* La part des investisseurs étrangers dans la capitalisation boursière samoindrit de plus en plus. * Jugé trop cher, le marché boursier est entré dans une phase dinstabilité inquiétante. * Est-ce le début du cycle baissier? Y a-t-il une relation avec la crise financière qui sévit dans les places internationales ?... Tour dhorizon avec Kamal Bennani, Trader à Orange Asset Management. Finances News Hebdo : Les investissements étrangers en valeurs mobilières se sont appréciés de plus de 20% en 2007. Comment évaluez-vous cette tendance ? Kamal Bennani : Le marché marocain se porte bien et présente un intérêt certain pour les investisseurs étrangers à moyen et long termes. Dailleurs, selon le rapport du Conseil Déontologique des Valeurs Mobilières sur linvestissement étranger en 2007, les perspectives sont bonnes. Le marché va encore accueillir sur la cote un certain nombre de sociétés nouvelles qui rendront le marché plus profond et plus liquide et cela intéressera certainement les investisseurs étrangers par la suite. F.N.H. : Ces investisseurs se trouvent aujourdhui dans une situation dilliquidité au vu de la crise financière qui touche les marchés internationaux. Dans quelle mesure seraient-ils tentés de reprendre leurs bénéfices ici au Maroc pour compenser K.B. : Après la crise des subprimes qui a éclaté en août dernier, les marchés étrangers sont en train de reprendre leur souffle. Donc, cest déjà un peu tard pour dire que les étrangers cèdent leur part pour compenser. Maintenant, on se demande si léconomie mondiale va subir une récession ou pas. À mon avis, la question quil faudrait se poser au vu de la conjoncture actuelle devrait tourner autour de lattrait de la Bourse de Casablanca. Là, effectivement, il y a un certain nombre de facteurs qui sont létroitesse du marché, lilliquidité et puis la cherté de la place qui dissuadent la tendance du marché actions. Mais on ne peut pas apporter une réponse aussi tranchée sur son évolution future. F.N.H. : La morosité sest emparée de la place casablancaise depuis quelques semaines. Est-ce la fin du cycle haussier? K.B. : Oui, personnellement je suis entièrement daccord. Je nai pas envie de dire quon est en fin de cycle, mais le potentiel de gain de la Bourse de Casablanca est de plus en plus moindre, et cest clair quil y a un risque de correction. Je préfère parler du risque de correction plutôt que du risque de crise. Justement, avec les nouvelles introductions, on a limpression que cette Bourse marocaine commence à plafonner en terme de valorisation. Maintenant, tout dépend aussi de lessor de léconomie pour cette année. Avec un certain nombre de variables, notamment les taux dintérêts et limpact de la Caisse de compensation sur la situation du Trésor, je ne pense pas quen terme de cycle on ait un grand problème dans le marché. Certes, le marché est cher pour les courtermistes mais pas assez pour ceux qui souhaitent se positionner dans une perspective stratégique. On a eu un très bon cru du résultat 2007, les perspectives 2008 ne sont pas mauvaises, on table globalement sur une croissance des résultats qui est quand même assez intéressante, les analystes prévoient une année entre 15 et 20% (on va dire 10 % pour les mois les plus pessimistes et 20% pour les mois les plus optimistes). Actuellement, on est aux alentours de 16 %, donc il est clair quon a plafonné. Le risque de correction est là ! F.N.H. : Il faudra sattendre au pire alors ? K.B. : Il faut savoir que lannée dernière, le marché a baissé vers le 7 ou le 9 mai, lannée davant cétait la même chose, le 13 ou le 14 mai. Donc, on est dans une période où en général on nachète pas : il suffit que quelquun déclenche un processus de vente pour que le marché entre dans une panique. Cest une période très très sensible en effet. F.N.H. : La crise internationale y est-elle pour quelque chose ? Autrement dit, navez-vous pas remarqué un retrait massif de liquidité de la part des zinzins étrangers ? K.B. : Cest vrai quon est peut-être à la veille dun décrochage du marché, mais je ne pense pas que la part des investisseurs étrangers y soit pour quelque chose. Il ne faut pas fonder le risque de chute sur le comportement des investisseurs étrangers, pour deux raisons : la première cest que linvestissement étranger est de nature stable. On retrouve de nombreuses sociétés étrangères au capital des sociétés marocaines cotées en Bourse sans pour autant avoir un impact sur le marché. Ce sont des participations stratégiques qui nont rien à voir avec la spéculation. Donc, on ne peut pas les considérer comme investisseurs de portefeuille. Vivendi, par exemple, détient, à elle seule, la moitié de la capitalisation de Maroc Telecom; elle a pratiquement 12 ou 13% de la capitalisation globale du marché, sachant que Maroc Telecom a plus que le quart de la capitalisation de la Bourse. Donc, ce nest pas Vivendi qui va vendre pour décrocher la Bourse de Casablanca, pas du tout ! Ses 51% vont rester inchangés. Maintenant, il y a des fonds de banques américaines, mais leur part est faible. Sagissant dun marché stable, le risque de faire chuter la place juste pour compenser les pertes est bien loin, on nest pas dans cette configuration. Le marché reste un marché local, un marché dinvestisseurs nationaux ou dinvestisseurs étrangers stables. La deuxième raison cest le renforcement des participations stratégiques. Maroc Telecom, par exemple, valait en moyenne 130 à 140 DH lannée dernière, parallèlement Vivendi avait léquivalent à 130 DH. Maintenant quelle vaut près de 200 DH, la part de lactionnaire étranger augmente sans avoir à acheter des actions. La même chose pour la BMCE et le Crédit Industriel et Commercial (CIC). Cest leffet valorisation. F.N.H. : La cherté de la place marocaine, jugée par son niveau de PER, par rapport à celui des Bourses de la région Mena, peut-elle dissuader linvestissement étranger ? K.B. : Oui, éventuellement, si un investisseur décide par exemple, dinvestir sur la région Mena, il va comparer la place de Casablanca à celle de lEgypte ou à celle de la Tunisie ou dOman et cest vrai que le PER actuel est cher par rapport à celui des marchés arabes.