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Entretien : Le sud s’est développé dix fois plus vite en dix fois moins de temps.
Publié dans Finances news le 25 - 03 - 2010

* Dans la région de Dakhla, le foncier n’est pas une contrainte à l’investissement.
* L’état de sous-développement légué par l’ex-puissance coloniale et la situation sociale des populations rendaient indispensable l’intervention des pouvoirs publics pour assurer des conditions de vie dignes aux citoyens de l’ensemble des provinces du Sud.
* La Fédération internationale de kite surf a déclaré officiellement Dakhla comme étape pour l’organisation de ce championnat.
* Point de vue de Hamid Chabar, wali de la Région d’Oued Eddahab-Lagouira, gouverneur de la province d’Oued Eddahab.
- Finances News Hebdo : Il y a à peine un an et demi que vous avez été nommé wali de la région Oued Eddahab-Lagouira. Peut-on savoir quels sont les chantiers que vous avez jugés prioritaires et auxquels vous vous êtes attelés pour une région en retrait telle que celle de Dakhla ?
- Hamid Chabar : Tout d’abord, il y a lieu de souligner que l’action menée actuellement s’inscrit dans le cadre de la consolidation de ce qui a été accompli par les pouvoirs publics depuis le retour de cette région à la Mère Patrie. C’est le cas pour l’ensemble des provinces du sud. Les réalisations sont colossales et on peut affirmer aujourd’hui, preuve à l’appui, que les provinces du sud se sont développées dix fois plus vite en dix fois moins de temps. Il faut communiquer sur cela, car on ne le fait pas suffisamment.
Concernant les chantiers jugés prioritaires et auxquels cette wilaya s’est attelée, il y a lieu de souligner qu’il a d’abord été procédé, en la matière, à l’identification des principales contraintes qui handicapent le développement de la ville de Dakhla qui, comme vous le savez, est une ville/région, en ce sens qu’elle abrite 90% de la population de la région d’Oued Eddahab Lagouira. Il s’agit là d’un constat important qui a été pris en considération dans l’élaboration d’une étude portant sur la mise à niveau urbaine de cette ville. Pourquoi une mise à niveau
urbaine ? Parce qu’une ville n’est pas seulement un chapelet de quartiers ponctués, ici et là, par certains équipements socio-éducatifs et quelques administrations, mais également un espace convivial. Il importe de développer l’attractivité de nos villes par un agencement plus esthétique, articulé sur la création d’espaces de détente et d’animation.
L’accent a été donc mis, dans l’étude en question, sur un certain nombre d’actions précises : créer des centralités, ouvrir la ville sur ses deux façades maritimes, réaménager les quartiers sous-équipés en permettant à la population d’avoir accès aux services de base, aménager des sens giratoires pour rendre la circulation plus fluide et revoir l’ensemble de la voirie. En un mot, la finalité étant d’agencer, en l’harmonisant, l’ensemble de l’espace urbain.
Ce plan, du reste ambitieux, ne pouvait s’opérer qu’en débarrassant la ville d’un grand bidonville dénommé Lahrayt, c’est chose faite depuis deux mois, et de transférer une décharge, occupant 22 hectares, à l’extérieur de la péninsule, c’est une opération qui démarrera incessamment.
L’on rappellera, à ce sujet, que la ville de Dakhla n’était, à sa récupération, en 1979, qu’un ensemble de casernes autour desquelles sont venus se greffer des quartiers insalubres. La ville tournait le dos à sa baie qui est sa principale richesse. C’est vous dire que l’on est parti de rien. L’objectif de l’actuel plan de développement urbain (PDU) est de permettre à la population de Dakhla de s’approprier sa ville, non seulement à travers un agencement judicieux et fonctionnel du tissu urbain, mais aussi en y développant des espaces d’animation qui, partant, ne manqueront pas de consacrer son attractivité.
Toujours dans le cadre de ce diagnostic, il importe de rappeler que Dakhla est une ville lointaine et qu’il fallait, dans un premier temps, la faire connaître à la fois auprès de nos concitoyens et des étrangers.
- F. N. H. : Et qu’avez-vous prévu dans cette perspective ?
- H. Ch. : Pour ce faire, Dakhla a son propre festival qui connaît, désormais, un rayonnement international et dont la 4ème édition a eu lieu fin février 2010.
D’autres activités y ont été organisées en 2009. Je citerais, à titre d’exemple, le championnat international de kit-surf, organisé en septembre 2009 et qui a eu pour cadre la baie de Dakhla, qui est considérée comme le 2ème sport international des sports de glisse.
Il est à préciser que c’est la première fois qu’une étape d’un tel championnat est organisée dans la région. La Fédération internationale de kite surf a déclaré officiellement Dakhla comme étape pour l’organisation d’un tel championnat. Il s’agit là d’un acquis considérable qui va contribuer fortement à la promotion de cette région.
D’autres manifestations, telles la rencontre internationale cinématographique et le semi-marathon de Dakhla sont désormais des rendez-vous annuels qui drainent de plus en plus d’intérêt vers cette jeune région.
Il ne suffit pas de faire connaître cette région, encore faut-il la doter de moyens de communication et de connexion avec le reste des villes du Royaume et, pourquoi pas, avec l’étranger. Dans ce cadre, nous avons établi une ligne aérienne avec Las Palmas et nous avons renforcé la connexion avec la ville de Casablanca. Nous sommes passés de deux à cinq vols par semaine par Boieng 737-800 et tous nos vols sont pratiquement pleins aujourd’hui. Le gros des visiteurs vient de l’étranger à Dakhla pour pratiquer le sport de glisse.
- F. N. H. : Lors de votre intervention, vous avez insisté sur l’implication de l’élément humain. Vous avez laissé entendre que sans cette implication tout développement économique est voué à l’échec. Quels sont les moyens que vous avez mis ou que vous comptez mettre en place pour remédier à cette carence ?
- H. Ch. : Il s’agit d’un processus culturel long et qui ne se réalise pas suite à une décision administrative. J’ai parlé tout à l’heure de la nécessité d’impliquer la population parce que je pars du constat que, sans son implication, toute action de développement est vouée à l’échec. Je dirais que l’élément culturel pourrait se révéler parfois un frein. Le développement économique a besoin des mentalités qui l’accompagnent. Je dirais que la particularité des provinces du Sud c’est qu’elles évoluent dans un cadre où l’Etat intervient massivement sur le plan social. Ceci a été amplement justifié lors de la récupération de cette région. L’état de sous-développement légué par l’ex-puissance coloniale et la situation sociale des populations rendaient indispensable l’intervention des pouvoirs publics pour assurer les conditions de vie dignes aux citoyens de l’ensemble des provinces du Sud.
- F. N. H. : Avez-vous une idée sur le timing du désengagement étatique ?
- H. Ch. : Je dirais que nous devrions poursuivre cette action pour que l’ensemble des citoyens s’implique dans la dynamique de développement engagée actuellement. L’Etat a fait beaucoup pour cette région. Comme je l’ai dit précédemment, la région est partie de zéro. Nous avons aujourd’hui l’un des aéroports flambant neuf du pays avec une aérogare dernier cri. Nous avons un port important qui contribue d’une manière fondamentale à l’économie locale. Nous avons un réseau routier très important. Je vous rappelle que la colonisation espagnole n’a pratiquement rien laissé. Il s’agit donc d’un effort colossal qui a été entrepris par les pouvoirs publics. Outre cet effort, il y a l’intervention de l’Etat sur le plan social par de multiples mécanismes. Tout cela se traduit par un effort financier important. Le taux de pauvreté dans cette région est le plus bas au niveau national, pratiquement 2%. La pauvreté n’existe pratiquement pas. L’action de l’INDH a permis de corriger cet aspect social et ce par le biais de multiples projets. L’Etat ne va pas se désengager de ses obligations sociales. La logique voudrait, à ce stade de développement des provinces de Sud, que l’intervention de celui-ci soit désormais ciblée et judicieusement orientée.
- F. N. H. : L’eau est une véritable problématique au sein de la région.
Est-ce que vous ne craignez pas que ce problème impacte fortement des secteurs stratégiques sur lesquels compte Dakhla mais qui sont fortement consommateurs d’eau, en l’occurrence le tourisme, l’agriculture et l’élevage ?
- H. Ch. : Oui et non. Parce qu’on ne connaît pas encore les résultats et les conclusions de l’étude qui est en cours de finalisation pour pouvoir statuer d’une manière définitive sur la nature de la nappe souterraine et son importance. Je précise que la ville de Dakhla est la seule ville du sud du Royaume qui est alimentée par des forages connectés à une station de traitement.
Maintenant, avant de nous engager davantage dans l’agriculture qui consomme beaucoup d’eau, il faudrait peut-être attendre les conclusions de l’étude pour pouvoir statuer sur la nature de la nappe. Ceci est important, je pense que la priorité devrait être donnée à l’alimentation en eau potable de la population avant de songer à l’agriculture.
- F. N. H. : Dans le même sillage des subventions, la région bénéficie d’importantes incitations fiscales. Mais cela ne lui a pas permis pour autant de se hisser au rang de développement de certaines régions fortement imposées ?
- H. Ch. : Vous savez, nous sommes au début d’un processus. La région draine beaucoup d’intérêts et commence à attirer beaucoup d’investisseurs.
Evidemment, avec le CRI, nous sommes en train d’évaluer ces « manifestations d’intérêt» et ne retenir que les projets sérieux. Parce qu’il y a des gens qui viennent sonder un peu sans manifester d’engagement résolu. Notre système est incitatif et, en plus, nous n’avons pas de problème de foncier dans la mesure où le foncier relève du domaine privé de l’Etat. Ceci est un avantage considérable. Il y a des projets d’envergure qui vont démarrer, notamment dans le domaine du tourisme.
Donc, le foncier n’est pas une contrainte à l’investissement. Les gens sont conscients qu’il y a d’abord la beauté, l’attrait de la région, l’accompagnement de l’Etat. Donc, je pense que l’investisseur sérieux ne lésine pas quand il est déterminé à investir.


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