Parfois marchands ambulants, d'autres chômeurs. Inoffensifs, méditant passivement leur entourage, ils vivaient sur le trottoir à Derb El Kabir. Connus par les habitants du quartier, Mohamed et Omar ressemblaient à des clochards dont certains passants avaient pitié. Pourtant, ils avaient toujours leur litron de vin…Pas pendant le Ramadan. Mohamed, un jeune chétif, natif de 1975, avait l'habitude de vendre presque tout et n'importe quoi. Une paire de lunettes ou un paquet de mouchoirs en papier, un coupe-ongles ou un jouet de médiocre fabrication. Son ami Omar, un an plus jeune que lui, faisait la même chose. Ils se retrouvaient, après leurs ballades dans les rues sales de cette préfecture bannie, au coin de la rue où ils avaient pris l'habitude de scruter les passants et de susciter leur générosité. Lorsqu'ils ramassaient de quoi pouvoir aller à Acima, ils s'achetaient un ou deux litres de vin rouge, ils se roulaient un joint, parfois plus, et voyaient la vie en rose. Ainsi était la vie quotidienne de ces jeunes garçons qui ressemblent à des milliers d'autres. Un jour, le vin a mal tourné dans leur tête et ils se chamaillèrent. Il y eut échanges d'insultes et d'injures, il y eut querelle aussi. Ils se séparèrent alors sur ce ton malveillant. Mohamed, touché dans son amour propre par quelques-unes des insultes, parce qu'il a été traité d'homosexuel, s'en alla chercher un couteau. Et comme un taureau, il se lança sur Omar et enfonça le couteau au plus profond du ventre de son ami. Voyant le sang gicler, il prit la fuite et trouva refuge dans les terrains vagues des quartiers voisins. Omar succomba à ses blessures. Mort s'ensuivit. Le cadavre a été retrouvé dans la rue. Les habitants du quartier ont parlé, témoigné et ont fait leur conclusion. C'était son copain et personne d'autre. Les signalements fournis à la police ont permis aux enquêteurs de repérer le coupable. Trois jours suffirent pour que Mohamed soit écroué et présenté au Parquet général de Casablanca pour coups et blessures ayant entraîné la mort. MEURTRE AVEC PREMEDITATION Aveux frappants Lundi 17 septembre, la brigade locale de la police judiciaire de Hay Mohammadi-Ain Sebâa, a reçu une visite de tonnerre. Un homme, la soixantaine, demande qui l'écouterait parmi les policiers qu'il rencontre. On finit par lui tendre l'oreille, lorsqu'il déclare avoir commis un meurtre sur son compagnon. Un jeune homme de trente ans, venu lui demander un jour secours. Un aveu frappant. Le sexagénaire ajoute, dans sa confession aux enquêteurs, qu'une relation sexuelle s'était instaurée entre eux depuis le premier jour, cinq ans durant. Les policiers, accompagnés d'une brigade des sapeurs pompiers, se sont rendus sur le boulevard Chefchaouni à Ain Sebâa où ils ont découvert un cadavre enterré dans le jardin d'une villa. L'état de la décomposition avancée était dépassé. Une enquête a été ouverte et elle aboutira probablement au crime passionnel. MAROCAINS… SI VOUS SAVIEZ ! L'âme sœur Deux homosexuels se rencontrent dans des conditions où des rapports de force ont pesé. Normaux ou détraqués sexuels, ils arrivent à faire aboutir la rencontre et la transformer en liaison durable. Cette rencontre, basée sur l'opportunisme de part et d'autre, a abouti à une relation amoureuse qui a duré cinq longues années. Le protecteur était alors âgé de 55 ans et l'invité éternel n'en avait que 25. Le plus clair dans la relation qui les liait est le rapport sexuel; pitié du vieux aidant. N'empêche que ces liens tissés, dorlotés par la chaleur de l'affection, conduisaient de temps à autre à des tiraillements qui ont failli faire éclater le couple à maintes reprises. La vie en couple ne manquait pas de maquignonnage, parce que contre-nature. Car il faut bien noter que nous sommes au Maroc, précisément à Casablanca, dans une villa du quartier Ain Sebâa. Après cinq ans de vie partagée, le vieux décide de tuer son partenaire. Il passe vite à l'action et l'enterre dans le jardin de la villa où il habite et où il a partagé cinq années avec son chéri. Passent les jours et les semaines. Subitement, le vieillard se réveille de sa torpeur, deux mois après, c'était lundi 17 septembre courant, pour se rendre dans les locaux de la police judiciaire de Hay Mohammadi-Ain Sebâa raconter son forfait. Il crache tout aux policiers, raconte la rencontre et l'état presque misérable dans lequel était son compagnon, la relation qui a duré cinq ans, les rapports sexuels qu'ils entretenaient, la jalousie qui l'envahissait, le mode opératoire de l'exécution, l'enterrement et la culpabilisation qui ne le quitta nullement depuis qu'il a commis le meurtre. Pourtant, le crime allait être parfait. Le fait de se rendre à la police, qui ne doutait point de la chose ni même de l'existence de deux homosexuels dans son secteur, vu qu'il n'y a pas eu non plus avis de recherche, symbolise une profonde sensibilité chez un individu pourtant tueur. Les annales de la justice marocaine ou étrangère ne débordent pas de faits du genre. C'est qu'il y a donc exception. Je me demande ce qui arriverait, si elle était généralisable. Au moins chez nous ! Façon de rencontrer l'âme sœur de beaucoup de coupables.