Dans quelques semaines, la composition des membres de la future instance centrale de lutte contre la corruption sera connue. Cette nouvelle instance a été instaurée par le décret du 13 mars 2007 paru au Bulletin Officiel le 2 avril 2007. Elle est sous la tutelle du Premier ministre qui demeure le président effectif de l'instance, puisqu'il nomme directement son président. Selon une source proche du dossier la composition de la nouvelle instance sera connue dans quelques jours. Des noms de personnalités du monde associatif et de la société civile circulent. Le nom du Secrétaire général du Syndicat national de la presse (SNPM), Younés Moujahid est cité, l'avocat Khalid Khales membre du Bureau de l'instance nationale de protection des biens publics au Maroc a été cité aussi, en plus d'un représentant de Transparaency Maroc et de la CGEM. Mais rien n'a été dévoilé pour l'instant sur le nom du candidat au poste de président de l'Instance. Interrogé sur cette question, un proche collaborateur du Premier ministre Abbas El Fassi nous a confié que les Associations de lutte contre la corruption et les organisations professionnelles seront bien représentées dans cette instance. La nouvelle instance va représenter le Maroc à la réunion des Etats signataires de la convention des Nations Unis contre la corruption, cette réunion aura lieu le mois de janvier prochain. Selon le décret qui constitue cette nouvelle instance, elle joue le rôle de coordination de la politique de lutte contre la corruption, la supervision et la collecte d'informations dans ce domaine. L'instance est chargée entre autres de proposer au gouvernement les grandes lignes de la politique de lutte contre la corruption, surtout en ce qui concerne la coopération entre les secteurs public et privé. L'instance joue le rôle d'outil de sensibilisation du public et participe à l'organisation des campagnes d'informations et la coopération internationale en matière de lutte contre ce fléau. L'instance centrale se compose d'une Assemblée générale, d'un Comité exécutif et d'un Secrétariat général présidé par une personnalité connue pour son intégrité nommée par le Premier ministre pour un mandat de 6 ans non renouvelable. L'assemblée générale comprend en plus du président de Diwan Al Madalim, un représentant de chaque département ministériel : l'Intérieur, les Affaires étrangères, les affaires Islamiques, la Justice, les Finances, l'Agriculture, la Défense. L'assemblée comprend aussi la CGEM, les Syndicats, les Associations professionnelles et le SNPM … L'instance comprend 13 membres nommés par le Premier ministre : 6 de la société civile, 3 des associations de lutte contre la corruption, 4 des enseignants chercheurs. Ils occupent un mandat de quatre ans renouvelable une seule fois. L'assemblée se réunit deux fois par an au minimum. L'instance présente chaque année un rapport au Premier ministre sur la situation de la corruption dans le pays. Les observations de Transparency Maroc En avril 2005, le gouvernement avait annoncé un plan d'action pour combattre ce fléau. Parmi les mesures annoncées, la création d'une instance de suivi et de prévention de la corruption, ainsi que la mise à la disposition du public des moyens pour formuler les doléances ou dénoncer des actes de corruption (numéro de téléphone, fax, e-mail). Transparency Maroc a accueilli favorablement cette nouvelle annonce de politique gouvernementale à l'époque et avait signalé en particulier l'engagement du Maroc à ratifier la convention des Nations Unies. La création de l'instance de lutte contre la corruption a fait l'objet de plusieurs réunions de travail entre TM et le Premier ministre de l'époque Driss Jettou. Pour Transparency Maroc, ce n'est pas tant la forme juridique de cette instance qui importe mais l'indépendance réelle qui lui sera reconnue ainsi que les moyens qui lui seront fournis pour exercer son mandat. Dans l'approche gouvernementale, il s'agit d'un organe consultatif, placé auprès du Premier ministre et constitué de représentants des administrations, des opérateurs économiques et de la société civile. Son mandat principal consiste à effectuer le suivi de la politique gouvernementale et à mener les actions de sensibilisation et de formation. Pour Transparency Maroc, cette instance constitue l'organe-clef de participation citoyenne à la lutte contre la corruption, tel qu'il est prévu par la convention des Nations Unies. Quand bien même les attributions à caractère judiciaire resteraient hors de ses attributions, elles devraient accéder à des prérogatives d'investigation pour mener à bien la mission de suivi des actions de prévention, de contrôle et de poursuite. Ses organes de direction constituent la pierre angulaire de son indépendance. A ce titre, ils doivent bénéficier à la fois de garanties d'inamovibilité et de la confiance continue des membres de l'Instance. De leur côté, ceux-ci doivent être choisis à titre personnel, en raison essentiellement de leurs compétence et intégrité. Leur nomination ou proposition par les différentes administrations et parties concernées, devrait avoir pour finalité d'assurer la représentation la plus large possible des forces sociales et des secteurs d'activités et non pas de pouvoirs. Quant aux moyens matériels et humains, ils devraient permettre à l'instance de coopérer avec les différentes administrations de l'Etat, des organes de contrôle et justice mais aussi de recourir à l'expertise privée et de mener des activités de haut niveau en matière d'information, de formation, de communication et d'évaluation. Mohamed Tarek Sbaï* «La loi sur la déclaration du patrimoine doit être revue» «L'instance centrale de lutte contre la corruption est une institution que la Convention des Nations Unies contre la corruption demande aux pays signataires de mettre en place. Le décret qui instaure cette institution fait de cette Instance un outil d'observation et de rédaction de rapports. Ce que nous attendons de cette nouvelle instance c'est qu'elle joue un rôle dans la présentation immédiate des affaires de corruption devant la justice, seule habilitée à trancher dans les affaires de corruption. Les membres de l'instance ne bénéficient pas d'immunité et n'ont pas les outils d'observations. De plus, la loi sur la déclaration du patrimoine doit être revue pour inclure les épouses, les enfants et la protection des personnes qui dénoncent les crimes de la corruption et le détournement de l'argent public. Si ces points ne sont pas pris en considération, cette nouvelle instance sera handicapée dans son action».