Depuis décembre 2001, Ibou Ndiaye est le représentant au Maroc de Son Excellence Abdoulaye Wade, Président de la République du Sénégal, en sa qualité dAmbassadeur du Sénégal. Sept ans donc depuis quil est à la tête de la représentation diplomatique de ce pays frère et ami quest le pays de la Teranga ! Mais cest bien avant cette date-là quIbou Ndiaye tombera sous le charme du Maroc ! Dailleurs, quand on lappelle «ami du Maroc», il sempresse de préciser, lami amoureux du Maroc. Avoir été nommé ambassadeur ici, est une importante distinction puisque les deux pays saccordent une attention particulière. «Il est un dicton dans la diplomatie qui dit : un Etat na pas dami, moi je dis que la relation entre le Sénégal et le Maroc est lexception qui confirme la règle». Ibou Ndiaye compte déjà une trentaine dannées dexpérience où il a occupé des postes importants ! Et pourtant, la vie ne lui a pas toujours souri. Né le 11 mai 1950 dans un village, en pleine brousse, de parents paysans, il est confronté à la cruauté de la vie assez tôt. Cest ainsi quà lâge de 8 ans, il perd son père qui la tellement aimé et gâté. «Je suis tellement marqué par cet événement que je me souviens très précisément de sa maladie, son décès et son enterrement, alors que je navais que 8 ans». Très tôt donc, il rejoint, avec sa mère, sa famille maternelle. Il est accueilli chez un oncle commissaire divisionnaire, un homme de principes. «Il ma inculqué des valeurs importantes de la vie, en plus de la rigueur. Il me disait quun cadre ne doit rien à personne et que je devais tout faire pour devenir cadre, quitte à user ma culotte sur les bancs de lécole». Il na pas fallu plus pour motiver Ibou Ndiaye. «Devenir cadre, cest acquérir de lautonomie, même si on doit toujours quelque chose à quelquun, mais la base on ne la doit quà soi! ». Au Lycée, cest un brillant et sérieux élève et cest justement là quil rencontrera sa femme. À peine son Bac en poche, il décide de se marier avec lélue de son cur. Il rejoint ainsi lUniversité en tant quétudiant marié. Il a dû tout faire pour étudier et subvenir en même temps aux besoins de son épouse. Alors quil est encore étudiant, il accueille avec joie la naissance de sa première fille. «Je pense que cest à cause de ce mariage précoce et de cette naissance que jai réussi mes études sans problèmes en obtenant régulièrement des mentions». Après une maîtrise en Droit International et Relations Internationales à lUniversité de Dakar obtenue en 1976, Ibou Ndiaye sinscrit au concours dentrée à lEcole Nationale dAdministration et de Magistrature où il est admis pour suivre trois ans détudes en diplomatie. «Avant 76, les étudiants ayant des maîtrises accédaient directement à lécole, mais cette année-là le système du concours avait été instauré et jai été admis». Il clôt ces trois ans en apothéose, en tant que Major de sa promotion en juillet 79. Juste après, il rejoint la Direction des affaires politiques du ministère sénégalais des Affaires étrangères. Quelques mois plus tard, cest à la direction des affaires économiques et techniques quil est muté, accumulant ainsi une importante expérience soutenue par de nombreux voyages quil effectue de 79 à 82. Et cest au cours de lun de ces voyages quIbou Ndiaye aura le coup de foudre pour le Maroc. «Durant ces trois ans, jai eu à faire une longue mission qui me mena de lAfrique de lEst à Vienne où jai effectué un stage à lAcadémie diplomatique, puis à lEcole Nationale de Bordeaux. Sur le chemin du retour vers le Sénégal, jai rendu visite à Issakha Mbacke, qui est actuellement Ambassadeur du Sénégal à Ottawa et qui, à lépoque, était conseiller à lAmbassade du Sénégal au Maroc. À laéroport de Rabat, on ma simplement dit : Sénégalais ? Vous êtes chez vous !». Depuis, cest une histoire damour qui lunit au Maroc. En 1982, il a droit à sa première affectation qui le conduit en Ethiopie en sa qualité de conseiller. Entre-temps, il est père de deux filles et dun garçon, la cadette naîtra en terre dEthiopie. «Jai beaucoup de bons souvenirs de ce pays». Et il a une affection particulière pour la cuisine éthiopienne. Il quittera ce pays en 1986 en direction de Washington DC en tant que 1er conseiller. Eh oui, il a acquis du grade et ça lui a valu un poste dans la capitale de la première puissance économique, les USA. «Contrairement aux autres membres de ma famille, je nai jamais vraiment maîtrisé langlais, mais je me suis attelé à étudier lhistoire et la civilisation de cette puissance». Sa femme, elle, institutrice de formation, profitera de ce séjour de 2 ans pour décrocher un diplôme de secrétariat de direction bilingue. Deux ans après, il est muté à New York. Son passage à la mission permanente du Sénégal à New York coïncide, fait rare, avec la présidence du Sénégal au Conseil de Sécurité. Il est alors en charge de dossiers sensibles comme le désarmement, lOCI, la Palestine Il faut dire quIbou Ndiaye avait acquis de lexpérience qui lhabilitait à soccuper de pareils dossiers. En 1989, il est rappelé à Dakar où il est nommé ministre conseiller, chef du protocole au ministère des Affaires étrangères. Il aura à soccuper dimportants événements à Dakar, notamment la 6ème conférence du Sommet de lOCI, la visite du Pape Jean-Paul II à Dakar, les conférences au sommet du G15 et de lOUA. Mais ses atouts lui valent encore une fois dêtre investi sur le terrain. Cest ainsi quil se retrouve en 1993 ministre conseiller auprès de la Mission permanente du Sénégal à Genève. «Jy ai passé huit années de ma vie et cest une vraie école de diplomatie puisque cest de là que partent de nombreux dossiers pour être présentés à lAssemblée Générale de lONU à New York». Comme lmbassadeur du Sénégal était souvent en déplacement, cest à Ibou Ndiaye quincombait la responsabilité de signer les rapports. Alors, avant dy apposer sa signature, il organisait ses séances de débriefing à chaque fin de journée et rédigeait lui-même les rapports à envoyer à Dakar. Il va acquérir la technique décriture des rapports, lenchaînement des idées De même que la présence à Genève de plus de 16 organisations internationales va élargir ses horizons et ses connaissances sur ce qui se passe réellement dans le monde. En 1994, il fait un bref passage à Marrakech où il est témoin privilégié de la naissance de lOMC. Sa carrière se poursuit à Genève jusquen décembre 2001, date à laquelle il reçoit linsigne honneur dêtre nommé par le Président Wade comme son représentant auprès de SM le Roi Mohamed VI. Sept années donc depuis quil est à la tête de la représentation diplomatique sénégalaise au Maroc. Une période qui a été marquée par des acquis importants dans les relations entre les deux pays au triple plan politique, économique et culturel. Et quand on lui parle de lincident de décembre, il répond : «Rien na pu fêler le cristal». Cest en ces termes quIbou Ndiaye résume la situation. «Il y a eu un petit incident de famille. Alors, nous avons tous agi de manière responsable pour gérer la situation. Et sil y a des enseignements à en tirer, cest quil faut constamment être vigilant et protéger cette relation entre les deux pays. Nous en sommes sortis plus grands, plus solidaires et plus que jamais déterminés à entretenir les relations qui unissent nos deux peuples». Ibou Ndiaye ne perd pas de vue lobjectif de sa nomination en tant quambassadeur du Sénégal au Maroc : hisser les relations économiques et commerciales au même niveau que les excellentes relations politiques, sociales et culturelles. En arrivant au Maroc, il avait constaté que la grande Commission mixte de coopération maroco-sénégalaise ne sétait plus réunie depuis 1992, soit 10 ans. Alors, il réactiva ladite Commission et créa des commissions mixtes sectorielles qui se réunissent régulièrement. De même, il mit laccent sur lapport du secteur privé dans le développement des relations économiques des deux pays. Ainsi, en 2004, une journée économique entre opérateurs des deux bords ouvre la voie à plus de coopération. «Le rythme est peut-être lent, mais les choses vont dans le bon sens». Homme de communication, pas du tout langue de bois, Ibou Ndiaye espère faire plus et donner le meilleur de lui-même pour ses deux pays, le Sénégal et le Maroc.