La nouvelle : la Commission de l'Enseignement et des Affaires culturelles et sociales à la Chambre des conseillers a adopté, lundi dernier, à l'unanimité, une proposition de loi relative à l'interdiction de fumer et de faire de la publicité et de la promotion pour le tabac dans les lieux publics. Tout autant, la vente de tabac aux mineurs ainsi que la consommation de narguilé dans les lieux publics est interdite. Ce texte est associé à plusieurs mesures répressives, dont notamment le droit donné aux fumeurs passifs de faire appel à la police judiciaire pour établir un procès verbal contre les contrevenants et de demander des dommages et intérêts pour le préjudice subi. Voilà pour linfo. Maintenant, il convient de la décortiquer. Ma conviction : Primo, linterdiction de fumer dans les lieux publics tardera à prendre la forme que le voudraient les pouvoirs publics. Simplement à cause de ces consciences rebelles et indisciplinées qui fument dinintelligence. Et qui voudront polluer lespace public, histoire de braver linterdit. A lentame de lapplication de la loi, il faudrait donc sattendre à une guerre des tranchées entre ceux qui puent le tabac à outrance, adorent tousser et aiment se voir les poumons noircis et rongés à coups de nicotine, et ceux qui vont ségosiller à vouloir les empêcher de fumer. Le droit de fumer vous donne-t-il le droit denfumer les autres ? Le droit de ne pas fumer vous donne-t-il tout autant le droit dempêcher les autres de fumer ? Je vous laisse répondre. Secundo, papa ne pourra plus envoyer son fiston mineur lui chercher des clopes chez le buraliste du coin. Encore faut-il que ce dernier sassure que le client est mineur. Cela, forcément, en ne se fiant pas au faciès, car la mal-bouffe fait quon ingurgite maintenant tellement de conneries que tous les gosses sont devenus précoces. Ce qui sous-tend une chose : il faut désormais se balader avec sa CIN quand on veut acheter des clopes. On ne sait jamais. Tertio, je reste très sceptique quant aux mesures répressives. Dune part, dès lors quapparaissent de nouvelles lois, la corruption sinvite vicieusement. Dautre part, jimagine déjà un contrevenant se faire dire : «chouf, si tu fumes, jappelle la PJ». Et lui, de répondre, tout en lallumant : «vas-y, je tattends tout tranquillement». Néanmoins, comme on le dit si bien, il faut un début à tout. Cette loi a le mérite dexister. Et, aujourdhui, il ne faudrait pas rester indifférent à cet univers qui cache derrière un épais nuage de fumée une véritable question de santé publique. Laquelle légitimerait, peut-être, quon copie sans vergogne sur la France (une fois nest pas coutume) pour généraliser linterdiction de la cigarette à tous les espaces de rencontre (cafés, restaurants, pubs ), et, pourquoi pas, au sein des entreprises. La société de crédit à la consommation Eqdom sest déjà engagée sur cette voie à travers son initiative «Eqdom sans tabac». Reste que si toutes les entreprises sinscrivaient dans cette voie, jimagine tous ceux qui, en plein hiver, se gèleraient les noisettes rien que pour pouvoir en griller une. Moi en premier. Cest quand même terrible de voir ce que nous sommes capables de sacrifier pour quelques taffes. Pas étonnant alors de constater que ceux qui ont arrêté de fumer sen vantent fréquemment. Comme sils ne se rendaient pas service.