Sabrina Mervin, directrice du centre Jacques Berque (CJB), est au centre d'une polémique. Accusée par ses employés de « néocolonialisme », voire de « racisme », dans sa gestion de cet institut français de recherche, elle s'en défend et dénonce un « lynchage public ». Rien ne va plus au Centre de recherche Jacques Berque (CJB) à Rabat. Le vendredi 8 septembre, le « collectif de jeunes chercheurs » publie une pétition sur change.org. Dans cette lettre adressé au président Français Emmanuel Macron, ces chercheurs qui gardent l'anonymat accusent Sabrina Mervin, directrice depuis deux ans du centre de recherche affilié au réseau des Instituts français de recherche à l'étranger (IFRE), de « faire régner un climat de terreur en toute impunité, notamment quand il s'agit du personnel non français du Centre ». « Elle a fait dysfonctionner ce Centre de recherche en installant un climat délétère. Elle a éloigné des doctorants et des chercheurs, souvent avec des relents de néocolonialisme et de racisme. » peut-on lire sur la lettre. Jointe par H24info, Sabrina Mervin dément et dénonce ce qu'elle qualifie de « lynchage public ». Un jeune chercheur au CJB raconte: « elle s'exprime et se comporte maladroitement sans parler de l'exploitation (…) sa petite secrétaire qui se tapait une misère et touchait à peine 4000 dirhams ». La même source, qui a préféré garder l'anonymat, témoigne du « harcèlement » que subissent des salariés du centre: « elle l'a poussée (la secrétaire) au Burn out. Finalement, la femme a eu des ecchymoses sur son corps. Sous pression, elle s'est résignée à démissionner ». Une version concordante avec les informations rapportés par les auteurs de la lettre, selon qui la secrétaire générale du centre fut « violemment agressée », victime d'un malaise vagal en juin 2017 et admise en réanimation. Le chauffeur du Centre lui aussi aurait été soumis à des « brimades et des humiliations dignes d'un autre âge ». Il a été victime courant août 2017 d'un accident cérébral irréversible. Sabrina Mervin commente: « ils étaient malades avant mon arrivée, je n'en suis pas responsable ». Interrogée sur son caractère jugé « impulsif » et « violent », la directrice s'interroge: « je suis impulsive, est alors ? Je suis juste dynamique ». Un centre déserté Selon notre source au CJB, la plupart des jeunes chercheurs ont été écartés. « En 2015, on était 70 chercheurs associés Marocains et étrangers, là on est à moins de 18, et il n'y a que trois ou quatre qui sont actifs (…) des chercheurs payent même les frais de recherches eux-même », témoigne le jeune chercheur sous couvert d'anonymat. Selon notre source au sein du centre, la crise remonterait au mois de mai dernier. Quand les chercheurs avaient, un temps, tenté de régler la crise en interne, un audit a été réalisé et l'ambassade de France ainsi que le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) y ont été associé. « Et alors qu'une grève était sur le point d'être lancée par des employés lors de la journée symbolique du 14 juillet, Sabrina Mervin a pris les devants et a démissionné », raconte la même source. Mais après les départs en vacances des chercheurs et salariés du centre, la directrice s'est rétractée et a repris son poste. Interrogé sur sa démission et la volte-face qui s'en est suivie, Mervin s'explique: « cela relève des affaires internes et je ne comprends pas pourquoi la presse s'en mêle ». Fondé en 1991, le CJB pour le développement des sciences humaines et sociales au Maroc est une Unité mixte des instituts français à l'étranger (UMIFRE). Cette unité associe une structure opérationnelle du CNRS, actuellement l'Unité de service et de recherche USR3136 et un Institut français de recherche à l'étranger (IFRE) relevant de la Direction générale de la mondialisation du ministère des Affaires étrangères et européennes représentée localement par le Service de coopération et d'action culturelle de l'Ambassade de France au Maroc. Le directeur du CJB est nommé conjointement par le Ministère des Affaires étrangères et européennes et par le CNRS.