L'envoyé personnel du secrétaire général de l'ONU pour le Sahara occidental, Staffan de Mistura, continue ses discussions avec les parties ayant une relation directe ou indirecte avec le dossier. Après l'Espagne, c'est au tour de la Russie. Mais les efforts de l'émissaire font déjà face aux obstacles énervés de l'Algérie et du polisario. Après une réunion avec le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Albares, en marge du forum international sur la Méditerranée «MED-Mediterranean Dialogues», la semaine dernière à Rome, De Mistura a eu un entretien téléphonique avec le vice-ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie, Sergueï Vershinine. Les deux parties ont souligné « l'importance de parvenir à une solution juste, à long terme et mutuellement acceptable au problème du Sahara occidental sur la base des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité de l'ONU », et le rôle de la mission onusienne d'observation (Minurso) a été salué. « La partie russe a exprimé son soutien aux efforts de S. de Mistura visant à reprendre les négociations entre les parties », a indiqué Moscou à l'issue de cet entretien. Sauf qu'au sujet de la reprise des négociations entre les parties, il se trouve que des blocages ont déjà été émis par l'Algérie une semaine avant l'adoption de la dernière résolution du Conseil de sécurité. Alger avait annoncé officiellement son refus de participer au processus des tables rondes, au moment où de Mistura, devait prendre du service quelques jours après la réunion du Conseil de sécurité. « Nous confirmons notre rejet formel et irréversible de ce format dit des tables rondes et nous avons instruit notre représentant permanent à New York à l'effet de notifier cette position du gouvernement algérien au président du conseil de Sécurité, en lui demandant de faire circuler la note verbale en question à tous les membres du Conseil », avait alors déclaré Amar Belani, envoyé spécial chargé de la question du Sahara occidental et des pays du Maghreb, à l'agence de presse algérienne officielle APS. Pourtant cette formule des tables rondes qui incluent les parties prenantes au conflit (le Maroc, l'Algérie, la Mauritanie et le polisario) est au centre de la mission de l'envoyé personnel d'Antonio Guterres. Cette formule, emmenée sous la houlette des Nations Unies permettait de faire participer les vraies parties au conflit. Et si l'Algérie jusqu'au dernier moment, indiquait n'être qu'un pays « observateur », les dernières résolutions du Conseil de sécurité ont confirmé le contraire, mettant à mal la version d'Alger. D'ailleurs, dans la résolution 2606, le Conseil de sécurité a exhorté l'ensemble des partie, y compris l'Algérie à participer au processus politique à travers les tables rondes et à à coopérer pleinement avec le Secrétaire général de l'ONU et son envoyé personnel pour parvenir à une solution politique à ce différend régional. Le Maroc de son côté, estime qu'il est obligatoire que l'Algérie soit pleinement associée à ce processus politique, en affirmant que le réel interlocuteur de Rabat dans ce dossier c'est Alger. Le royaume se base sur plusieurs faits à charge contre la supposée neutralité avancée par la régime algérien. Et pour cause, l'Algérie est le pays qui a créé le polisario, les milices séparatistes sahraouies et les a poussées à s'auto-proclamer en Etat, au lendemain de la Marche Verte en 1975 qui a chassé l'occupant espagnol du Sahara. L'Algérie participe activement au dossier et a déjà refusé plusieurs candidats au poste d'envoyé personnel avant de s'accorder sur la candidature de Staffan de Mistura. L'Algérie est également le pays qui chapeaute et gère toutes les opérations de la milice séparatiste, paye ses représentants et les arme et envoie les réfugiés sahraouis apprendre à faire la guerre avec les guérillas des pays d'Amérique latine. C'est d'ailleurs en Algérie que se trouve le QG du polisario, à Tindouf. Début 2021, le chef du groupe séparatiste, Brahim Ghali a été envoyé en urgence en Espagne pour être soigné du coronavirus. Alors que ce dernier est poursuivi par la justice espagnole pour « crimes contre l'humanité » et « génocide », il a pu entrer sur le territoire européen sans passer par les contrôles douaniers, grâce à l'intervention du président Algérien, Abdelmadjid Tebboune, qui lui a même prêté son avion présidentiel pour le déplacement et lui octroyé un faux passeport diplomatique algérien. Depuis plus de 45 ans, l'Algérie mobilise toute sa diplomatie pour promouvoir le séparatisme et menacer l'intégrité territoriale du Maroc, avec des efforts acharnés au niveau des instances internationale, et auprès des pays africains et des Etats arabes, notamment au sein de l'Union africaine. Cela, en mettant ce sujet à l'ordre du jour des réunions de l'instance africaine, et en organisant des réunions et des prétendus sommets avec les Etats africains membres du Conseil de sécurité pour les influencer sur cette question, même chose avec les pays arabes. En outre, l'Algérie a même créé un poste spécial pour le dossier du Sahara au niveau de son Ministère des Affaires Etrangères, en nommant Amar Belani, comme « envoyé spécial » chargé du Sahara. Et alors que l'Algérie n'a pas réussi à modifier le contenu de la dernière résolution du Conseil de sécurité en annonçant son boycott des tables rondes, c'est au tour de son poulain, le polisario, de tenter de faire pression et du chantage, en annonçant une mesure similaire. Le chef de la faction séparatiste l'a exhorté à « collaborer étroitement » avec l'Union africaine (dirigée par les deux gros poids lourds anti-marocains, l'Algérie et l'Afrique du sud, ndlr) et a poser le calendrier de ses actions et de sa mission et de lui donner de garanties pour l'organisation d'un référendum, alors que cette option a été éliminée depuis des années à cause de la partialité assurée des résultats. Pour l'instant l'émissaire onusien n'a pas réagi aux tentatives de sabotage de deux alliés, et continue ses entretiens avec les différentes parties en vue de comprendre les enjeux, la nouvelle conjoncture et les développements de ce dossier. Avant la partie espagnole et russe, Staffan de Mistura, s'était entretenu notamment avec plusieurs parties au Conseil de sécurité de l'ONU, dont l'ambassadrice de Washington aux Nations Unies, Linda Thomas Greenfield, et la Représentante permanente des Émirats arabes unis auprès des Nations Unies, Mme Lana Zaki Nusseibeh.