À quelques jours seulement de la fin du mois sacré de Ramadan, les jeûneurs persistent toujours et demeurent prisonniers de leurs envies traduites par l'acquisition de tous les délices, compte tenu de la quantité énorme des produits de consommation offerts sur les étalages, au point que les yeux sont éblouis par leur variété et leur abondance. Face à ces désirs qui augmentent sous l'effet des bonnes odeurs des plats préparés pour l'occasion comme la harira, les gâteaux ou les poissons grillés, le consommateur se trouve enclin à effectuer des achats excessifs qui dépassent souvent ses besoins quotidiens lors de la rupture du jeûne, du dîner ou du Shour. Ce gaspillage, lié à la satisfaction des désirs alimentaires incontrôlés, laisse émerger certaines manifestations ainsi que des comportements nuisibles, en violation flagrante des principes du jeûne qui constitue l'un des cinq piliers de l'Islam. Quoiqu'il soit un mois de générosité et de partage des valeurs qui caractérisent le peuple marocain, le Ramadan ne tolère pas la dilapidation qui n'est acceptée ni par la raison ni par la religion, a indiqué le président de la Fédération nationale des boulangeries et pâtisseries du Maroc (FNBP), Lhoucine Azaz. Pourtant, a ajouté Azaz, le mois sacré s'est transformé en une occasion où chacun se laisse emporter par ses désirs de manger et de déguster différents plats, notant qu'à l'approche de l'Iftar, les files d'attente se forment devant les boulangeries et les fidèles viennent s'approvisionner en produits nécessaires à la rupture du jeûne d'une manière pouvant dépasser leurs besoins de base. Lhoucine Azaz, qui est également vice-président du réseau bio-professionnel des céréales s'est dit triste de voir des tas de pain et dérivés gaspillés à un moment où le Maroc est parfois contraint d'importer plus de 50 pc de ses besoins en blé. Il a, en outre, affirmé que la FNBP ne rate aucune occasion pour appeler à une consommation rationnelle de pain et ses dérivés, rappelant dans ce cadre les pertes que subissent les propriétaires de boulangeries concernant plusieurs matières inclues dans la préparation de plusieurs produits comme les tartes, les différentes variétés de pains et les gâteaux. Le président de la Fédération nationale des boulangeries et pâtisseries du Maroc a également indiqué qu'il est possible d'évaluer l'ampleur et la gravité des pertes subies en visitant le marché national de Kelaât Sraghna dédié spécialement à la collecte des restes de pain, ajoutant que les propriétaires des boulangeries subissaient des pertes d'au moins 60 à 100 galettes de pain par jour. Il a ajouté que cette quantité reste très importante, quelle que soit la contribution du secteur informel, qui s'appuie sur des techniques primitives dans ses productions, ce qui peut avoir des effets négatifs sur la santé et la sécurité des citoyens, ainsi que le non-respect des conditions de concurrence équitable. Dans ce sillage, le chercheur en sociologie Mostapha Aboumalik a souligné que durant le Ramadan, les habitudes alimentaires restent pour la majorité des fidèles loin des objectifs voulus par le mois de Ramadan, qui est un mois de solidarité, de générosité et d'entraide où on doit penser aux couches vulnérables et aux nécessiteux. Aboumalik a rappelé que le concept de la nutrition en général a beaucoup changé avec le temps et traduit aujourd'hui une sorte d'excès, de profusion et de compétition autour des repas d'une manière qui mène au gaspillage, ce qui par ricochet impacte négativement la santé, l'état psychologique et matériel des membres de la société. Le fait de justifier la dilapidation par le proverbe « l'œil se rassasie avant le ventre » est une illusion, a-t-il conclu, rappelant que ce genre de concept a favorisé l'émergence d'une nouvelle culture et des rituels alimentaires qui découlent de la volonté de surmonter les aspects de la privation, tout en ajoutant que cette méthode a dépassé le domaine de la nutrition pour inclure les autres manifestations et les traditions socioculturelles tels que les habits et la décoration d'intérieur.