C'était l'une de ces soirées où un entraîneur s'illustre par la pauvreté de sa vision du cours du match et par sa mauvaise interprétation du jeu. L'Entente Sportive de Sétif était là, inoffensive dans son coin, attendant qu'un ballon perdu vienne la sortir de son repli systématique… Le Wydad de Casablanca se devait simplement de concrétiser deux de la bonne vingtaine d'occasions qui se sont présentées à ses attaquants, et dont certaines exigeaient un effort incroyable pour les rater, pour garantir sa qualification. Mais il n'en aura même pas exploité une, résultat capable de mener l'équipe à la séance des tirs au but… Sur les tickets du quart de finale retour de la Ligue des Champions de la CAF, disputé vendredi 21 septembre sur la pelouse du Complexe Sportif Mohammed VI, il manquait un avertissement à l'intention des personnes souffrant d'hypertension artérielle ou de diabète, surtout des wydadis d'entre eux. Sektioui a cru bon de dédier une mi-temps entière à tâter le pouls de l'adversaire, un luxe qu'il doit regretter de se l'être permis. Le Wydad a adopté un jeu latéral en première mi-temps, avec Jebor en pointe d'attaque et par conséquent récipiendaire d'un tas de centres imprécis. Une tactique stérile. Mis à part un tir de Nahiri (10e) et d'El Haddad (29e), tous deux non cadrés, le WAC a gâché 40 précieuses minutes sans en cadrer une… L'ESS, grâce aux consignes de Taoussi, a montré peu de précipitation et s'est focalisée sur un seul objectif : ne pas laisser d'espace derrière. Les algériens pouvaient même s'offrir le luxe de tuer le match dès la 23e minute si Bouguelmima ne s'était pas précipité à tirer alors qu'il avait un coéquipier bien placé. Le premier tir cadré du WAC est enregistré à la 40e minute par El Haddad, immédiatement suivi pas un tir tellement faible de Jebor (41e) qu'il porterait difficilement le nom de tir. S'en suivit un Centre hasardeux de Karti qui a manqué de tromper le gardien (45+1). Au coup de sifflet annonçant la fin de la première période, le manque d'implication des wydadis inquiétait. Il était grand temps pour Sektioui de déceler ce qui clochait avant de se diriger vers une élimination qui semblait alors fort probable. Sentant un WAC sans crocs, l'ESS a osé deux ou trois contre-attaques dans les 5 premières minutes de la seconde période freinées dans les derniers mètres par la défense wydadie. Ces manœuvres ont égratiné la dignité des rouges, qui se sont subitement rappelé qu'ils sont les champions d'Afrique en titre. Jebor a réussi sa première tête cadrée (53e), suivi d'une autre de Nahiri (54e) détournée difficilement par Zaghba, gardien de l'ESS et héros du match. Les reprises de la tête se multipliaient, car la qualité des centres s'améliorait peu à peu. Jebor en envoie une autre au-dessus des cages sur le corner qui s'en est suivi (55e) et une autre de Saidi à la 57e trouve les gants de Zaghba. Alors que le jeu de tête commençait à se faire prolifique, Sektioui a cru bon de remplacer Karti (1,85 m et aux excellentes détentes) par Hassouni (1,75m, sans expérience dans ce genre de rencontres). Et puis soudain, la pelouse s'est embrasée. Jebor, à 3 mètres ou moins des buts, rate l'éléphant dans le couloir (61e) en tirant sur le bras de Zaghba. Une minute après, il réussit le rarissime exploit de se rater dans les mêmes conditions et de marquer un essai de rugby ! El Haddad (68e), puis Jebor (72e) ont retenté leur chance de la tête. Toujours rien. Zaghba est inébranlable. Touché dans son honneur (peut-être à cause de sa médiocre prestation), le Libérien décoche un tir des 30 mètres repoussé (très) difficilement par Zaghba, mais repoussé quand même (75e). Taoussi, en bon pompier, a sorti son meneur de jeu, Abdelmoumen Djabou et introduit un défenseur, Saad Anes. Sektioui lui a troqué Aarab par Tighzaoui (78e). Le stress a atteint son comble lorsque Hassouni a choisi de décocher un de ces tirs anodins à 10 km/h au lieu de passer à deux partenaires bien démarqués. Mais si une crise cardiaque était à enregistrer ce soir, il y aurait de fortes chances que les ratés de Jebor en soient à l'origine. Il rate un face à face en tirant sans technique dans les pieds du gardien (82e), devant la stupeur du public. Il n'était visiblement pas prêt pour un match de ce calibre. L'ESS a cherché à exploiter les espaces laissés par le WAC, mais ses contre-attaques étaient molles. Les visiteurs n'en auront finalement pas besoin face à la créativité wydadie en matière de ratés. Sektioui s'est même permis de sortir Ounajem, auteur d'un grand match, à 5 minutes de la fin. Le résultat final, 0-0, tombe comme une guillotine sur le public au stade comme dans les cafés de tout le pays. Impardonnable. Le drame aurait pu être évité, mais… Deux pages ont été donc tournées ce soir : celle de l'aventure africaine du WAC, et celle d'Abdelhadi Sektioui à sa barre.