Est-ce que l'économie post-keynésienne peut constituer une alternative à la macroéconomie néoclassique ? Telle est la question à laquelle l'ouvrage collectif « L'économie post-keynésienne. Histoire, théories et politiques » écrit par plusieurs économistes, dont la vision diffère de la situation néolibérale du capitalisme. La pensée économique évolue en fonction du climat des affaires, ainsi que de la vision que l'on cherche à instaurer afin de disposer d'une économie « stable ». Une stabilité dont les caractéristiques ne sont pas forcément les mêmes, du fait que les marchés obéissent à des règles dont l'objectif est de « maximiser » le profit tout en réduisant les pertes, mais surtout, en établissant un espace de compétitivité « efficace ». L'ouvrage « L'économie post-keynésienne. Histoire, théories et politiques » a ainsi été présenté par Jean-François Ponsot, l'un des trois économistes à son origine, en compagnie de Nourredine El Aoufi, président de l'Association marocaine de Sciences économiques (AMSE) et de Saïd Hanchane, Professeur d'économie, directeur du Master d'études économiques internationales à l'Ecole de gouvernance et d'économie (EGE) de Rabat. Le résumé de l'ouvrage a été discuté dans le cadre d'une conférence organisée, conjointement par l'Institut CDG et l'AMSE, sous le thème « Crises économiques et financières : une nouvelle grille de lecture est-elle possible ? », dans la journée du 8 avril à Rabat. Ce travail approfondi s'adresse avant tout aux étudiants en économie, des doctorants et chercheurs, mais aussi aux preneurs de décisions soucieux de comprendre les fondements, résultats et prescriptions d'un courant d'analyse économique alternative à la pensée commune dans ce sens. Ainsi, l'ouvrage met en avant les contributions les plus célèbres du courant de cette pensée économique, notamment de son fondateur, John Maynard Kenyes, ainsi que de ses adeptes les plus notables, à savoir Nicholas Kaldor, Joan Robinson, Michal Kalecki, Hyman Minsky, etc. Il faut savoir que la pensée post-keynésienne est fortement ancrée de nos jours dans certaines économies européennes, notamment en France, en Angleterre ainsi qu'aux Etats-Unis, qui ont adopté une politique protectrice de leur économie, mais surtout en tant que courant qui s'imposent comme étant contradictoires à la pensée néolibérale. Le mouvement se différencie dans la mesure où il est basé sur une approche qui « refuse » de mettre en place des anticipations économiques en se basant sur des hypothèses. La pensée met en avant des solutions concrètes et rationnelles, basées sur des faits réels. À cette occasion, Hespress FR s'est entretenu avec Jean-François Ponsot, qui a co-écrit l'ouvrage avec Eric Berr, Virgine Monvoisin, afin qu'il partage avec nous sa vision des choses. Hespress FR : Que pouvez-vous nous dire à propos de cet ouvrage collectif ? Jean-François Ponsot : Cet ouvrage comporte 23 chapitres. Ça a été un travail assez ardu, avec une double vocation. La première consiste à présenter, pour la première fois en français, les idées de la pensée post-keynésienne. Le deuxième objet est à destination des chercheurs, notamment en essayant d'établir un dialogue entre différents courants, du fait que la pensée économique est pluraliste, en présentant une synthèse pour alimenter le débat. Quelle est votre lecture de la réduction de la dette marocaine ? Le Maroc, à l'instar des autres pays en développement, a une contrainte très forte. Au niveau extérieur, le pays doit s'endetter en devises, contrairement aux grandes puissances monétaires, notamment les USA ou certains pays d'Europe. Ceux-ci peuvent émettre des titres d'emprunts dans leur monnaie à eux. Le fait de s'endetter dans une autre monnaie entraine un risque sur le taux de change. Cela dit, le Maroc s'en sort assez bien, à noter que le royaume privilégie l'euro au détriment du dollar à un taux de 59 % des opérations. Ce fait témoigne d'un rapprochement important avec l'Europe, chose normale compte tenu de la proximité géographique, culturelle et économique dans ce sens. Peut-on s'attendre à ce que le dollar se fasse moindre, voir disparaitre dans le futur ? Le dollar est une monnaie internationale avant tout. L'utilisation d'une monnaie nationale à l'internationale a été pendant longtemps critiquée par Keynes et les économistes post-keynésiens. L'idée d'une monnaie neutre, politiquement et économiquement, a été proposée par Keynes durant la conférence de Bretton Woods en 1944, notamment le système bancor. Malheureusement, on continue de fonctionner avec une monnaie nationale à l'internationale, au lieu de basculer vers une monnaie neutre, ce qui cause des déséquilibres et des rapports de force au niveau géopolitique.