Il a vu son action reconnue à l'échelle mondiale. Il a pourtant toujours travaillé en silence, dans la discrétion, bravant les difficultés, les préjugés et les menaces. Denis Mukwege, un gynécologue congolais de 63 ans, qui a consacré sa clinique, voire sa vie à réparer les jeunes filles et jeunes femmes victimes de violence, a vu son action récompensée au plus haut niveau. Il s'est vu décerner, aux côtés justement, d'une victime de ces violences, à savoir la Yézidie Nadia Murad, le Nobel de la paix 2018. En recevant son prix, en début de semaine à Stokholm, Denis Mukwege a fait, en guise de discours, un véritable plaidoyer en faveur de ces « Bébés, filles, jeunes femmes, mères, grands-mères, et aussi les hommes et garçons, violés de façon cruelle, souvent en public et en collectif, en insérant du plastique brûlant ou en introduisant des objets contondants dans leurs parties génitales... ». Un réel cri de cœur lancé par ce père de cinq enfants qui, en dépit des menaces de liquidation, comme ce fut le cas pour son assistant en 2015, a choisi de retourner dans son pays aux moments les plus difficiles pour y fonder sa clinique et y mener son action. Très grave et très solennel, celui qui « répare les femmes » a dénoncé la violence sexuelle comme arme de guerre, dans son pays la RDC, mais aussi ailleurs. « Cela fait vingt ans, jour après jour, qu'à l'hôpital de Panzi, je vois les conséquences déchirantes de la mauvaise gouvernance du pays. Le peuple congolais est humilié, maltraité et massacré depuis plus de deux décennies au vu et au su de la communauté internationale », a-t-il dit. Pour lui, si une guerre doit être faite, c'est plutôt celle « contre l'indifférence qui ronge nos sociétés ». Et pour mettre le monde face à ses responsabilités, pour ne laisser d'excuses à personne, Mukwege a assené: « Aujourd'hui, grâce aux nouvelles technologies de l'information et de la communication, plus personne ne peut dire : je ne savais pas ». Et le prix Nobel d'affirmer que ce ne sont pas seulement les auteurs de violences qui sont responsables de leurs crimes, « mais aussi ceux qui choisissent de détourner le regard ». Il est temps, a-t-il estimé, pour tous de se joindre pour mettre fin à cette souffrance « qui fait honte à notre humanité commune ». C'est un véritable SOS qu'ont lancé des Nobel de la paix 2018. En recevant leur prix Denis Mukwege et Nadia Murad ont appelé à renoncer à l'indifférence et à protéger les victimes de violences sexuelles, souvent reléguées derrière des considérations mercantiles. Watch the very moment Nadia Murad and Denis Mukwege received their #NobelPeacePrize diplomas and medals.#NobelPrize pic.twitter.com/Js9vwuaYBh — The Nobel Prize (@NobelPrize) December 10, 2018