La langue de bois, ça ne convient pas à Ryad Mezzour, le Directeur général de Suzuki Maroc. Fils aîné de deux fortes personnalités, il abandonne les prépas et opte pour lEcole Polytechnique Fédérale en Suisse. Il trouvera ainsi sa voie dans un cursus dingénieur en mécanique qui le mènera, des années plus tard, au Maroc. Fils aîné de deux fortes personnalités, Ryad Mezzour est né de père capitaine dindustrie et de mère ayant supervisé les finances dun des plus grands groupes du Royaume. «Mon enfance, où matériellement je nai manqué de rien (cest le moins quon puisse dire), a été entachée par le divorce de mes parents quand javais 5 ans. Au-delà de ce traumatisme, qui nous poursuit mes frères, mes surs et moi jusquà aujourdhui, nous avons eu la chance, notamment grâce à ma mère, de baigner dans une culture humaniste où les valeurs comme lhonnêteté, le respect de lhomme (avec un grand H) et de la nature, le devoir, le patriotisme et la culture étaient au centre de notre vie». Son père, quant à lui, leur transmettra un certain amour de la nature, des belles choses et le besoin de voir dans ses yeux quil était fier de ses enfants. Cet incident naffectera cependant pas la scolarité exemplaire de Ryad qui, après avoir décroché son Bac au Lycée Lyautey, entamera une année de prépa HEC quil a vite abandonnée. «Jai coutume de dire que cest ma carrière qui ma choisi et non linverse. Mon parcours est très atypique et je pense que cest une de mes forces». Sous le conseil éclairé dun ami de la famille, Ryad plie bagage à destination de la Suisse pour rejoindre lEcole Polytechnique Fédérale de Zurich. «Après de longs tâtonnements, probablement dus à la fougue de mes vingt ans, jai trouvé ma voie dans le cursus dingénieur en mécanique. Aussitôt diplômé, je rejoins ABB en Suisse dans lespoir de participer au projet de la centrale de Jorf Lasfar pour rentrer définitivement au pays». Mais, le destin décidera autrement du retour au bercail. Ainsi, après deux ans au sein du département Recherche & Développement dABB, Ryad renoue avec les études pour approfondir ses connaissances en enchaînant avec un Master dont la dominante technique concernait les centrales ; lautre dominante étant la gestion dentreprise. «Je suis approché durant mes études par plusieurs entreprises et jopte pour le conseil en management au sein du cabinet Deloitte à Zurich. Cétait une expérience formidable qui complétait idéalement mon parcours. En effet, portant des gènes marocains, de culture francophone, de formation germanique, jallais rejoindre un cabinet américain». Chez Deloitte, Ryad découvre que chacun a sa place dans un ensemble si tant est quon puisse prendre la peine de regarder lautre et de sappuyer sur ce quil sait faire de mieux. «Cette leçon deviendra un réflexe personnel et professionnel». À 32 ans, Ryad se décide enfin à revenir au pays où il se voit confier la Direction Générale de Locasom-Budget. «Jai malheureusement trop focalisé mon mandat sur son aspect technique, négligeant certains critères politiques, notamment vis-à-vis de mon management direct qui me demandait, au-delà de la compétence, une certaine allégeance que jétais bien incapable de lui fournir». Un profil pareil ne reste pas longtemps sur le marché, puisquil rejoindra ensuite la Société des Fonderies de Plomb de Zellidja où il a été le témoin privilégié dun des plus grands bouleversements financiers et spéculatifs de notre histoire. «Avec la perception que la valeur des marchandises échangées ne reflète en rien leur valeur ajoutée réelle et que léchange et la transaction ont définitivement pris le pas sur lobjet échangé ou le sous-jacent réel de la transaction». Puis vint la proposition de reprendre les rênes de Suzuki. Cette nomination à la Direction générale de cet importateur est pour Ryad une réelle bouffée doxygène et la chance de reprendre la totale responsabilité dune entreprise avec, cette fois-ci, une connexion directe avec lactionnaire, ce qui permet dagir dans lintérêt unique de lentreprise. Au boulot, la stratégie de travail de Ryad se décompose en principes, missions, stratégies, moyens et harmonie. «Mes principes sont clairs et lhumain est au centre de mon action. Ainsi, à notre client nous devons une expérience positive avec nos produits et services, et cela quels quen soient le prix et le coût. Cette même expérience positive, nous la devons à nos partenaires, à nos collègues et à nos actionnaires. À partir de ces principes, nous définissions nos missions qui sont en quelque sorte des grands objectifs de positionnement. Notre mission est datteindre 5% de parts du marché automobile marocain en 2013, avec comme étape datteindre les 5% du marché de VP CBU dès 2010. Ensuite, nous mettons en place tout larsenal stratégique pour y parvenir en déclinant un plan daffaires cohérent et porté par tous, permettant une allocation des ressources humaines et matérielles optimales pour atteindre les objectifs fixés. Ensuite, il sagit de jouer la partition avec cur et harmonie en corrigeant nos erreurs, en adaptant nos équipes et nos instruments». Pour Ryad, «nous ne pouvons atteindre que ce à quoi nous aspirons réellement, quel que soit notre point de départ, que lobjectif soit un progrès ou une régression». En dehors du travail, il ny a pas meilleure activité pour Ryad que dêtre entouré des siens, famille et amis. Il ne se rassasie jamais de voir sa femme et ses enfants évoluer et de partager une partie de leur vie. «Jaime cette immersion quotidienne dans la vie des miens où lon parle punition, danse, piano, révolte, amours, vie, mort » Il faut dire que la devise ou le moteur qui anime Ryad dans cette vie est que «chacun a sa place dans notre société». Il définit son rôle comme étant de trouver la sienne et daider son épouse et ses enfants à trouver la leur et, au-delà, tous ceux à qui il peut apporter sa contribution avec conviction et détermination. «Ce qui me motive dans la vie, cest lamour des miens et aussi, il faut le reconnaître, la reconnaissance des autres». Grand fan de foot, pour Ryad voir évoluer une grande équipe telle que le Barça ou lInter est une vraie source de plaisir et une grande école de management, de discipline et de courage. «Le sport et lart nont malheureusement pas la place quils méritent dans notre culture et je suis adepte dintroduire au moins 90 minutes de sport et 90 minutes de culture par jour à lécole. Le sport est une des plus grandes écoles de savoir-être qui est, à mon sens, beaucoup plus important que le savoir-faire». Mais son vu le plus cher est de pouvoir accompagner son épouse et ses enfants dans la réalisation de leur rêve aussi loin quil en aura la force. «Je souhaiterais aussi minvestir plus dans lintégration professionnelle de toutes les catégories dites inadaptées ou handicapées. Enfin, jaimerais pouvoir (et savoir) écrire». Et sil fallait réécrire son histoire ? «Je pense que jessaierais naturellement de gommer mes échecs, mes erreurs ou les offenses que jai pu commettre; mais je me dis finalement quon apprend plus des échecs et des erreurs que des succès et que tout cela fait partie de moi aujourdhui. Cette question est délicate, mais tout bien réfléchi, je ne changerais rien».