* Après cinq longues années de hausse continue, le marché boursier entre dans une dure phase de correction. * Le Masi a perdu en seulement trois séances de cotation quelque 4 points, ramenant sa performance annuelle sous les 6%. Plus de 24 milliards de dirhams sont partis en fumée ! * Cherté de la place et retrait massif des investisseurs étrangers sont les deux raisons invoquées par les professionnels du marché pour expliquer la situation actuelle. Le marché se casse la gueule. Et cette fois-ci, cest la bonne. Entre la séance du lundi et celle du mercredi, lindice de toutes les valeurs cotées a perdu plus de 4 points, ramenant sa performance annuelle à moins de 6%. Lundi, ce sont pas moins de 47 valeurs qui ont baissé, contre seulement 5 valeurs en hausse. Le Masi a perdu 2,07% en cours de séance (vers 13 heures), avant de se reprendre pour clôturer sur une contre-performance de 1,71%. Même scénario le jour suivant. Tiré vers le bas par quelque 30 valeurs, dont une bonne partie de big caps, le Masi perd près de 1%. À lheure où nous mettions sous presse, mercredi dans laprès-midi, le Masi affichait une perte de lordre de 0,94% et sa performance annuelle tournait autour de 5,64%. Au total, ce sont plus de 24 milliards de dirhams de capitalisation qui sont partis en fumée En seulement trois jours de cotation ! Est-ce le début de la fin ? Quest-ce qui a déclenché ce fort mouvement de correction ? «Cest une baisse attendue depuis longtemps. Une sorte de baisse technique après une longue série de saisons haussières», explique Mhamed Skalli, Président Directeur Général de Dar Tawfir. Même son de cloche chez la nouvelle coqueluche du secteur, Integra Bourse. Wydade Wardi, analyste financier chez le broker tunisien, estime que «cette correction est une suite logique à la série de baisses qui a débuté en mars». Un avis partagé par le responsable analyse technique chez TPS FIN qui croit, pour sa part, que «laccélération du cycle baissier était prévisible». Selon lui, tous les indicateurs techniques le prédisaient et ce depuis le 25 juin dernier. Le marché a en effet cassé, à cette date, le support sur lequel il rebondissait à chaque fois quil flanchait. «Nous avons su immédiatement, ce jour-là, que cétait la rupture définitive avec le canal haussier», martèle-t-il. Trop cher, le marché flanche Il faut dire, en effet, que cette situation de morosité dure depuis la mi-mars Et elle na fait que saccélérer ces jours-ci. En effet, la Bourse affichait le 13 mars une performance annuelle de 17,6%, soit son plus haut niveau de lannée. Depuis, les indices nont cessé de baisser et les petites hausses qui se sont produites nont pas réussi à renverser la tendance. Résultat : une croissance ramenée à moins de 10% en 8 mois (vers fin août). Et cette fois-ci, ce nest pas par manque de nouveau papier, comme on se plaît à le répéter. Depuis le début de lannée, en effet, il y a eu cinq nouvelles recrues à la cote casablancaise. Même lintroduction en Bourse dAlliances, portant sur un montant plus que respectable (2 milliards de dirhams), na pas pu redresser la situation. La valeur a certes gagné plus de 70% depuis sa première cotation le 17 juillet, mais cette évolution na eu aucun effet sur le marché. «Le marché était comme un patient cliniquement mort. Le patient réclame aujourdhui son droit et ne veut plus être maintenu en vie artificiellement», «métaphorise» Adnane Cherkaoui de TPS FIN. En effet, la place casablancaise a trop pris ces cinq dernières années. Et cela ne peut durer éternellement. Une correction est alors tout indiquée. Elle serait même salvatrice. Puisque elle aurait au moins le mérite de faire revenir le marché à des niveaux de valorisation on ne peut plus raisonnables. «La Bourse de Casablanca est très chère par rapport aux autres Bourse arabes et mondiales», estime en effet Mhamed Skalli. Le PER du marché casablancais (rapport entre les cours boursiers et les bénéfices par action) tourne actuellement autour de 28, selon les chiffres de lagence Bloomberg. Il est de 18 à Bahrein, de 12 en Egypte et aux Emirats Arabes Unis et seulement de 8 en Turquie. Des valeurs comme la CGI, Alliances, Addoha ou BMCE Bank traitent à des niveaux de Per assez exagérés. Et ce sont ces mêmes valeurs qui tirent aujourdhui le marché vers le bas. Des analystes de la place parlent également, pour expliquer la situation actuelle, du désengagement massif de quelques investisseurs étrangers. Cest le cas notamment de Wydade Wardi, qui pense que cest la raison essentielle de la forte baisse de ces trois derniers jours. Selon elle, «le retrait massif de quelques zinzins étrangers aurait produit un effet dentraînement sur les autres investisseurs de la place. Et le mouvement vendeur sest déclenché ». Georges Soros serait dailleurs, selon quelques bruits de couloirs, le déclencheur de ce mouvement, et ce à travers des ventes massives quil a réalisées, à travers lun de ses fonds, notamment sur le titre ONA. Quid de lavenir ? Ceci étant, jusquoù ira le marché ? Va-t-on revivre le même scénario que celui de lannée 1998 ou est-ce juste une correction passagère ? Selon Mhamed Skalli, cette baisse est juste passagère. «Dici la semaine prochaine, on aura tout oublié», martèle-t-il dun air très optimiste. «La correction actuelle va dégonfler le marché et il redeviendra intéressant. Chose qui ne manquera pas dattirer de nouveau les investisseurs», explique-t-il. De plus, dit-il, «sur le marché, il ny a pas que les grosses capitalisations (qui sont dailleurs à lorigine de la correction, Ndlr). Les gens se sont trop focalisés sur les big caps et ont délaissé les autres valeurs qui présentent dénormes potentiels de croissance. Ce qui nous permet dêtre sereins par rapport à lavenir», ajoute-t-il. Cet avis, même sil est largement partagé, ne fait pas lunanimité, et les opposants estiment que la Bourse clôturera lannée sur une note plutôt négative».