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Quatre jours après la tragédie d'Imlil, des mots pour apaiser la douleur
Publié dans 2M le 21 - 12 - 2018

Les habitants de la région de Marrakech sont toujours sous le choc. Si l'arrestation des quatre auteurs présumés du meurtre des deux jeunes scandinaves rassure, elle ne suffit pas encore à apaiser l'émotion très vive suscitée par ce crime odieux.
Dans les douars nichés dans la montagne du Toubkal, les prénoms de Louisa Vesterager Jespersen, jeune danoise de 24 ans, et Maren Ueland, norvégienne âgée de 28 ans, sont sur toutes les lèvres .Leurs visages souriant, abondamment montrés par les médias et relayés dans les réseaux sociaux, n'en finissent pas de planer sur le site de Chamharouch, théâtre du drame.
Guide touristique depuis plus de dix ans, Rachid est sous le choc. Il accompagne chaque année des milliers de touristes venus des quatre coins du monde pour réaliser l'ascension du sommet le plus élevé du Maroc. De mémoire, il assure que jamais une telle tragédie n'a endeuillé cette région : « c'est la première fois qu'un acte aussi ignoble est commis chez nous. Nous sommes affligés par une telle barbarie dont les conséquences peuvent être très négatives pour les gens d'ici qui vivent essentiellement de tourisme.» dit-il.
Dans la bouche des habitants d'Imlil, les mots ne sont pas assez forts, devant l'atrocité de ce crime et sa violence inédite.
Sur les sentiers qui mènent au Toubkal, nous croisons de petits attroupements inhabituels dans la région. Mais parler, même si cela est difficile, est une exigence imposée par la gravité du moment.
Que faire, s'interrogent plusieurs habitants réunis devant le petit commerce de l'hajj Larbi ? Du haut de ses 72 ans, le vieil épicier affiche une mine triste en se rappelant des tous premiers touristes qui venaient bivouaquer près de son commerce : « Il n'y a jamais eu de problème. Les étrangers qui viennent, repartent tous très satisfaits de leur voyage. Ils sont même nombreux à revenir » dit-il.
« Comment pouvons nous agir pour que ces assassins ne nous soient pas assimilés ? », ajoute un ami de L'Hajj Larbi.
Tous expriment leur peur des amalgames dans cette zone montagneuse connue pour sa tranquillité et l'hospitalité d'une population accueillante, malgré des moyens très modestes.
« Ces criminels ne font pas partie de nous, nous avons honte d'être associés à ces barbares», nous confie Mohamed, propriétaire d'un des petits gîtes que les visiteurs peuvent croiser sur la voie du Toubkal.
« Il s'agit d'un acte totalement étranger aux valeurs du vivre ensemble qui fait notre réputation» ajoute-t-il d'un air dépité.
Dans cette zone épargnée par le tourisme de masse, ce sont des adeptes du trekking et de la randonnée en montagne qui sillonnent la région.
Au delà de la performance physique ou sportive, des milliers de visiteurs, plus nombreux chaque année (28 000 en 2018 contre 12 000 en 2017) viennent y chercher la paix et la sérénité.
« Les gens du village sont très accueillants. On se sent ici comme chez nous», témoigne un randonneur anglais habitué du Toubkal.
Pour lui, cette tragédie, aussi horrible soit-elle, ne peut changer cette perception. Quant à cet autre touriste espagnol que nous interrogeons, il a tenu à adresser un message à toutes celles et ceux tentés par l'escalade du Toubkal : « malgré ce qui s'est passé, cela reste une région calme et sans problèmes. Le terrorisme n'épargne plus aucun pays », dit il, avant d'ajouter : « nous ne devons pas céder devant eux, c'est ce qu'ils veulent ».
Dans la ville de Marrakech, une même détermination ponctue les propos de Jean, 52 ans. Cela fait 15 ans qu'il est installé ici : « Les marocains sont connus pour leur hospitalité et leur bienveillance. Elles sont réelles, je le vit au quotidien. Cet acte ignoble, ne doit pas empêcher les gens de venir », nous dit-il.
Ahmed, 60 ans, s'interroge lui sur « les motivations obscures qui poussent ces illuminés » à commettre de tels actes : « Ce sont des meurtriers, pas des musulmans ! L'islam, comme son nom l'indique, prône la paix et non la violence. J'espère qu'ils seront sévèrement punis», nous dit, indigné, ce sexagénaire.
Sur la place Jamaa El Fna nous retrouvons Abderrazak, serveur dans l'un des nombreux cafés qui entourent la place mythique.
Il dit n'avoir jamais oublié l'attentat d'Argana qui avait endeuillé le Maroc en 2011. 17 personnes dont 15 touristes y avaient perdu la vie. « C'était dur. Nous avons vécu un moment très douloureux », nous déclare Abderrazak. « Aujourd'hui encore nous sommes en deuil avec l'assassinat de ces deux jeunes femmes et je ressens exactement la même chose qu'en 2011 », ajoute t'il, l'air abattu.
A bout de mot pour exprimer ce qu'il ressent, le serveur participera à l'un des deux rassemblements prévus ce vendredi 21 décembre à Marrakech, à la mémoire de Louisa et Maren.
Que ce soit sur la place Harti ou à Jamaa El Fna à 19H, il ira chercher du réconfort auprès des autres habitants de la ville ocre qui se retrouveront pour un moment de recueillement.
Une minute de silence y sera observée.


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