. Il est entré dans l'histoire parce qu'il a inspiré Jacques Brel et sa «Mathilde». Les deux étaient liés au CAB 1 et ont disparu après le deuxième coup d'Etat en 1972. Ensuite, le premier casino autorisé est celui de la Mamounia. Au départ, il était censé recevoir la Jet-set. Mais l'intrusion de groupes comme Partouche, connus pour leurs casinos bas de gamme, fait que les 7 casinos autorisés sont descendus de catégorie. A Agadir, ce sont réellement des casinos bas de gamme. Aux alentours d'El Jadida, Kersee le Sud Africain, promet le plus grand casino d'Afrique. Oui, mais pour quelle clientèle ? L'Etat bookmaker Les opérateurs du jeu de hasard Au Maroc, existent trois principaux opérateurs du jeu de hasard. Le PMU, dépendant du ministère de l'agriculture, qui offre un seul produit, celui des courses de chevaux. La loterie nationale, spécialisée dans le jeu de nombre, co-présidée par la C.D.G et le ministère des Finances et la Marocaine des Jeux et des Sports, qui dépend du ministère de la Jeunesse, couvre les paris sportifs, les instantanés (grattage) et un nouveau produit qui s'appelle le «Chrono», à partir de 2,50 DH, dont le tirage est effectué toutes les cinq minutes. Par ailleurs, entre la MJS et la Loterie nationale se trouve un opérateur O.T.T. (On line Transactions Technologie) qui a signé le 10 avril 2.000 un contrat de gestion et de services qui stipule que cet organisme s'occupe de l'installation, de la distribution et du marketing. La Loterie Nationale verse 20% de ses ventes brutes à l'Etat sous forme de redevance et 56% de ses ventes brutes aux joueurs sous forme de gains. Les produits commercialisés, et les gains distribués en 2007 sont les suivants : nLOTO (12.5 milliards de centimes); nKENO ( 9.3 milliards de centimes ); nQUATRO ( 2.7 milliards de centimes ); nPICK N'PLAY (6.2 milliards de centimes). PMU, un événement par jour Riches, aisés ou pauvres, jouent tiercé, quinté ou quarté du P.M.U. D'autres jouent course par course. Des accros ne quittent pas les locaux, yeux fixés sur les écrans, un quart de pain avec la moitié d'une sardine à la main, attendant le résultat. Le PMU organise sept évènements par semaine. Un tiercé le lundi, un quinté le mardi, et trois quartés les jeudis, les samedis et dimanches. Ces paris ont pour support des courses françaises. Mercredi et vendredi, le PMU organise des quartés locaux. Le 1/3 des recettes va à l'Etat. Les 2/3 aux gagnants qui sont souvent sales et chétifs.