Selon un groupe de députés, l'ONE va très mal. Ce n'est pas ce que laissait entendre la communication de l'Office, il a quelques semaines. Le Parlement ne s'est pas installé depuis deux mois, que le groupe parlementaire USFP propose une commission d'enquête sur l'ONE. Cette procédure a rarement été mise en place au Maroc, et reste liée aux scandales de la CNSS et du CIH. Dans le cas de l'ONE, les députés USFP argumentent en présentant des chiffres de pertes cumulées à 1,7 milliard de DH et selon eux en augmentation constante. Le management de l'ONE explique cette perte, entre autres, par un redressement fiscal. Notons qu'il est étonnant qu'une entité publique fasse l'objet d'un tel redressement. Pourtant, cette information officielle, puisque la demande a été déposée au Parlement, ne manque pas d'étonner les observateurs. Il y a à peine quelques semaines l'ensemble de la presse, spécialisée ou pas, s'est faite l'écho des bons résultats de… l'ONE. En effet, la surchauffe économique, a bien naturellement induit une explosion de la demande. Celle-ci connaît une croissance de près de 8 % depuis quelques années. C'est un mauvais signe pour l'environnement, mais un excellent indicateur du dynamisme économique. Sur le plan chiffres, l'ONE annonçait un résultat d'exploitation bénéficiaire de près d'1 milliard de DH, à la fin du premier semestre. Sauf frais financiers exorbitants ou événement exceptionnel, la conjoncture restant la même, d'où viennent les hypothétiques pertes ? Le devoir de vigilance L'ONE est vitale pour la marche du pays. Au début des années 90, sa mauvaise gestion a coûté des milliards de DH aux entreprises victimes des délestages. Il a fallu appeler Driss Benhima, débauché du privé, et Fassi Fihri pour la remettre sur les rails. Aujourd'hui, selon les informations disponibles, la demande soutenue est satisfaite sans problème et la réserve est en cours de reconstitution. Les libéraux les plus fous réclament une libéralisation sans oser parler de privatisation. Seulement l'histoire nous a montré que quand on parle de libéralisation et qu'on laisse plomber le monopole, c'est le signe d'un prochain virage. En attendant donc la vérité comptable, il est urgent de rester vigilant. Au Maroc, on endort l'opinion rapidement. Ainsi «La Gazette du Maroc» avait annoncé la déconfiture de la BNDE des années auparavant. Dellero, actuellement inculpé mais en liberté provisoire, nous avait menacés de procès et loué «sa Maison». L'Etat a dû la disloquer et la perte est de près de 10 milliards de DH. De même que nous avions annoncé des retraites en péril en 1998 et reçu un tir groupé des opérateurs. Le système est en faillite et c'est l'Etat, l'argent du contribuable qui s'y colle depuis 4 ans. À chaque fois la vigilance a été endormie par un simple communiqué de dirigeants qui finissent salis. Dans ce contexte et dans le cadre de ses compétences de contrôle que le Parlement commence à s'intéresser aux entreprises publiques avant de signer l'acte de décès est une excellente nouvelle. Il faut donc saluer l'initiative. Si l'ONE est réellement en difficulté, il faut trouver le remède avant l'imminence de l'ouverture et la pression de nos partenaires étrangers. Sinon, il n'y a aucune atteinte pour un manager à se faire contrôler par son propriétaire, le Parlement étant le représentant de la nation, in fine patron de Maâmar, DG de l'ONE. La dernière constatation concerne l'information. Il s'agit du monopole de l'Etat dans la fourniture d'électricité. Pas un seul responsable, pas un seul média-public, n'a daigné répondre aux angoisses du public. Entre le CIH, la CNSS, le crédit agricole et la BNDE, ce sont des dizaines de milliards de Dh qui se sont envolés avec la bénédiction des conseils d'Administration bernés par de faux bilans. Cette vérité-là, établie, prouvée, peut à elle seule alimenter tous les populismes. Alors oui à la vigilance parlementaire sans préjuger des résultats de l'enquête. Sans non plus écorner l'image d'un Office essentiel pour le pays.