Ils sont tous les deux nés au Maroc, arrivés en France alors qu'ils étaient enfants et sont donnés favoris pour les élections. Nourredine Nachite et Najat Vallaud-Belkacem ont répondu à nos questions, revenant sur leurs parcours, leur engagement et leur façon d'aborder la politique en tant que Français d'origine marocaine. Zoom sur deux modèles de réussite volontaires et passionnés. Tout sourit à cette brillante jeune femme de 30 ans. Après des études couronnées de succès, la Lyonnaise a su s'imposer au Parti socialiste jusqu'à devenir l'une des porte-parole de Ségolène Royal lors des présidentielles. Elle se présente aujourd'hui dans le 3ème arrondissement de Lyon et croit en son succès pour les municipales et cantonales et cela ne sera peut-être qu'une première étape pour celle qui aura sans doute un destin national… La gazette du Maroc : Najat Vallaud-Belkacem, qu'est-ce qui vous a donné envie de vous engager en politique ? Najat Vallaud-Belkacem : Militante du Parti socialiste, j'ai été élue en mars 2004 conseillère régionale Rhône-Alpes sur la liste de Jean-Jack Queyranne et j'assume désormais les fonctions de Conseillère déléguée en charge de la Culture. Je suis également membre du Conseil national du PS et j'ai été la porte-parole de Ségolène Royal pendant la campagne présidentielle de 2007. Le Conseil régional Rhône-Alpes, à l'initiative de son Président Jean-Jack Queyranne, a positionné la culture parmi les priorités du mandat, au même titre que l'emploi, la formation professionnelle ou l'aménagement du territoire. La délégation à la culture, dont je m'occupe depuis ma nomination en juillet 2007, conduit la politique culturelle régionale, en veillant scrupuleusement aux équilibres entres les disciplines et en veillant aussi aux équilibres entre des territoires inégalement pourvus en offre culturelle… Pour dire quelques mots de mon parcours personnel, je suis née au Maroc dans un milieu rural et j'ai grandi dans la banlieue d'Amiens avant de rejoindre Paris pour achever mes études à l'Institut d'Etudes Politiques. A 30 ans, je suis devenue une Lyonnaise passionnée qui tente, au quotidien, d'agir pour le développement de la ville et l'amélioration de la qualité de vie de tous ses habitants. Mon parcours ressemble finalement à celui de nombreuses jeunes femmes de ma génération qui ont fait le choix des études pour exercer pleinement un métier, être autonomes et accéder à assez de responsabilités pour espérer changer la société, la rendre plus juste, plus solidaire, plus heureuse. C'est pour toutes ces raisons que je suis aujourd'hui candidate aux élections cantonale et municipale sur la liste de Gérard Collomb. C'est grâce à lui que je me suis engagée en politique, parce qu'en travaillant à ses côtés, j'ai pris la mesure de ce que la politique pouvait concrètement changer à la vie quotidienne des gens. Ses projets pour Lyon d'hier sont une réalité tangible aujourd'hui. C'est cet exercice de la démocratie et cette prise de responsabilité qui m'ont intéressée et qui motivent mon engagement. Pourquoi avoir choisi le Parti socialiste? Votre engagement sous les couleurs de ce parti signifie-t-il que vous adhérez à tout ce qu'il prône ? J'ai rejoint le PS parce que les valeurs du parti sont fondamentalement celles dans lesquelles je me reconnais. Placer l'homme au cœur des politiques publiques, défendre la justice sociale, la redistribution, la solidarité, ce sont des principes qui sont aussi les miens. Pour ce qui est d'adhérer à toutes les idées que prône le PS, je vous répondrais que ce n'est pas un parti monolithique. Il y a des courants, des sensibilités différentes et donc des idées différentes. Tous les socialistes n'abordent pas de la même manière la question de la mondialisation ou du marché par exemple. Mais, fondamentalement, ce qui nous unit est plus fort que ce qui nous sépare. Je suis pleinement socialiste avec une sensibilité plutôt sociale démocrate. Vos origines marocaines ont-elles une influence sur votre manière de faire de la politique, d'envisager votre candidature ou d'aborder certains thèmes ? Sont-elles un handicap pour être élue ou dans votre parti ? Mes origines sont indifférentes à ma manière de faire de la politique, je n'en fais jamais un argument de campagne. Je suis une candidate française et je me présente pour être la représentante de l'ensemble de mes électeurs dans toute leur diversité. Cependant, mon histoire personnelle me conduit à porter une attention particulière à la question de l'égalité des chances, aux politiques sociales, à l'éducation, au logement c'est-à-dire à tous ces ressorts de l'intégration et de la promotion sociale. Mes origines ne sont plus un obstacle pour faire de la politique. Je dirais même qu'à l'inverse de mes aînés qui se sont engagés en politique et se sont heurtés à beaucoup de difficultés, mon profil est plutôt recherché. Mais si je travaille dur, c'est aussi pour ne pas être réduite à mes origines. De plus, parce que je lui dois tant, je place l'école et l'éducation au cœur de mon engagement, j'ai la conviction que la meilleure école de la vie reste l'école. Je crois dans l'école républicaine et je veux la défendre. Comment peut-on accepter que les résultats scolaires soient si étroitement liés aux revenus des parents et que les enfants issus de milieux défavorisés n'aient pas les mêmes chances de réussite dans la vie que les autres ? Comment tolérer que certains établissements ne connaissent plus aucune mixité sociale ? Enfin, la protection de l'environnement est également une priorité qui transcendera mon action. Pensez-vous avoir de réelles chances de gagner et que répondez-vous à ceux qui vous considèrent comme étant un alibi (il est dit que vous avez été porte-parole de Madame Royal pour faire écho à la présence de Madame Dati, porte-parole de Nicolas Sarkozy) ? Je ne crois plus être considérée comme un alibi pour reprendre votre expression. Je fais partie du paysage politique lyonnais désormais comme beaucoup de mes camarades. J'ai fait fortement progresser la gauche aux dernières élections législatives face à un poids lourd de la politique dans une des circonscriptions les plus à droite de France (Najat Vallaud- Belkacem avait remporté 43,43% des voix, réalisant ainsi le meilleur résultat pour un candidat de gauche, lors de ce combat pour la quatrième circonscription de Lyon, dans un duel contre l'ex-ministre de la Justice puis des Transports Dominique Perben, ndlr). Je suis impliquée dans la rénovation du Parti socialiste à travers les forums du changement et je suis surtout élue au Conseil régional Rhône Alpes où je suis en charge de la culture. Je suis élue, c'est important de le dire, ce qui n'est toujours pas le cas de Madame Dati qui n'a encore jamais affronté le suffrage universel. Pour moi, il n'y a pas plus légitimant que l'élection. Pour ce qui est de mes chances de gagner, je dirais que cela est très possible même si rien n'est acquis et qu'il reste encore plusieurs semaines pour convaincre. Quelles attaches avez-vous avec le Maroc? Y retournez-vous souvent ? J'ai conservé des attaches familiales à Beni Chiker, (sa ville natale ndlr), et Nador, où j'ai eu assez peu l'occasion de me rendre ces dernières années, mon emploi du temps devenant de plus en plus fou ! Enfin, à l'heure où l'on parle d'identité nationale, votre candidature signifie-t-elle que vous vous sentez complètement Française ? L'engagement politique est un acte citoyen fort, c'est la marque de son attachement à la communauté nationale et d'une envie d'en assumer une partie du destin. Moi je ne parle pas d'identité nationale et je ne me pose pas la question de savoir si je me sens ou non complètement Française. C'est un état de fait, je suis Française et j'en suis pleinement heureuse.