Driss Jettou a été on ne peut plus critique en s'exprimant mardi devant la commission du contrôle des finances publiques à la Chambre des représentants. Exposant le rapport de ses juges sur l'évaluation du programme national « Villes sans bidonvilles (VSB) 2008/2018 », le premier président de la Cour des comptes a épinglé le gouvernement qui « a manqué à ses obligations concernant l'élimination des bidonvilles au Maroc ». Présentant le rapport de la Cour des Comptes, Jettou a souligné que « les objectifs du programme Villes sans bidonvilles ont été revus plus d'une fois, et sont aujourd'hui dépassés par le nombre élevé de familles vivant dans des bidonvilles », notant que « les délais 2010, 2012, 2014, 2018 n'ont pas été respectés alors que nous sommes en 2020 et nous parlons aujourd'hui de l'année à venir, ce qui rend impossible de se fier à cette date ». D'autre part, le rapport a révélé que l'augmentation annuelle moyenne du nombre de familles vivant dans des bidonvilles a atteint les 10.000, soit une hausse de 202.000 familles. Pour Driis Jettou, «atteindre 472.000, au lieu de 270 000 familles, ne signifie pas le succès du programme qui s'est transformé en passant de l'élimination des bidonvilles à la correction des logements d'un certain nombre de résidents des bidonvilles ». Mais pas que ! Le rapport souligne que « la déclaration des villes sans bidonvilles se fait sans remplir toutes les conditions, puisque 59 villes sur 85 ont été déclarées sans bidonvilles, donc un manque à gagner de 26 villes», faisant noter que « la déclaration de ces villes est relative, car la majorité des bidonvilles sont concentrés dans les grandes villes qui n'ont pas été déclarées sans bidonvilles, notamment Casablanca, Salé, Témara et autres ». À la lumière de ces constats, la Cour des comptes a recommandé à l'Exécutif, en particulier au ministère chargé du secteur de l'habitat, d'améliorer les performances et de remédier à certaines des lacunes qui entravent le bon contrôle des programmes publics, en particulier celles liées à la lutte contre le logement insalubre. Le Conseil a également appelé à contrôler le nombre de bénéficiaires, à identifier les critères d'éligibilité unifiés et une base de données fiable, à mettre en place un schéma de financement réaliste et à veiller à son respect. Il a de même insisté sur la nécessité de liquider le conteneur immobilier et rationaliser son exploitation, mais aussi de respecter les délais de mise en œuvre des opérations, avec une coordination meilleure et plus globale. Driss Jettou et son équipe ont pareillement recommandé dans leur rapport, d'assurer une meilleure coordination des programmes dans leur globalité, avec une définition claire des responsabilités des différents acteurs, soulignant l'importance « d'adopter une approche intégrée du développement humain allant au-delà de l'objectif de logement pour inclure les aspects économiques et sociaux dans les nouveaux sites d'accueil ». In fine, la Cour des comptes a appelé à une plus grande rigueur dans la lutte contre le phénomène de propagation des quartiers d'habitations insalubres en renforçant les mécanismes de contrôle et de dissuasion, en particulier au niveau juridique et technologique, soulignant l'importance d'une communication appropriée pour promouvoir diverses offres de soutien public pour lutter contre le logement inapproprié, mettant ainsi un terme à l'impression dominante à savoir « l'accès à l'aide publique est un droit garanti de chaque habitant d'un logement inadéquat ».