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Entretien avec Rachid Lazrak, fiscaliste : Les dépenses fiscales en question
Publié dans Finances news le 14 - 09 - 2006

* A l'instar de l'exercice 2005, l'année 2006 connaîtra l'élaboration d'un «rapport relatif aux dépenses fiscales» qui accompagnera la Loi de Finances 2007.
* De quoi s'agit-il ? Quels sont les motifs ? Autant de questions auxquelles Rachid Lazrak, fiscaliste, va apporter des éléments de réponse.
Finances News Hebdo : L'année dernière, le gouvernement marocain a annexé à la Loi de Finances 2006 un «rapport relatif aux dépenses fiscales» et a promis de faire la même chose cette année. De quoi s'agit-il au juste ?
Rachid Lazrak : Comme vous le savez, le Maroc connaît de très nombreuses dérogations fiscales qui concernent tous les secteurs d'activités, toutes les catégories d'impôts (IS, IR, TVA, droits d'enregistrement, impôts locaux, droits de douane, TIC) et qui prennent des formes diverses (exonérations totales, exonérations partielles, réductions, abattements, taux préférentiels et même des régimes fiscaux dérogatoires comme l'exportation indirecte en matière minière).
Cette situation résulte d'un processus historique qui date des années soixante où le gouvernement a essayé de mettre en place des mesures incitatives en matière d'encouragement des investissements marocains et étrangers.
L'aboutissement de ce processus a été la promulgation de la Charte des investissements le 8 novembre 1995 pour une période de dix ans, laquelle charte comporte trois caractères :
- la généralisation, en ce sens qu'elle s'applique à tous les secteurs, à l'exception du secteur agricole et certaines activités énumérées limitativement par la Loi de Finances 1996 (agences immobilières, établissements stables des sociétés étrangères, établissements de crédit, sociétés d'assurances et de réassurances, CDG et Bank Al-Maghrib) ;
- l'homogénéité, dans la mesure où les mêmes avantages sont accordés à toutes les entreprises industrielles, commerciales et de services ;
- l'automaticité, en ce sens que les avantages sont accordés de façon automatique, sans autorisation préalable.
En plus des avantages prévus par la Charte et intégrés dans la Loi de Finances transitoire de 1996, d'autres mesures sont venues s'y ajouter, soit dans les Lois de Finances, soit dans des textes spécifiques. Heureusement, le livre d'assiette et de recouvrement, objet de la Loi de Finances 2006, a intégré l'ensemble des exonérations fiscales et les a classées par catégorie d'impôts.
Seulement, dix ans après la promulgation de la charte des investissements, il a été constaté que ses objectifs n'ont pas tous été atteints.
Ainsi, si l'automaticité des avantages ne pose pas de problème particulier, sauf peut-être pour l'habitat social où l'on a constaté que certains promoteurs ont renoncé aux conventions signées avec l'Etat, l'objectif de la généralité n'a pas été atteint en ce sens que, depuis 1996, de nombreux avantages ont été accordés sous la pression de lobbies et d'intérêts corporatistes.
C'est dans ce contexte que, au mois d'octobre 2006, la Direction générale des Impôts a établi et présenté au Parlement, comme annexe au projet de la Loi de Finances pour l'année budgétaire 2006, un rapport sur les dépenses fiscales.
Ce rapport vise à faire un inventaire des dérogations fiscales qui prennent la forme d'exonérations totales ou partielles, de réduction d'impôts, d'abattements et de taux préférentiels.
Au niveau de l'intitulé du rapport, l'administration fiscale l'explique par le fait que «les dérogations fiscales » constituent un manque à gagner pour le Budget de l'Etat et que leur effet est comparable à celui des dépenses publiques. C'est la raison pour laquelle ces dérogations sont appelées «dépenses fiscales», «subventions fiscales» ou «aides fiscales».
En fait, en publiant ce rapport, le gouvernement marocain n'a fait que suivre l'exemple d'un certain nombre de pays comme les Etats-Unis d'Amérique qui ont été les premiers à rédiger des rapports annuels sur les dépenses fiscales (tax expenditures), depuis 1968.
A partir de cette année, la plupart des pays de l'OCDE suivront la même démarche.
En France, la notion de dépenses fiscales a été étudiée dès 1979 par le Conseil des Impôts (devenu depuis 2005 «Conseil des prélèvements obligatoires») ; cette notion a été adoptée par le Parlement dans le cadre de la Loi de Finances de 1980.
Dans un rapport volumineux, le Conseil des Impôts a établi en septembre 2003 un rapport au Président de la République sur «la fiscalité dérogatoire» pour un réexamen des «dépenses fiscales».
Il faut signaler, d'après l'administration fiscale, que la publication des données relatives aux dépenses fiscales est imposée par la loi dans au moins neuf pays de l'OCDE.
F. N. H. : Quelles sont, d'après vous, les raisons qui ont poussé l'administration à élaborer le rapport sur les dépenses fiscales ?
R. L. : Il y a, à mon avis, deux catégories de raisons qui ont poussé l'Administration à élaborer un tel rapport : des raisons objectives et celles propres au Maroc :
1- Les raisons objectives
Il s'agit d'une démarche suivie par de nombreux pays (dont ceux de l'OCDE) où il est normal que l'on cerne, avec le maximum de précision, la nature et le nombre des «dérogations fiscales» et le «manque à gagner» qu'elles représentent pour l'Etat ;
2- Les raisons propres au Maroc
• Comme nous l'avons précisé, le Maroc connaît de nombreuses dérogations fiscales et il était souhaitable de faire l'inventaire de tous ces avantages, notamment par catégorie d'impôts.
• Le deuxième objectif est d'apprécier le coût budgétaire de ces avantages, afin de réaliser une transparence financière, ainsi qu'une meilleure rationalisation en matière d'allocation des ressources ;
• D'après les termes du rapport, celui-ci a été établi dans le cadre du programme d'appui à la réforme fiscale, financé par l'Union européenne. Cette réforme prévoit la modernisation du système fiscal par la consolidation des recettes fiscales et l'élargissement de l'assiette.
• Le troisième objectif vise l'augmentation des recettes fiscales au moment où les recettes des privatisations commencent à se tarir, où les droits de douane iront en diminuant avec l'entrée en vigueur des accords de libre-échange et la mondialisation et où les dépenses publiques augmentent avec, notamment, la flambée du prix du pétrole.
F. N. H. : Est-ce que vous pensez que les dérogations fiscales sont la solution idoine pour développer une branche d'activité et pour améliorer l'investissement ?
R. L. : Il me semble qu'il est temps de placer le débat des exonérations fiscales dans son propre contexte et de lui donner sa véritable signification.
En effet, il est temps d'admettre, une fois pour toutes, que dans tous les pays du monde il y a des exonérations fiscales; et ces pays ont instauré ces exonérations pour des raisons qui leur sont propres. Au Maroc, le tableau 5 relatif aux dépenses fiscales traite de la ventilation des mesures dérogatoires et permet de constater que toutes les mesures fiscales ont été prises pour atteindre des objectifs précis : sur 337 mesures inventoriées, 31 ont été prises pour promouvoir le social, 30 pour faciliter l'accès au logement, 24 pour développer le secteur agricole, 24 pour encourager l'investissement, 22 pour promouvoir la santé, 21 pour mobiliser l'épargne...
Donc, à partir du moment où l'on conçoit que l'impôt n'est pas seulement un moyen de procurer à l'Etat des recettes, mais qu'il doit aussi être perçu comme un instrument de développement économique et social, il devient évident qu'il y ait des dérogations fiscales.
En France, le Président Chirac s'est personnellement impliqué quand il a fallu maintenir, au niveau de la Commission européenne, le taux réduit de TVA de 5% pour la réfection des habitations. Aujourd'hui, l'un des vœux du gouvernement français est de pousser les autorités européennes à l'autoriser à baisser le taux de la TVA pour la restauration.
C'est dire qu'il ne faut pas condamner le principe des exonérations fiscales, surtout pour des pays comme le nôtre qui cherchent à développer les investissements nationaux et étrangers.
Aujourd'hui, la mondialisation est aussi fiscale, et il y a une course d'un certain nombre de pays à instaurer la « flat tax » libératoire de tous les impôts.
Donc, ce qui est en cause, ce n'est pas la quantité d'exonérations fiscales accordées, mais leur nature et surtout leur impact sur le développement économique et social.
En résumé, je ne pense pas qu'il y ait lieu de remettre en cause le principe des avantages fiscaux pour atteindre des objectifs précis. Par contre, il est temps d'entreprendre une réflexion sur l'impact de ces avantages, les objectifs atteints, leur coût pour le Trésor public et surtout la possibilité de leur redéploiement d'un secteur à un autre.
Par ailleurs, il est clair que le développement d'une branche d'activité ou la promotion des investissements ne dépend pas uniquement des dérogations fiscales.
L'attrait des investissements requiert la réunion de nombreuses conditions et nécessite la mise en place d'un certain nombre d'instruments, et la politique fiscale doit constituer l'un de ces instruments, mais sans être exclusif.
F.N.H. : A la lumière de ce que vous avez dit, quelle appréciation faites-vous du rapport sur les dépenses fiscales, tel qu'il est présenté ?
R. L. : Tout d'abord, le fait d'avoir établi ce rapport constitue, à mon avis, une initiative tout à fait louable qu'il faut mettre à l'actif de l'administration fiscale qui, depuis quelques années, entreprend un travail tout à fait remarquable.
Cependant, cette initiative comprend trois sortes de limites :
1°) On aurait aimé que ce rapport ne soit publié qu'à la suite d'une étude de l'impact des exonérations sur le plan économique et social, car je le répète, ce qui est en cause, ce n'est pas la nature et la quantité des exonérations, mais leur impact par rapport aux objectifs assignés ;
2°) On aurait aimé que la publication de ce rapport soit accompagnée par des explications de la part de l'administration fiscale, et ce pour éviter de créer une quelconque appréhension de la part de certains opérateurs économiques ;
3°) A partir de l'inventaire fait dans ce rapport, on aurait aimé avoir des propositions précises de la part de ses rédacteurs, car ce qui importe ce n'est pas l'inventaire lui-même mais les conséquences à tirer ;
4°) Il nous semble que ce travail, si louable soit-il, ne peut être réalisé par la seule administration fiscale, mais par un organisme qui regrouperait les représentants de tous ceux qui sont concernés par les exonérations fiscales.
A ce propos, je lance un appel pour la création d'un « Conseil supérieur des impôts», à l'instar de ce qui existe dans certains pays, notamment en France. Cet organe indépendant aurait un rôle d'analyse et de propositions dans le domaine de la fiscalité. L'objectif de cette création est clair : institutionnaliser la politique de concertation, déjà mise en place depuis quelques années.


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