2 minutes et 28 secondes ont suffi la nuit dernière à Matt Frevola pour mettre au tapis le germano-marocain Ottman Azaitar. Un KO pathétique pour le cadet de la fratrie dont seul l'entregent a pu permettre de se retrouver devant le combattant américain pour une rencontre, sans enjeu de titre, dans la catégorie poids léger. Ottman Azaitar n'aura pas tenu un demi-round. Dans l'univers des sports de combat, pour gagner il faut avoir faim. Tous les fighters le savent. Le cadet de la fratrie Azaitar est arrivé au Madison Square Garden la nuit dernière les mains dans les poches, sans préparation mentale ni technique, sans idéal à défendre et sans valeurs à partager. Il est repu de richesses, rassasié de pouvoir, gavé de position sociale et en est imbu au point d'avoir pensé pouvoir rêver de victoire. Depuis l'annonce officielle du combat par l'UFC, le 22 août dernier, les internautes ont eu droit à une campagne promotionnelle non-stop à la gloire du combattant qui n'était pourtant pas entré dans la cage depuis septembre 2020. Un combat présenté comme une victoire, avant même qu'il ne se tienne Rien n'aura été épargné aux Marocains pendant ces interminables séances d'entraînement menées aux 4 coins du globe et théâtralement mises en scène sur les réseaux sociaux : concentration simulée, spiritualité instrumentalisée et family spirit cultivé à l'excès autour de l'image d'un père dont on s'interroge sur la présence. Rien ne nous aura été épargné pour attirer notre attention et nous faire croire que les germano-marocains Ottman, Abu, Omar et Khalid Azaitar étaient devenus les porte-étendards les plus légitimes du moment, nourris d'un soutien royal revendiqué à cor et à cri, depuis que le Roi Mohammed VI les a reçus en avril 2018. Rien ne nous a été épargné, pas même le triste spectacle des symboles de la nation et de la monarchie s'étalant sur les tenues de Ottman Azaitar, y compris son dentier de protection de combattant. Les symboles de la Nation à terre En assénant de son poing gauche le coup fatal qui a mis le germano-marocain au tapis, Matt Frevola a fait voler en éclats le dentier paré des armoiries royales en moins de temps qu'il ne faut pour le dire : 148 secondes. Ce sont 148 secondes d'humiliation pour tout un peuple dont l'hymne national a retenti pour accompagner l'entrée de Ottman Azaitar dans la cage qui l'a vu tomber par terre comme une mouche. Des secondes interminables précédées d'une arrivée apprêtée du combattant germano-marocain, son père à sa droite et son frère Abu à sa gauche, exhibant le drapeau marocain sur leur tenue, comme si cette rencontre, sans enjeu de titre, engageait un pays. Une défaite cinglante précédée par une séquence kafkaïenne qui a vu Ottman Azaitar s'agenouiller pour embrasser les pieds puis la main gauche de ce père à la barbe longue en broussaille, debout tel un gourou, pour recevoir les gages de loyauté de l'un de ses adeptes qui se prosterne devant lui. La suffisance qui mène à la perte La veille, lors de la séance de la pesée devant les journalistes, Ottman Azaitar bombait pourtant le torse devant l'américain. Les mises en scène sont habituelles lors de ce genre de rencontre, les protagonistes se jaugent, se font face et assurent le spectacle pour la presse. Mais Ottman Azaitar prend la pose avec exagération et sans aucune humilité. Il a le doigt menaçant et parle beaucoup quand l'américain économise son énergie et préfère se réserver pour l'action. Son frère Abu, également combattant, aurait pourtant dû lui conseiller de faire preuve de plus de réserve, lui qui a subi en mars 2021 une défaite spectaculaire par arrêt de l'arbitre, infligée par le québécois Marc-André Barriault. Dans cet autre combat de posture dont les fighters sont familiers, l'arrogance a été la plus forte pour celui qui s'est surnommé Le Bulldozer et qui n'avait pas combattu depuis plus de 2 ans, avant d'affronter Matt Trevola ce 12 novembre. Un combat convenu ? Ottman Azaitar n'était prêt ni techniquement ni mentalement et était en position défensive dès la première des 148 secondes passées dans la cage. Pour les spécialistes de la MMA, non seulement il n'était pas en mesure d'affronter l'américain, mais il ne méritait tout simplement pas de faire ce combat. La gauche destructrice qui a mis le germano-marocain à terre par un KO dont il ne se relèvera pas, est infligée, dans le déshonneur, aux Marocains qui ont entendu leur hymne et vu leurs symboles mis à mal sans qu'ils n'aient eu leur mot à dire. Ottman Azaitar osera-t-il remercier le Roi après avoir perdu comme l'avait fait Abu Azaitar à l'issue de sa défaite avec Marc-André Barriault ? C'est malheureusement prévisible, car il n'y a pas pire que l'arrogance. Elle rend aveugle. La fratrie et ceux qui maintiennent son illusion devraient méditer la sagesse de l'écrivain malien Massa Makan Diabaté : « que celui qui mène le cheval de la suffisance se retourne, il verra la honte accrochée à sa queue. »