De nouveaux rapports sur les abus liés au « gasoil » ont mobilisé les services centraux du ministère de l'Intérieur. Pendant plusieurs mois, les responsables de la Direction des finances des collectivités locales ont travaillé sur l'élaboration de rapports thématiques portant sur l'utilisation des parcs automobiles des collectivités ainsi que sur les coûts des carburants, huiles et graisses. D'après des sources fiables qui se sont confiées à Hespress, l'examen des lignes budgétaires de plusieurs administrations communales a révélé l'implication de présidents de communes et d'élus dans de graves irrégularités financières et de gestion, certaines étant classées dans la catégorie des crimes financiers. Ces constats devraient conduire à la transmission de plusieurs dossiers à la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ). Selon les informations obtenues par Hespress, les nouveaux rapports ont mis en lumière l'implication de grands élus dans des abus liés aux bons d'approvisionnement en carburant, certains ayant été distribués à des proches ou connaissances, entraînant ainsi un gaspillage massif de budgets publics. Ces irrégularités incluent également l'utilisation des « bons » par des présidents de communes dans un cadre de favoritisme politique et électoral, visant à attirer des soutiens au sein des conseils communaux. L'audit du ministère de l'Intérieur a notamment analysé les données des registres liés au carburant, révélant une utilisation excessive et injustifiée des bons de commande par des présidents, anciens et actuels. Les rapports des commissions centrales ont mis en avant ces abus, en vue de prendre les mesures nécessaires à leur encontre. Les mêmes sources ont signalé une augmentation significative des factures liées au carburant et à l'entretien dans certaines communes, sans qu'aucune activité justifiant ces dépenses ne soit constatée. Par exemple, dans une commune de la région Casablanca-Settat, les dépenses ont atteint des niveaux record, alors même que la commune ne disposait que de quelques véhicules et motos en état de fonctionnement. En outre, l'absence de carnets d'utilisation ou de fiches techniques pour les véhicules a rendu difficile le suivi des opérations de ravitaillement en carburant, de maintenance et de réparations, y compris celles des pièces détachées. Il a également été souligné que certaines administrations communales ont contourné la mise en place de systèmes de contrôle interne pour la gestion et l'utilisation des garages. Cela a permis à des élus d'échapper à toute surveillance externe sur les bons d'approvisionnement en carburant, en violation des dispositions de l'article 9 du décret n°1051.97.2, publié le 2 février 1998, relatif au parc automobile des administrations publiques et des collectivités territoriales. La Cour des comptes, dans son rapport annuel 2023/24, a révélé que les collectivités territoriales et leurs organismes disposaient d'un parc important de véhicules, engins et motos, comptant au total 48.485 unités. Entre 2016 et 2023, ce parc a connu une augmentation de 46 %, passant de 24.545 à 36.000 unités, avec une croissance annuelle moyenne de 6%. Le rapport a également relevé que, contrairement aux départements ministériels, la gestion des parcs automobiles par les collectivités territoriales n'est pas encadrée par un système juridique intégré et complet. Ce manque de cadre légal a pour conséquence l'absence de règles précises concernant la composition du parc et ses modalités d'utilisation. Par ailleurs, il n'existe pas de liste exclusive des personnes autorisées à utiliser les véhicules communaux à titre individuel, ce qui entraîne une gestion ne respectant pas les principes d'économie, d'efficacité et de performance.