* Le plan durgence qui cible des secteurs prioritaires semble ignorer dautres à forte valeur ajoutée qui, daprès leurs représentants, commencent à ressentir les effets de la crise. * Malgré des intentions gouvernementales louables, beaucoup de professionnels déplorent la difficulté daccéder aux avantages prévus dans le plan durgence. * Les nouveaux efforts promotionnels devraient plutôt aller de pair avec la sauvegarde et la valorisation des secteurs porteurs. E n minimisant les impacts sur notre économie dune crise financière aussi importante, les pouvoirs publics ont été pris de court. Le temps quils prennent conscience que, par un effet de contagion, des secteurs stratégiques allaient être affectés, la crise sest bel et bien installée. Et cest un peu dans la précipitation quun programme durgence a été présenté, un peu tardivement selon certains, et incomplet selon dautres. En effet, si la date reconnue mondialement de léclatement de cette crise est septembre 2008, il nous a fallu attendre plusieurs mois avant que les axes de la stratégie durgence soient in fine dévoilés au mois de février dernier. Le Maroc a-t-il trop attendu ? «Non, il sest obstiné dans cette idée de se voir épargné par la crise, mais a fini par réagir. Certes, un peu tardivement mais pas trop tard. Cela dit, les mesures durgence sont loin dêtre parfaites puisque certains secteurs ny voient pas une réponse adéquate à leurs besoins», explique le patron dune unité plasturgique. Une industrie transversale qui concerne plusieurs secteurs à la fois. La plasturgie touche le BTP, le médical, lautomobile, lemballage Et donc nécessairement les secteurs qui ont été touchés par la crise internationale impactent dune manière ou dune autre lindustrie de la plasturgie. En effet, des secteurs ont vite senti la crise, dautres ne se sont sentis concernés que plusieurs mois plus tard. Au Maroc, à linstar dautres pays, les industries qui ont été touchées dans un premier temps par les soubresauts de la crise financière sont essentiellement le textile-habillement, les composants automobiles et le cuir. Les unités prises séparément ont mis en place des plans stratégiques afin de minimiser les dégâts dune faible demande étrangère, mais qui, au demeurant, sont restés sans grande portée. Parmi les mesures du programme durgence peaufiné par le gouvernement, on peut citer, en premier, celle à caractère social qui porte sur la prise en charge par lEtat de 100% des cotisations sociales à la CNSS (correspondant à la part patronale) pour les entreprises exportatrices des secteurs concernés. Cette mesure a pour leitmotiv de préserver lemploi dans un contexte où les licenciements sont devenus le mot dordre. Le second volet concerne le soutien financier. Il se résume en deux dispositifs : un fonds de garantie en vertu duquel lEtat se portera garant vis-à-vis des banques, à travers la CCG, à hauteur de 65% des crédits dexploitation pour le financement du besoin en fonds de roulement, avec un plafond de 9 MDH. Le second mécanisme concerne le report par les banques des échéances des crédits à moyen et long termes au profit des entreprises en difficulté. Le troisième volet relatif à lappui commercial à lexport a été décliné en mai après plusieurs mois dattente. Il englobe 7 sous-mesures dont la majorité est en relation avec lassurance export. La société marocaine dassurance à lexport a ainsi décidé de réduire de 3 à 1% la prime de lassurance foire tandis que lassurance prospection augmentera de 50 à 80% la quotité garantie de cette même assurance et réduira également la prime de lassurance crédit commercial à 0,3%. Dès le départ, les avis étaient mitigés sur la portée dun tel programme. Certains ont applaudi les mesures contenues dans ledit programme; daucuns estiment que ce nest pas suffisant et dautres, par contre, prétendent que les critères exigés sont drastiques essentiellement dans un contexte de morosité. «Le gouvernement avait, pendant un certain moment, fait la sourde oreille parce que, selon lui, ledit programme était destiné exclusivement aux entreprises éprouvant des difficultés en lien direct avec la crise internationale», souligne un membre de la CGEM. Ceci laisse entendre que les entreprises qui ne se portaient pas bien avant le déclenchement de la crise ne devaient pas compter sur le programme durgence. «Nous déplorons également que laccès à ces avantages soit sanctionné par des conditions assez difficiles à remplir en temps de crise», conclut-t-il. Dautres secteurs mis à mal Par ailleurs, ce programme na pas laissé insensibles certains secteurs qui nont pas été concernés par le programme durgence et qui ressentent également les effets de la crise, tels que la pêche, le BTP et dans une moindre mesure, la pharmacie. Pourquoi les pouvoirs publics nont-ils rien prévu pour des secteurs qui ont leur poids dans léconomie nationale ? Comme la expliqué H. El Malki à loccasion dun séminaire sur les enjeux du programme durgence, «cest un plan durgence qui est fondamentalement conjoncturel et très limité. Il concerne trois secteurs. Cest aussi un plan qui a le mérite dexister mais il ne répond pas aux interrogations de plus en plus soulevées par un grand nombre dopérateurs économiques». Même son de cloche du côté dun autre entrepreneur qui déplore que ces mesures conjoncturelles ne prennent pas en considération les problèmes structurels dans lesquels «pataugent» les secteurs concernés. Quelques mois après le programme durgence, les pouvoirs publics ont remarqué que la balance commerciale navait pas cessé de se détériorer. En vue dy remédier, un plan national pour le développement et la promotion des exportations a ainsi vu le jour. Il sagit de «Maroc Export Plus». Ce programme, attendu depuis la nomination du gouvernement El Fassi, a enfin vu le jour en mai dernier se mettant, lui aussi, au goût du jour. Puisquil sétend sur le long terme tout en prévoyant également des mesures durgence. Le principe est le suivant : les engagements internationaux et les options libérales choisies par notre pays ne nous permettent pas dagir sur notre balance commerciale sans une politique agressive de développement des exportations. Maroc Export Plus cherche ainsi à définir une feuille de route pour canaliser leffort public en matière de promotion des exportations, essentiellement en faveur des secteurs prioritaires et dans les principaux marchés identifiés. Cette stratégie se propose de tripler les exportations de biens et services hors phosphates et dérivés en 10 ans entre 2008 et 2018, avec un doublement à lhorizon 2015. Toujours est-il que les secteurs ciblés sont essentiellement les mêmes que ceux du programme durgence concocté en février dernier. Il sagit, selon les dires de S. Benabdallah, Directeur du CMPE, de secteurs qui présentent un fort potentiel à lexport. Une initiative de promotion louable, mais encore faut-il préserver le nerf de la guerre quest lindustrie nationale !