Maroc Qui a poussé la prestigieuse compagnie d'Atlanta à vendre au groupe espagnol Cobega ses deux sociétés marocaines de mise en bouteille qu'elle avait rachetées en 1999 ? A-t-elle renoncé à son projet universel “un seul pays, un seul embouteilleur”? À ces deux questions, les réponses des différentes parties concernées ne sont pas précises. Néanmoins, une chose est sûre : le groupe espagnol Cobega fait une entrée remarquée sur le marché marocain en rachetant d'un seul coup la SBGN et la SGBS (sociétés des boissons gazeuses du Nord et du Sud) . La multinationale “The Coca-Cola Export Company” aurait-elle renoncé à sa politique “un pays, un seul embouteilleur” ? Jusque-là le limonadier d'Atlanta comptait au Maroc sept entreprises de mise en bouteille mises en place respectivement à Tanger, Casablanca, Fès, Oujda, Marrakech, Agadir et Salé. Ce décor a conduit à la mise sur pied de différents embouteilleurs de Coca-Cola, notamment la société centrale des boissons gazeuses (SCBG) pour Casablanca et Salé, l'Atlas Bottling Company pour Tanger et Oujda, la Compagnie des boissons gazeuses du Sud pour la ville de Marrakech (CBGS), la Compagnie des boissons gazeuses du Nord pour la ville de Fès (CBGN), ainsi que la société des boissons gazeuses du Souss (SBGS) pour Agadir. Si les unités de production de la ville de Marrakech et Fès sont directement dirigées par The Coca-Cola Company, toutes ces usines de production sont devenues des franchises de Coca-Cola même si chacune d'elle dispose d'un territoire délimité dans lequel elle distribue les produits Coca-Cola. Mais depuis la semaine dernière, le groupe espagnol Cobega basé à Barcelone a racheté deux de ces sociétés, notamment les sociétés des boissons gazeuses du Nord (SBGN) et du Sud (SGBS). Cette transaction qui se chiffre à près de 85 millions de dollars, est conclue au siège même de la compagnie Coca-Cola, à Atlanta. Contactée par nos soins, la représentation marocaine de la compagnie n'est pas pour l'instant au courant d'une telle opération, affirme un responsable de la société. Quoi qu'il en soit, on indique du côté de la maison mère que les deux sociétés de mise en bouteille cédées continueront de distribuer les produits de la marque dans leur région respective. Toujours est-il que la multinationale conservera toujours un droit de regard sur l'activité de ces nouvelles acquisitions de Cobega. En effet, la société Equatorial Coca-Cola Bottling Compagny qui gère les activités commerciales du groupe espagnol en Afrique appartient à hauteur de 70 % à ce dernier, le reliquat étant détenu par la multinationale américaine. Avec ces deux nouvelles acquisitions, le groupe Cobega, appartenant à la famille espagnole Daurella, renforce encore son rang sur le continent africain où il est présent déjà dans presque une dizaine de pays. Tout compte fait pour la compagnie Coca-Cola, ces deux sociétés de mise en bouteilles cédées représentent un peu plus du quart de son activité commerciale dans le royaume. À elles seules, elles disposent d'une dizaine de centres de distribution et emploient 745 permanents. La cession par Coca-Cola de ses deux sociétés de mise en bouteille qui appartenaient dans le temps au groupe Benabdellah marque une rupture consommée dans sa stratégie initiale qui consistait à mettre en place un seul et unique embouteilleur, comme cela existe dans certains pays où la marque Coca-Cola est fortement présente. L'on se rappelle de ses tractations avec le groupe SNI, aujourd'hui filiale de l'ONA, pour le regroupement de leurs usines dans l'activité des boissons gazeuses. Un accord de principe avait été conclu. Mais quelque temps plus tard, les négociations ont été interrompues. Pour rappel, cet accord qui n'a pas abouti consistait pour les deux parties à créer une société à part entière, juridiquement et financièrement indépendante, dans laquelle elles allaient abriter toutes leurs activités des boissons gazeuses. Finalement, la Société centrale des boissons gazeuses (SCBG) a vu le jour sans la participation de Coca-Cola dans son capital. Seul le groupe Brasseries du Maroc en devient propriétaire et unique actionnaire. Pourquoi Coca-Cola ne s'est pas associée au groupe ONA pour le regroupement de leurs activités ? Nul ne le sait d'une manière précise. Néanmoins, certains observateurs avertis avancent que la compagnie d'Atlanta n'est pas satisfaite des conditions de l'accord. D'autres, plus informés, attribuent cet échec au fait que Coca-Cola n'a pas réussi à réunir toutes les sociétés de mise en bouteille pour mieux faire aboutir sa stratégie “d'un seul pays, un seul embouteilleur”. Le groupe Belhassan qui détient la Société des boissons gazeuses du Souss a été approché à plusieurs reprises pour une éventuelle cession de sa société. De même pour la famille qui détient Atlas Bottling company qui embouteille à Tanger et à Oujda. Le manque de ces trois opérateurs empêche la compagnie américaine de réaliser son rêve marocain. Suite à quoi, elle s'est vue probablement obligée de céder les deux sociétés qu'elle avait rachetées en 1999 à un prix jugé très fort.