Le Maroc a mené une réflexion profonde pour la refonte de son partenariat avec l'Union Européenne (UE), a souligné Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale. La période passée avant la tenue de la 14ème session du Conseil d'Association Maroc-UE a été « une bonne occasion de mener une réflexion sur l'avenir du partenariat, qui était arrivé à un moment d'essoufflement », a dit Bourita dans un entretien à l'Agence Europe publié vendredi. « Pendant les trois dernières années, nous avons travaillé pour immuniser ce partenariat, pour rejeter les attaques honteuses de ceux que l'évolution de ce partenariat ne satisfaisait pas et construire une vision », a-t-il expliqué, ajoutant que « la politique européenne de voisinage était devenue presque un plafond, en tout cas pour le Maroc ». « Nous avons également exploité ces trois ans pour mener cette réflexion lucide, ambitieuse et c'était une occasion pour mettre à jour notre cadre juridique et réfléchir sur l'adaptation de notre cadre institutionnel », a-t-il ajouté. Bourita a indiqué que ce 14ème Conseil d'Association revêt un caractère particulier « d'abord par sa conclusion, une déclaration commune, ce qui est unique dans la relation entre le Maroc et l'UE et dans la relation de l'UE avec ses partenaires du sud de la Méditerranée. Deuxièmement, par le contenu de celle-ci, qui reflète la discussion que nous avons eue, c'est une restructuration du partenariat autour de quatre axes et deux thématiques centrales ». Pour le ministre, « il ne s'agit pas juste d'une restructuration sémantique, mais d'un espace où l'on pourrait approfondir l'existant et se projeter au-delà et optimiser ce que permettent les structures, les cadres et les règlements de l'Union européenne ». Il a expliqué que sur l'espace « connaissances », les deux partenaires peuvent faire énormément de choses pour arrimer l'université marocaine et les centres de recherches à ceux de l'Europe, pour que les universités marocaines et les chercheurs marocains puissent bénéficier davantage des appels d'offres européens, et pour que le contenu même des programmes puisse être partagé. Sur l'économie, le ministre a indiqué qu'il y a une réflexion de fond pour aller vers plus d'intégration que de libre-échange. Concernant l'espace « stabilité », Bourita a affirmé que les deux partenaires mènent un dialogue fréquent « devant donner lieu à des initiatives conjointes, au lieu de rester juste dans la présentation des positions et le constat qu'on a des positions convergentes. (...) ». Evoquant l'instauration d'une zone de libre-échange approfondi avec l'UE, le ministre a souligné qu'une discussion à ce sujet a commencé en 2009-2010, notant qu'il y a eu entre-temps beaucoup d'évolutions qu'il faut intégrer. Il a rappelé que le Maroc, à partir de la semaine prochaine, fera partie d'une zone africaine de libre-échange et l'Europe a signé entre-temps beaucoup d'accords de libre-échange avec des pays de l'Asie qui ont un impact sur l'avantage comparatif qu'avait le Maroc. Le ministre a mis l'accent sur la nécessité de faire une évaluation de l'accord d'association entré en vigueur en 2000, relevant que le Maroc a fait évoluer ses stratégies économiques et industrielles, et tout cela doit être intégré dans cette évaluation. « Nous ne renions pas ce qui a été réalisé jusqu'à présent, mais nous souhaitons, comme pour les autres aspects, qu'il y ait une adaptation à l'aune des évolutions pour choisir ce qui serait le mieux pour notre partenariat », a ajouté le ministre. Evoquant la question de la migration qui constitue un autre aspect de la coopération avec l'UE, le ministre a souligné que « le Maroc est contre toute tentative de concentrer la pression sur les pays de transit et d'alléger la pression sur les pays d'origine et les pays de destination. En même temps, en acteur responsable, il ne permettra pas que ses frontières et son territoire soient utilisés pour un trafic d'êtres humains ou un trafic illicite ».
Bourita a affirmé qu'au-delà de la coopération conjoncturelle, parce qu'il y a un pic ou parce que les migrants ont changé d'itinéraire, il faut penser à une coopération plus structurelle, plus à long terme, notant que "si l'Europe considère que le Maroc est sa frontière, il faut développer des programmes à long terme et mobiliser les ressources et la visibilité nécessaires pour programmer quelque chose". S'agissant des accords agricole et de pêche Maroc-UE, Bourita a précisé qu'ils vont entrer en vigueur très prochainement, notant que pour le Royaume, « la question de l'association de la population de la région aux accords internationaux est une donne nationale ». Il a rappelé que le Maroc s'est appuyé sur les représentants des populations locales, au Sahara et dans les autres régions du pays, pour discuter des accords et pour que les représentants de la population, que ce soit dans les conseils régionaux, dans les chambres de commerce ou au Parlement, puissent exprimer leur position et leur accord par rapport aux instruments juridiques qui ont été signés. Et d'ajouter qu'en démocratie, « la représentativité est le résultat d'une élection, d'une légitimité par les urnes ».