Le comportement «culturel» change sensiblement chez la majorité des Marocains durant le mois de Ramadan. Le goût de la lecture se fait nettement sentir chez la majeure partie de ceux qui, pour une raison ou une autre, nont pas ouvert un livre durant une année. Des journaux, des revues, des livres historiques ou religieux, les Marocains retrouvent le plaisir de la lecture durant la période du jeûne. «Ce sont les deux dernières heures avant la rupture du jeûne qui sont idéales pour lire», nous dit un enseignant du primaire. Il reconnaît que «la lecture sert à passer un peu le temps», mais constate toutefois que «cela dépend de ce quon a sous les yeux : le temps quon passe avec un ouvrage ou un poème nest pas le même quon mesure à la lecture dune page sportive ou des mots fléchés». Les habitudes de lecture changent aussi chez les assidus de la presse. «Pendant le Ramadan, on lit souvent les journaux du lendemain juste après la rupture du jeûne». Cela crée une envie de consulter des publications hebdomadaires ou mensuelles quon na pas le loisir de consulter durant les autres jours. Le constat de cet étudiant à la Faculté de droit traduit en fait une remarque analogue à celle de toutes les personnes questionnées : pendant le Ramadan, on dispose de suffisamment de temps pour lire. Il faut souligner que certaines librairies casablancaises pratiquent des prix «spéciaux» pendant le Ramadan pour certains livres ou mensuels. La coïncidence de la rentrée scolaire cette année avec le mois de Ramadan touchera certainement le pouvoir dachat des ménages pour lacquisition de livres classiques. «Parfois, explique un père de famille, on recourt aux vielles méthodes entre amis, chacun prend de sa bibliothèque un ou deux livres pour les échanger avec un ami. Cest vrai que cela nexiste plus comme auparavant, poursuit-il, seulement le Ramadan est une bonne occasion de consulter des livres quon a tout le temps sous les yeux mais quon ne lit jamais». Ceci dit, les animations culturelles, telles quelles existent depuis plusieurs années, ont rarement placé la promotion de la lecture au sommet de leurs priorités. Au-delà de certaines «mini-expositions» organisées spontanément en marge des grands souks casablancais, les soirées ramadaniennes paraissent être exclusivement dédiées au chant et à la musique. Les efforts fournis pour la promotion de la lecture durant ce mois sacré restent minimes. En tout cas, ces mêmes efforts arrivent rarement à toucher le grand public. La lecture a toujours été une question intimement liée aux moyens de sa diffusion et de sa promotion. Parmi les émissions télévisées proposées durant ce mois sacré, aucune dentre elles nest consacrée à un schéma de questions/réponses et de candidats encouragés à y participer. Probablement la lecture est «recondamnée» à se cantonner dans la sphère privée de la vie des Marocains.