La presse en avait fait écho durant cet été. Plusieurs automobilistes se sont énergiquement plaints de la mauvaise qualité du carburant de certaines stations de service de Casablanca. Des dégâts considérables ont été provoqués aux usagers, des plaintes ont été déposées, et une enquête judiciaire a été ouverte pour démêler l'écheveau d'une grosse affaire de manipulation et de substitution des scellés ainsi que le frelatage des produits pétroliers. Deux mois seulement ont suffi aux enquêteurs pour tirer toute cette affaire au clair. En effet, la gendarmerie royale de Casablanca accompagnée des éléments de la BNPJ ont réussi a démantelé un réseau de 11 malfaiteurs, dont la tête pensante les propriétaires d'une société de transport de carburant basée dans la ville de Mohamedia ou ils disposent d'un dépôt ou se traficote le détournement. Les perquisitions sur les lieux ont permis la saisie d'une quantité importante de carburant frelaté ( 174 tonnes et 260 litres de gasoil, 10 tonnes et 860 litres de super et 36 tonnes et 200 litres de jet ). Devant le fait accompli, les principaux mis en cause, une famille propriétaire entre autres d'une station d'essence à l'entrée de Bouznika, ont tout avoué aux enquêteurs qui n'ont pas trop de mal à résoudre cette affaire qui remet sous les feux de l'actualité le trafic de carburant entre l'Algérie et le Maroc. Officiellement fermée depuis 11 ans, la frontière algéro-marocaine n'en est pas moins grand ouverte aux activités de contrebande de tous genres. Le plus important de ces trafics, celui des carburants, n'en finit pas de battre tous les records. La contrebande fonctionne surtout dans le sens Algérie-Maroc. Les produits sont revendus dans la province de Oujda, la ville marocaine la plus proche de la frontière algérienne. C'est d'ailleurs dans le nord de la wilaya de Tlemcen que la densité des stations d'essence en milieu rural est la plus forte en Algérie. À Bab El Assa (littéralement, la porte du guet), à mi-chemin entre Maghnia et la mer, les gendarmes, du côté de l'Algérie, font mine de ne pas voir les centaines de personnes qui traversent au quotidien une frontière pourtant officiellement fermée. À la tombée de la nuit, dans les banlieues de Maghnia, il y a un nombre incalculable de voitures au double réservoir qui font la queue pour s'approvisionner en carburant. A Maghnia, située à 20 km de la frontière marocaine, les trafiquants algériens s'approvisionnent d'une façon formelle de leurs stations-services. Une fois à la frontière, ils remettent la marchandise à leurs collègues marocains. Le carburant est par la suite vendu aux grossistes qui, souvent, le mélangent avec de l'huile de moteur, ce qui en amoindrit la qualité. Hautement politique, le dossier de la contrebande entre les deux pays est tributaire de l'évolution des relations entre les deux frères ennemis. La frontière terrestre entre l'Algérie et le Maroc avait été fermée au lendemain de l'attentat islamiste, qui a coûté la vie, en août 1994, à deux touristes espagnols dans un hôtel de Marrakech. Le Maroc, qui avait accusé les services secrets algériens d'être à l'origine de cette attaque menée par des Franco-Algériens, a décidé d'instaurer un visa d'entrée pour les ressortissants algériens. Alger a tout de suite réagi en fermant la frontière terrestre entre les deux pays. Et pourtant, ses pouvoirs publics ferment l'oeil sur un trafic juteux qui nuit gravement à notre économie.