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Ryad Mezzour, en toute franchise
Publié dans Finances news le 27 - 05 - 2010

La langue de bois, ça ne convient pas à Ryad Mezzour, le Directeur général de Suzuki Maroc. Fils aîné de deux fortes personnalités, il abandonne les prépas et opte pour l’Ecole Polytechnique Fédérale en Suisse. Il trouvera ainsi sa voie dans un cursus d’ingénieur en mécanique qui le mènera, des années plus tard, au Maroc.
Fils aîné de deux fortes personnalités, Ryad Mezzour est né de père capitaine d’industrie et de mère ayant supervisé les finances d’un des plus grands groupes du Royaume.
«Mon enfance, où matériellement je n’ai manqué de rien (c’est le moins qu’on puisse dire), a été entachée par le divorce de mes parents quand j’avais 5 ans. Au-delà de ce traumatisme, qui nous poursuit mes frères, mes sœurs et moi jusqu’à aujourd’hui, nous avons eu la chance, notamment grâce à ma mère, de baigner dans une culture humaniste où les valeurs comme l’honnêteté, le respect de l’homme (avec un grand H) et de la nature, le devoir, le patriotisme et la culture étaient au centre de notre vie».
Son père, quant à lui, leur transmettra un certain amour de la nature, des belles choses et le besoin de voir dans ses yeux qu’il était fier de ses enfants.
Cet incident n’affectera cependant pas la scolarité exemplaire de Ryad qui, après avoir décroché son Bac au Lycée Lyautey, entamera une année de prépa HEC qu’il a vite abandonnée. «J’ai coutume de dire que c’est ma carrière qui m’a choisi et non l’inverse. Mon parcours est très atypique et je pense que c’est une de mes forces».
Sous le conseil éclairé d’un ami de la famille, Ryad plie bagage à destination de la Suisse pour rejoindre l’Ecole Polytechnique Fédérale de Zurich. «Après de longs tâtonnements, probablement dus à la fougue de mes vingt ans, j’ai trouvé ma voie dans le cursus d’ingénieur en mécanique. Aussitôt diplômé, je rejoins ABB en Suisse dans l’espoir de participer au projet de la centrale de Jorf Lasfar pour rentrer définitivement au pays».
Mais, le destin décidera autrement du retour au bercail. Ainsi, après deux ans au sein du département Recherche & Développement d’ABB, Ryad renoue avec les études pour approfondir ses connaissances en enchaînant avec un Master dont la dominante technique concernait les centrales ; l’autre dominante étant la gestion d’entreprise. «Je suis approché durant mes études par plusieurs entreprises et j’opte pour le conseil en management au sein du cabinet Deloitte à Zurich. C’était une expérience formidable qui complétait idéalement mon parcours. En effet, portant des gènes marocains, de culture francophone, de formation germanique, j’allais rejoindre un cabinet américain». Chez Deloitte, Ryad découvre que chacun a sa place dans un ensemble si tant est qu’on puisse prendre la peine de regarder l’autre et de s’appuyer sur ce qu’il sait faire de mieux. «Cette leçon deviendra un réflexe personnel et professionnel». À 32 ans, Ryad se décide enfin à revenir au pays où il se voit confier la Direction Générale de Locasom-Budget. «J’ai malheureusement trop focalisé mon mandat sur son aspect technique, négligeant certains critères politiques, notamment vis-à-vis de mon management direct qui me demandait, au-delà de la compétence, une certaine allégeance que j’étais bien incapable de lui fournir».
Un profil pareil ne reste pas longtemps sur le marché, puisqu’il rejoindra ensuite la Société des Fonderies de Plomb de Zellidja où il a été le témoin privilégié d’un des plus grands bouleversements financiers et spéculatifs de notre histoire. «Avec la perception que la valeur des marchandises échangées ne reflète en rien leur valeur ajoutée réelle et que l’échange et la transaction ont définitivement pris le pas sur l’objet échangé ou le sous-jacent réel de la transaction».
Puis vint la proposition de reprendre les rênes de Suzuki. Cette nomination à la Direction générale de cet importateur est pour Ryad une réelle bouffée d’oxygène et la chance de reprendre la totale responsabilité d’une entreprise avec, cette fois-ci, une connexion directe avec l’actionnaire, ce qui permet d’agir dans l’intérêt unique de l’entreprise.
Au boulot, la stratégie de travail de Ryad se décompose en principes, missions, stratégies, moyens et harmonie.
«Mes principes sont clairs et l’humain est au centre de mon action. Ainsi, à notre client nous devons une expérience positive avec nos produits et services, et cela quels qu’en soient le prix et le coût. Cette même expérience positive, nous la devons à nos partenaires, à nos collègues et à nos actionnaires. À partir de ces principes, nous définissions nos missions qui sont en quelque sorte des grands objectifs de positionnement. Notre mission est d’atteindre 5% de parts du marché automobile marocain en 2013, avec comme étape d’atteindre les 5% du marché de VP CBU dès 2010. Ensuite, nous mettons en place tout l’arsenal stratégique pour y parvenir en déclinant un plan d’affaires cohérent et porté par tous, permettant une allocation des ressources humaines et matérielles optimales pour atteindre les objectifs fixés. Ensuite, il s’agit de jouer la partition avec cœur et harmonie en corrigeant nos erreurs, en adaptant nos équipes et nos instruments». Pour Ryad, «nous ne pouvons atteindre que ce à quoi nous aspirons réellement, quel que soit notre point de départ, que l’objectif soit un progrès ou une régression».
En dehors du travail, il n’y a pas meilleure activité pour Ryad que d’être entouré des siens, famille et amis. Il ne se rassasie jamais de voir sa femme et ses enfants évoluer et de partager une partie de leur vie. «J’aime cette immersion quotidienne dans la vie des miens où l’on parle punition, danse, piano, révolte, amours, vie, mort…»
Il faut dire que la devise ou le moteur qui anime Ryad dans cette vie est que «chacun a sa place dans notre société». Il définit son rôle comme étant de trouver la sienne et d’aider son épouse et ses enfants à trouver la leur et, au-delà, tous ceux à qui il peut apporter sa contribution avec conviction et détermination. «Ce qui me motive dans la vie, c’est l’amour des miens et aussi, il faut le reconnaître, la reconnaissance des autres».
Grand fan de foot, pour Ryad voir évoluer une grande équipe telle que le Barça ou l’Inter est une vraie source de plaisir et une grande école de management, de discipline et de courage. «Le sport et l’art n’ont malheureusement pas la place qu’ils méritent dans notre culture et je suis adepte d’introduire au moins 90 minutes de sport et 90 minutes de culture par jour à l’école. Le sport est une des plus grandes écoles de savoir-être qui est, à mon sens, beaucoup plus important que le savoir-faire».
Mais son vœu le plus cher est de pouvoir accompagner son épouse et ses enfants dans la réalisation de leur rêve aussi loin qu’il en aura la force. «Je souhaiterais aussi m’investir plus dans l’intégration professionnelle de toutes les catégories dites inadaptées ou handicapées. Enfin, j’aimerais pouvoir (et savoir) écrire».
Et s’il fallait réécrire son histoire ?
«Je pense que j’essaierais naturellement de gommer mes échecs, mes erreurs ou les offenses que j’ai pu commettre; mais je me dis finalement qu’on apprend plus des échecs et des erreurs que des succès et que tout cela fait partie de moi aujourd’hui. Cette question est délicate, mais tout bien réfléchi, je ne changerais rien».


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