Un collectif d'associations de la société civile a signé et adressé une lettre ouverte au ministre de l'Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts, Mohamed Sadiki pour dénoncer l'autorisation de chasse accordée par le département des eaux et forêts à des chasseurs étrangers américains et russes, pour l'abattage de mouflons à manchettes (mouton berbère), une espèce protégée et en voie de disparition dans l'Oriental et ses montagnes, mais également au Maroc. Eteint dans les montagnes de Beni Znassen dans les années 80 du siècle dernier, victime du braconnage à outrance et d'une chasse sauvage et intensive, le mouflon à manchettes a été réintroduit pour recoloniser son habitat à la fin des années 90 par le Haut- Commissariat aux eaux et forêts et à la lutte contre la désertification, dans le site écologique et biologique de Beni Znassen, précisément dans la réserve naturelle de Tafoughalt. Le collectif déplore en effet que le cheptel qui est loin d'être reconstitué (une centaine de bêtes tout au plus) soit victime de chasse au trophée par quelques fortunés (américains et russes) sans aucun égard pour un troupeau qui ne s'est pas reconstitué et donc loin d'être en surplus, pour en autoriser le massacre, au regard des 3000 ha de réserves dont il dispose. De plus, le collectif reproche les armes sophistiquées comprenant lunettes de visée et silencieux qu'interdit la pratique de chasse au Maroc. Dernièrement (mai dernier), à l'occasion de la journée internationale de la biodiversité à Ifrane, et en présence de Abderrahim Houmy, Secrétaire général du Département des Eaux et forêts, il avait été procédé à un lâcher d'une dizaine de mouflons à manchettes et d'une autre dizaine de porc-épic dans le parc de la région pour leur réintroduction. Le SG expliquait alors les enjeux de la stratégie des «Forêts du Maroc» pour la préservation des ressources forestières et le développement socioéconomique des populations. Aussi on ne s'explique pas, du côté de Beni Znassen, le paradoxe de ce département des eaux et forêts, qui d'un côté, s'emploie à la réintroduction d'une espèce menacée de disparition le cheptel de mouflon à manchettes en l'occurrence et d'un autre en autorise son abattage, qui plus est pour une chasse au trophée à quelques fortunés (50 000 dhs la bête). Pour le militant Mohamed Benata, Ingénieur agronome, Dr en Géographie, Président de l'ESCO, membre fondateur de l'ECOLOMAN et fervent défenseur de l'environnement et l'un des signataires de la la lettre ouverte, cela est tout simplement « inadmissible !, car on vient juste de commencer à reconstituer un cheptel et on délivre une autorisation de chasse au trophée ». Il convient de noter que la réinstallation de cet animal sauvage dans son environnement naturel et dans la réserve de Tafoughalt est toujours en train de s'adapter. Le Mouflon commence à peine à se multiplier, ce qui est l'un des paris de notre pays à travers la rationalisation l'exploitation, le développement, l'évaluation et la préservation de cette richesse sauvage. « En principe, la chasse au trophée n'est accordée que lorsqu'il y a un surplus. Ce n'est pas normal. Nous avons pour l'heure une centaine de têtes pour un superficie de 3000 ha on peut donc ratisser large avant de voir venir les fusils de chasse », s'insurge Mohamed Benata. Et de poursuivre: « Les Eaux et forêts sont en train de donner le mauvais exemple. Nous sommes en train de sensibiliser les populations pour préserver l'environnement et protéger le mouflon à manchettes en disant de ne pas le chasser et de respecter sa reproduction et le département censé le défendre autorise son abattage. C'est encourager d'autres chasseurs locaux à le braconner« . Dans le document adressé à Mohamed Sadiki par le collectif d'une vingtaine d'associations, et dont Hespress Fr détient copie, il est mentionné ceci: « On a autorisé sans aucune considération de la société civile et de la société locale et des associations environnementales des régions orientale et nationales, ce qui est incohérent avec des obligations collectives et une chasse telle que réglementée par la loi marocaine et stipulée dans les accords internationaux ». « Le collectif en appelle à l'arrêt immédiat de cette activité illégale à l'intérieur de cette réserve naturelle de Tafoughalt, et à ouvrir une enquête urgente. Pour cette raison, nous appelons le département national des Eaux et forêts et le ministère de tutelle à prendre les mesures urgentes permettant de respecter les processus d'octroi de licences de chasse et de sniping en informant et en impliquant tout le monde, notamment les associations environnementales actives dans le domaine de la préservation de la diversité biologique », ajoute la missive. Elle rappelle à cet égard que le Maroc est signataire de protocoles internationaux visant à conserver la biodiversité, la mise à jour des données statistiques pour l'évaluation du statut du mouflon à manchettes en particulier et du reste des variétés sauvages en général dans les réserves du Maroc.