* LAdministration fiscale projette détendre la population imposable aux agences de bassins dans son périmètre. * Le prélèvement de la TVA et de lIS sur les redevances perçues par les agences va permettre de noyer ces impôts dans le budget général de lÉtat. * Ces ressources vont certainement être déployées dans des investissements non hydrauliques. Ceci déroge au principe de la fiscalité affectée. Les travaux du Conseil mondial de leau ont pris fin en Turquie sur une note pessimiste quant à lavenir de lor bleu. En effet, les ressources hydriques deviennent de plus en plus rares et suivent une distribution de poisson, alors que les besoins augmentent de façon exponentielle. Lalignement de loffre sur la demande nécessite des actions sur les deux grandeurs en agissant sur les variables qui animent la dégradation de la ressource. Parmi les recommandations du Conseil, on note laccélération des investissements pour la mobilisation des ressources nouvelles et le traitement des eaux usées. Le Maroc, Etat avisé, a poursuivi une politique audacieuse en la matière. La dernière des actions déployées a consisté en le renforcement de larsenal juridique attaché au secteur par la promulgation de la loi sur leau. Pour atteindre ces objectifs et renforcer le cadre institutionnel existant en matière de gestion de leau, la loi sur leau crée des agences de bassins, établissements publics dotés de la personnalité morale et de lautonomie financière. Ces agences ont pour mission dévaluer, de planifier et de gérer les ressources en eau au niveau des bassins hydrauliques. Elles peuvent accorder des prêts, aides et subventions à toute personne engageant des investissements daménagement ou de préservation des ressources en eau. Leurs ressources sont constituées des redevances recouvrées auprès des usagers et utilisateurs de leau, des emprunts, des subventions, des dons... Ainsi, grâce à la souplesse dans la gestion et la prise de décision dont peuvent disposer les agences de bassins, tous les usagers de leau dun même bassin peuvent bénéficier du soutien financier et de lassistance technique nécessaire à leurs opérations relative à lutilisation du domaine public hydraulique. Sur le plan fiscal, les agences de bassins hydrauliques ne paient pas dimpôts. Cette décision a pour effet dencourager ces agences à investir intensément dans le domaine de leau qui reste très problématique. Aujourdhui, cette situation semble un peu compromise. Quid du principe leau paie leau ? La logique subjacente à la création des agences est la concrétisation du principe de la fiscalité affectée. Ce principe crée un circuit court entre le contribuable et le bénéficiaire. Ainsi, les redevances collectées dans un bassin sont réinvesties dans ce même bassin par le biais de lagence. Un autre principe a été respecté lors de la création des agences de bassin, il sagit de celui de «leau paye leau». En dautres termes, les redevances provenant de leau doivent être obligatoirement allouées au secteur de leau. Aujourdhui, nous apprenons de source sûre quune étude est en cours de finalisation sur une éventuelle fiscalisation des agences de bassins qui seraient soumises à la TVA (7%) et à lIS (30%). Ces impôts vont ainsi effriter les redevances collectées auprès des redevables qui agissent sur la ressource en la prélevant ou en la transformant. Pis encore, cette imposition risque davoir un effet négatif sur le rôle de ces entités hydrauliques. Or, nul ne peut ignorer que leur rôle est stratégique en matière de mobilisation des ressources pour la réalisation des projets associés à leau. En dépit de toutes ces contraintes et de ces principes, il paraît que lAdministration fiscale campe sur sa position détendre la population imposable et compte ainsi intégrer les agences de bassins dans son périmètre. Cette action contribuera à priver les agences de ressources financières, combien rares, et de déroger au principe de la fiscalité affectée. En effet, prélever la TVA et lIS des redevances se traduira par une migration des fonds du budget du bassin au budget général. Cette migration va permettre de noyer les redevances dans les ressources de lEtat qui seront, sans aucun doute, affectées à des projets sans rapport avec le secteur de leau. La fiscalisation des agences doit obéir à des valeurs et respecter les principes en vigueur. Elle ne doit pas, à notre sens, toucher aux équilibres financiers et laisser empirer les équilibres environnementaux.