Au commencement, était la fetwa de Qaradaoui. Socialistes et Péjidistes déterrent la hache de guerre. Une constance, désormais ancrée dans la vie nationale ? Une chose est sûre : l'appel de l'USFP pour un pacte national, donc patriotique, contre le terrorisme et le totalitarisme est vu d'un mauvais œil de la part du PJD. Un nouvel épisode de confrontation entre les deux partis vient de commencer Les partis socialiste et islamiste viennent de déterrer la hache de guerre. Il n'est pas un jour, en effet sans que les deux partis ne se livrent une confrontation sans merci où tout y passe. Le feu, on s'en doute couvait, il a fallu une fetwa, incendiaire celle là, pour que les deux parties sonnent la valerie. Tout a commencé une semaine ou presque avant le mois de Ramadan. Figure emblématique de l'internationale islamiste «les frères musulmans», Qaradaoui a annoncé un décret inhérent au crédit bancaire. Il y est question d'emprunt et de taux, interdits par certaines fatwas. Le décret aurait été anodin, et donc limité aux initiés si le prêcheur attitré d'Al Jazeera Channel n'avait pas fait un parallélisme jugé offusquant (voir LG de la semaine dernière) voire dévalorisant de l'autonomie religieuse à la marocaine. Ulémas La première riposte est venue de la presse, surtout celle proche de l'Usfp. l'œcuménique finit en politique et c'est surtout le côté dévalorisant qui est pointé du doigt. S'ensuit une première réaction scientifique et jurisprudenciellement argumentée sous la plume d'Ahmed Khamlichi, un expert en la matière et non moins directeur de Dar Al hadith Alhassania. Il fustige chez le fakih cathodique un certain dédain. Entre autres, il dénonce «le préjudice» porté par Qaradaoui au Maroc et aux Marocains. Attajdid, organe officiellement du MUR et officieusement proche du PJD sort la grande artillerie et attaque. On reprend les mêmes griefs et on recommence : les auteurs se succèdent et les récriminations se ressemblent. «Eradicationisme», tentative de manipulation et on en passe. Autant de reproches qui dénotent d'un état de malaise. En pleine crise et volée de bois vert, on sollicite l'avis du Conseil supérieur des Ulémas, présidé par le Roi, Amir Almouminin. Qu'à cela ne tienne : le comité scientifique de l'Iftae donne raison au directeur de Dar Alhadith Alhassania, et donc crédibilise Alittihad Alichtiraki, sinon réconforte les socialistes dans leurs visions. Intolérable. Comme un lapin pris dans les feux d'un phare, Attajdid commet un article où il remet la compétence des Ulémas en question. Implicitement, s'entend. L'auteur, un chroniqueur toujours prompt à défendre les siens, n'y va pas de main morte : «on attend toujours votre fatwa, messieurs les Ulémas» titre-t-il. Rien qu'au titre, on sent l'ironie. Attajdid part-il en guerre ? Loin s'en faut. L'organe fait profil bas et rectifie le tir, le jour d'après. Cette fois, il s'en prend à l'USFP et sa presse. Conseil Bien dans ses bottes, le premier secrétaire du parti socialiste riposte. Lors du conseil national de son parti, tenu le dernier samedi de septembre, Mohammed Elyazghi tire à boulets rouges sur « ceux qui ont préféré l'obédience machrékiste au patriotisme marocain ». Plus : « la patrie est au-dessus de tous, et jamais ne passeront ceux qui renient leur patriotisme ». Enfonçant un peu le clou davantage, il remonte à l'époque d'après 16 mai et, remake, la «responsabilité morale est mise en exergue». De quoi s'agit-il en fait ? Pour nombre d'hommes politiques et décideurs, l'hydre terroriste ne serait jamais passé à l'acte s'il ne bénéficiait pas d'un soutien «moral» de certains islamistes branchés. Chioukhs et théoriciens de la salafia jihadia, argumentent-ils, ont toujours trouvé dans la presse «modérée» des islamistes BCBG des tribunes sinon complices du moins indulgentes. Côté activisme, on reprochait à l'islamisme légaliste de prêter le flanc à l'extrémisme en mettant l'accent sur le dévergondage et l'immoralisme de la société. De là à terroriser les «déviés» il n'y a qu'un pas, que les endoctrinés d'Al Qaida franchissent aisément. Furieux, les islamistes du PJD vont en guerre contre la tendance «eradicationniste», au sein de l'Etat et au sein des partis : une manière de déstabiliser l'ennemi, mais qui demeure un peu vétuste. Du déjà vu, quoi ! N'empêche .. la guerre est bien « là ». Pour l'heure, un contrat patriotique renouvelé passe, pour les socialistes par «un pacte national contre le terrorisme et le totalitarisme». En clair ? Définir les valeurs qui, au-delà de toutes différences idéologiques, régissent les agissements des uns et des autres. Et surtout «faire ressortir le patriotisme marocain face à la déferlante intégriste, surtout maximaliste», croit savoir un membre du Conseil national socialiste.