À l'occasion de la célébration de 15 ans de la reconnaissance internationale, et notamment celle par le Maroc de la république de Croatie, Darko Bekic, le nouvel ambassadeur croate à Rabat, nous a livré une interview sur la nouvelle stratégie de son pays pour développer les relations bilatérales. L.G.M : Que pouvez-vous nous dire sur la Croatie à l'heure actuelle ? Darko Bekic : Vous savez, la Croatie a célébré 15 ans de sa reconnaissance internationale, c'était le 15 janvier 1992, quand l'Union Européenne a appelé la communauté internationale à reconnaître la Croatie comme Etat indépendant. En 1995, après le rétablissement de la paix et la reconstitution de l'intégrité territoriale, un développement a commencé dans divers domaines, afin de remettre le pays en marche après les destructions et les centaines de milliers de morts. Nous avons eu aussi plus d'un million de réfugiés musulmans et croates. Nous sommes passés d'une économie socialiste à une économie de marché, transition qui fut achevée avec beaucoup de sacrifices. Néanmoins, on a progressé sur divers secteurs, comme l'agriculture, l'industrie, le transport, les infrastructures, et surtout le tourisme qui est, en fait, une branche motrice de l'économie nationale. Quelle est votre lecture quant aux relations croato-marocaines ? Votre pays est l'un des premiers Etats à avoir reconnu la Croatie en 1992, et nous vous en serons toujours reconnaissants. Déjà, en 1996, à la fin de la guerre, nous avons couronné nos relations bilatérales par l'installation d'une représentation diplomatique à Rabat. Ces 10 dernières années nous ont permis d'établir de bonnes relations économiques et politiques avec le Maroc. Nous n'avons pas beaucoup d'échanges commerciaux, mais nous essayons de faire de notre mieux. Il ne faut pas oublier qu'à cause de la guerre, nous avons l'immense tâche de construire des relations amicales, d'abord avec les pays de la région, Bosnie, Serbie, Macédoine. Maintenant, étant aussi un pays orienté vers la Méditerranée, la Croatie est intéressée par la coopération méditerranéenne. Où en sont les échanges commerciaux entre le Maroc et la Croatie ? La Croatie importe du Maroc surtout du phosphate et des agrumes. Elle exporte, à son tour, des équipements de télécommunication, principalement le matériel nécessaire à l'édification de stations de relais pour la SNRT. Cela fait plus de dix ans, qu'une société croate a des techniciens présents au Maroc, pour monter les relais de la télévision. Nous exportons aussi du bois pour les parquets. Pour l'instant, la société précitée est la seule active au Maroc. Néanmoins, nous espérons participer au grand projet du Bouregreg à Rabat ainsi qu'à Casablanca, car la Croatie est l'un des six pays au monde à produire des tramways. Nous avons déjà pris part à l'appel d'offres et si tout se passe comme nous le souhaitons, nous allons doter les villes de Rabat et Casablanca de tramways croates, pour des lignes respectives de 25 et 75 kilomètres. Y a-t-il à ce jour un intérêt particulier de la part des hommes d'affaires marocains envers le marché croate et ses opportunités ? En effet, l'intérêt est grand. Par exemple, nous avons été contactés par un très grand exportateur d'agrumes, originaire de Casablanca, et propriétaire de la société «Maroc Fruit», qui doit également faire partie de cette délégation pour visiter l'un de nos plus grands ports. Cet exportateur doit y installer ses locaux de distribution et de traitement (emballage) d'agrumes du Maroc vers l'Autriche, la Hongrie, la Finlande, la Bulgarie, la Serbie, la Bosnie, et d'autres pays encore des Balkans et d'Europe centrale. Pensez-vous établir un accord de libre échange avec le Maroc ? Pour l'instant, nous avons deux priorités. Lors de la prochaine visite du Ministre du Commerce extérieur, Mustapha Mechahouri en Croatie, nous allons signer deux accords, l'un sur la non double imposition, et l'autre est relative à la coopération dans le domaine de la pêche. En effet, nous envisageons de bénéficier de la richesse des côtes marocaines en sardines pour nourrir nos élevages de thon que nous exportons ensuite vers le Japon. Qu'elle est votre vision pour une meilleure coopération bilatérale ? Si la candidature marocaine est acceptée, nous espérons participer aux travaux de développement des infrastructures d'Expo 2012 à Tanger, spécialement dans le domaine de l'expertise et de la construction des canalisations d'eau potable et autres. Y a-t-il d'autres visites prévues entre les délégations des deux pays ? Rien de prévu. Nous attendons de voir se développer nos relations, par la création d'une ambassade du Maroc à Zagreb, par exemple, pour pouvoir aller de l'avant et inviter Sa Majesté le Roi Mohammed VI à visiter la Croatie. Le Maroc prépare une autonomie élargie des régions sahariennes, que pensez vous de cette initiative ? Nous attendons de voir ces propositions dans leur totalité, on ne connaît pas encore tous les détails. Mais ce qui a été publié dans la presse paraît important. Nous avons eu une expérience similaire en Croatie. La nation doit résoudre ce problème pour pouvoir se concentrer sur les problèmes de fond, relatifs au développement (énergie, eau potable, chômage, éducation, etc).