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CDVM / Samir : Le grand raté de Boulaknadel !
Publié dans Finances news le 07 - 01 - 2010

* Huit mois après sa demande d’explications, le CDVM inflige à la Samir … un avertissement.
* Le patron du CDVM, en ne sanctionnant pas à la mesure de l’acte posé par le raffineur, rate une belle opportunité de donner un signal fort au marché.
* L’impunité qui règne sur la place boursière autorise, toujours, toutes les dérives. Dommage.
Le marché boursier marocain bruit de faits parfois anecdotiques. Le dernier en date concerne les récents développements de l’affaire Samir, si tant est qu’on peut la qualifier ainsi. Coup d’œil dans le rétroviseur. Car les dates sont importantes.
• Mi-avril 2009. Dans un article d’analyse intitulé «Le CDVM épingle la Samir», Finances News Hebdo met en orbite les manquements du raffineur par rapport aux dispositions légales et dispositions de l’article 3 de la circulaire du CDVM n° 05/05 relative à l’information importante. Il s’agissait, en fait, de l’alerte sur profit (Profit warning) que s’est abstenue de lancer la Samir qui a pourtant dégagé un résultat d’exploitation négatif de 810 MDH et un résultat net négatif de 1,2 milliard de DH. Alors que dans la note d’information relative à l’emprunt obligataire initiée à fin décembre (période où les comptes relatifs à l’exercice en question étaient pratiquement clôturés), les prévisions de résultat pour l’exercice 2008 faisaient ressortir un résultat d’exploitation de 1.013 MDH (+106%) et un résultat net consolidé de 526 MDH.
Une «demande d’explications concernant les résultats publiés au titre du second semestre 2008» est alors adressée à la Samir par le CDVM.
• Jeudi 24 décembre 2009. Finances News Hebdo revient à la charge et publie un article intitulé «Bourse : Ces affaires non classées !». Un article dans lequel nous nous interrogions sur les suites qu’allaient prendre «l’affaire GSI Maroc», la «demande d’explications» adressée il y a plusieurs mois à la Samir par le CDVM, ou encore l’enquête en cours concernant les franchissements de seuil qui ont précédé l’opération de fusion Matel PC- Distrisoft où il y a de fortes présomptions de délit d’initié (www.financesnews.ma).
• Lundi 28 décembre 2009. Le gendarme du marché adresse un avertissement à la Samir. Motif : elle «n’a pas procédé à la mise à jour, dans les délais requis, de la note d’information relative à l’émission obligataire, objet du visa du CDVM n° VI/EM/053/2008 en date du 18 décembre 2008, au sujet de la dégradation de sa situation financière eu égard aux prévisions communiquées dans ladite note d’information, et ce en raison de la persistance de la tendance baissière des cours du pétrole sur le marché international et son impact sur la valeur des stocks de la SAMIR».
• Mardi 29 décembre 2009. Le raffineur se fend d’un communiqué de presse au titre révélateur : «Décision de révision de la prime de risque relative à l’émission obligataire de la Samir». Le contenu est tout aussi révélateur. En voici un extrait : «Cette note d’information présente dans sa partie «Perspectives», une estimation des résultats de l’année 2008 tenant compte d’hypothèses optimistes quant à l’évolution des cours du pétrole brut sur les marchés internationaux.
La tendance baissière des cours du brut ne s’étant pas renversée avant la date du 31 décembre 2008, les résultats définitifs ont présenté un écart important par rapport à ceux annoncés dans la note d’information susmentionnée.L’importante variation des résultats est due à la méthode de valorisation des stocks en fin d’année et ne remet pas en cause la capacité financière de la Samir à faire face à ses engagements vis-à-vis de ses créanciers. La Direction générale de la Samir tient à préciser à ces investisseurs le caractère non intentionnel et non prémédité de la non actualisation des perspectives publiées dans la note d’information précitée et décide de porter le taux facial des obligations émises en décembre 2008 de 5,90% à 6,00%, soit une révision à la hausse de la prime de risque de 10 points de base. Ainsi, l’ensemble des coupons servis au titre de l’émission obligataire susmentionnée, seront rémunérés au taux facial de 6,00%».
Voilà pour les faits.
Ridicule !
Le déroulement, ou plutôt le dénouement de cette affaire appelle néanmoins à la réflexion. Commençons donc par la fin : la réaction de la Samir face à la «sanction» du CDVM.
L’avertissement du gendarme du marché devait simplement (et obligatoirement) être publié sur le site Internet de la Samir. Pas plus. Mais le raffineur est allé beaucoup plus loin, en décidant, en vertu des pouvoirs conférés au Directeur général par le Conseil d’Administration, de réviser à la hausse la prime de risque liée à l’émission obligataire. De mémoire d’homme, dans l’histoire récente du marché boursier, c’est la première fois que cela se produit. Alors, qu’est-ce qui légitime cette subite générosité ? La Samir estime-t-elle avoir effectivement lésé les investisseurs en ne leur donnant pas les bonnes informations ?
Pour un analyste de la place, «la réaction de la Samir est plutôt un signe d’aveu d’une faute grave. Et le choix des investisseurs aurait été certainement différent s’ils avaient eu la bonne information au bon moment, car ils ont souscrit à l’émission obligataire sur la base d’informations fausses». Aussi, se demande-t-il «sur quelles bases la décision de rajouter 10 points de base à la prime de risque initiale a-t-elle été arrêtée» ?
Autres questions importantes : pourquoi avoir attendu si longtemps pour réagir ? Si le gendarme du marché ne l’avait pas sanctionnée, la Samir aurait-elle été si généreuse ?
De toute évidence, la décision de relever la prime de risque semble étroitement liée à la réaction du CDVM. Une réaction que notre analyste juge «ridicule». «La sanction du CDVM est risible par rapport au préjudice éventuel subi par les investisseurs et, par ricochet, le marché dans sa crédibilité; car il y avait là une formidable opportunité de punir pour l’exemple un contrevenant aux règles ». «Dès lors que la faute a été flagrante et bien déterminée, qu’importe le poids économique et financier de la Samir, la sanction devait être à la hauteur, quitte à suspendre le raffineur de la cote pour un ou deux ans», précise-t-il. Et de poursuivre que «l’attrait et la reprise du marché boursier ne tiennent pas aux carottes fiscales, road-show et autres avantages à octroyer aux entreprises potentiellement cotables. Le marché souffre plutôt d’un manque cruel de crédibilité et de transparence. C’est ce qui plombe la place, et les choses, malheureusement, ne s’améliorent pas».
Il faut, à cet égard, relever que pour la première grande décision qu’il avait à prendre depuis qu’il est à la tête du CDVM, Hassan Boulaknadel avait là une véritable opportunité de donner un signal fort au marché. Un marché infecté par les miasmes de la duplicité. Un marché où, pour préserver les privilèges d’une minorité, on n’hésite pas à sacrifier les intérêts de la majorité. Un marché où l’impunité autorise toutes les dérives.


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