La poursuite des réformes enclenchées sera parmi les priorités du ministre des Finances et de la Privatisation. Le nud des réformes est sans doute le système des retraites : un certain nombre de meures ont été initiées, mais beaucoup de choses restent à faire. Détails. L'année 2004 devra être celle de l'intensification des réformes déjà entamées. C'est, en tout cas, ce qu'a laissé entendre le ministre des Finances et de la Privatisation, M. Fathallah Oualalou. Il faudrait en effet espérer que l'ensemble des réformes prévues seront menées à terme, car, comme on le sait, plusieurs chantiers amorcés depuis des années, n'ont pu être bouclés jusqu'à présent. Pour 2004, quatre grands secteurs seront ainsi concernés par les réformes : il s'agit des établissements et entreprises publics (EEP), l'eau, l'éducation-formation et le secteur financier. La réforme des établissements et entreprises publics répond à un souci d'améliorer la gouvernance au sein de ce secteur et créer les conditions idéales pour leur cession au privé. Il est bon, en effet, au regard des nombreux scandales qui ont éclaté ces dernières années, de reconnaître que l'entreprise publique, d'une manière générale, est loin d'être un exemple en matière de gouvernance. Raison pour laquelle de nouvelles mesures ont été prises pour mieux «surveiller» ces structures, déclinées en la généralisation du contrôle à tous les établissements publics et à tous les organismes bénéficiant d'une participation directe ou indirecte de l'Etat et la modulation du contrôle en fonction de la qualité des systèmes d'information, de gestion et d'audit interne de l'organisme. Par ailleurs, la réforme s'appliquera également à conférer à ces établissements un nouveau cadre de fonctionnement, à travers l'accompagnement des réformes sectorielles et la contractualisation des rapports entre l'Etat et les EEP. En cela, des contrats-programmes vont être signés et feront l'objet d'un suivi et d'une évaluation progressive. S'agissant du secteur financier, sans aucun doute, l'une des réformes les plus suivies par les milieux d'affaires, plusieurs projets de lois ont été adoptés par le Parlement en tant que textes accompagnant la Loi de Finances 2004. En effet, outre le renforcement des prérogatives du CDVM, tant en termes de définition des règles de fonctionnement du marché, de contrôle que de sanction, il a été décidé de favoriser la concurrence entre les sociétés de Bourse par le biais de la suppression du plafond des commissions de courtage et l'assouplissement des conditions d'admission aux différents compartiments de la Bourse des valeurs de Casablanca. De même, de nouvelles dispositions ont été introduites, dont, entre autres, les nouvelles normes visant la classification des OPCVM , l'élargissement du champ de la politique de placement des OPCVM aux titres de créances négociables et le transfert au CDVM du pouvoir d'agrément des OPCVM. Toutes ces dispositions s'inscrivent dans l'optique de mieux dynamiser le marché financier , mais surtout de contribuer à la transparence nécessaire à l'instauration d'une place financière efficiente, qui a été pendant longtemps victime du décalage entre sa modernisation et la désuétude des textes juridiques et réglementaires. Un décalage que plusieurs intervenants du marché ont mis à profit pour initier des opérations à la limite de la légalité. C'est dans ce sens qu'il faut appréhender la panoplie de circulaires publiées par le CDVM, notamment celle relative aux offres publiques qui vise à «édicter les procédures devant régir ces opérations et qui doivent faire prévaloir le respect des principes de transparence, d'égalité de traitement et d'information des actionnaires et d'intégrité du marché». Reforme bancaire Suivant cette logique de réforme, l'environnement bancaire, de même que les statuts de Bank Al-Maghrib, ont subi à leur tour une cure de restructuration. BAM voit, dans cette optique, ses prérogatives en matière de supervision de l'activité des établissements de crédit renforcées. De plus, il a été procédé à l'élargissement du rôle des commissaires aux comptes à la vérification du respect, par les établissements de crédit, des dispositions prudentielles et à l'évaluation de leur système de contrôle. La réforme inclut, entre autres, la révision des règles régissant la prévention et la gestion des risques de crises au sein du secteur et une meilleure protection de la clientèle, grâce à la mise en place d'un dispositif d'indemnisation des déposants intervenant avant la liquidation d'un établissement de crédit. Parallèlement, la Banque centrale se voit attribuer une plus grande autonomie dans la conduite de la politique monétaire, tout comme ses attributions en matière de politique de change sont aujourd'hui clairement définies. «Cette institution sera chargée de mettre en uvre la politique de taux de change dans le cadre des orientations, objectifs et régime de change, tels que fixés par le ministère des Finances», est-il souligné. Par ailleurs, il s'agit également, à travers cette réforme, de réduire le recours du Trésor aux concours financiers de BAM,«en limitant les avances que cette dernière peut exceptionnellement accorder à l'Etat à une facilité de caisse dont le montant maximum sera réduit à 5% des recettes fiscales». Sur un autre volet, l'incompatibilité tant décriée entre sa fonction de supervision et certaines de ses activités, est désormais levée, car il lui est interdit de participer au capital et aux instances d'administration des établissements de crédit. Système des retraites La réforme du système marocain des retraites focalise actuellement les débats, sous-tendue par les cris d'orfraie lancés par les milieux d'affaires. Le système, circonscrit autour de quatre grandes Caisses : CNSS et CIMR (pour le secteur privé) et RCAR et CMR (pour le secteur public), auxquelles s'ajoutent des régimes particuliers (OCP, ODEP, RAD, ONE, ONCF, etc), est composé ainsi de trois régimes obligatoires de prévoyance sociale (CNSS, CMR et RCAR) et d'un régime facultatif (CIMR). Le système brille toutefois par ses inconvénients, et Oualalou confirme le propos lorsqu'il avoue la nécessité de réformer le secteur. La dégradation du rapport démographique (avec notamment la stagnation des recrutements et l'accroissement soutenu du nombre des retraités), le taux de charge (prestations / cotisations) trop élevé, le déficit technique consolidé qui sera de 7 Mds DH en 2010, 30 Mds en 2020 et 114 Mds en 2040 (une année du PIB) et le taux de couverture des engagements par les réserves nettement inférieur à 100% mettent à genou le système. Lequel doit aussi composer avec l'insuffisance de la couverture (inférieure à 30% de la population active), le chômage, le secteur informel et surtout le manque de coordination et d'harmonisation entre les régimes. C'est dans cette optique que s'inscrit le transfert au RCAR des caisses internes de l'ONCF, la Régie des Tabacs et l'ODEP et la fermeture des caisses internes de l'OCP et de l'ONE vis-à-vis des nouvelles recrues qui seront désormais affiliées au RCAR. Tout autant, deux initiatives ont été prises en marge de la Loi de Finances 2004. Il y a eu d'abord le relèvement du taux des cotisations patronale et salariale à la Caisse Marocaine des Retraites. Il est en effet apparu, précise Oualalou, que «le maintien du statu quo prévalant en 2003 aurait abouti à l'apparition d'un déficit du régime des retraites civiles dès l'année 2007, compte tenu de la détérioration du rapport démographique actifs/retraités, passé de 12,58/1 à 5,40/1 entre 1983 et 2002, et celle du taux de couverture des charges par les ressources, passé de 382,4% en 1984 à 165,5% en 2002». Ainsi, poursuit le ministre, «le relèvement de trois points étalé sur la période 2004-2006 à raison d'un point par an des taux de contribution de l'Etat et des fonctionnaires pour le porter de 7 à 10%, devrait permettre de retarder de trois années la date de survenance du déficit de la CMR (2010 au lieu de 2007) et de deux années la date d'épuisement des réserves (2015 au lieu de 2013). Les ressources mobilisées en faveur de la CMR seraient de 808 MDH en 2004 et 2.626 MDH en 2006 prises en charge à concurrence de 50%, respectivement par l'Etat et les fonctionnaires. La seconde mesure a trait à la mise en place d'un système d'incitation au départ anticipé à la retraite pour les fonctionnaires classés dans les échelles de rémunération 1 à 9. Le coût de l'opération est estimé à 3,7 Mds de DH.