Les entreprises qui font l'objet de redressement peuvent légalement négocier avec le Fisc dans l'optique de trouver un terrain d'entente pour le montant à payer. Le Fisc est au devant de la scène médiatique ces derniers temps avec les montants astronomiques en jeu dans le cadre des redressements fiscaux de grandes entités publiques et privées. Il est donc légitime de se poser la question de savoir si la Direction générale des impôts (DGI) a la main lourde en début d'année. De l'avis de certains professionnels, rien d'exceptionnel. «Ce n'est que la partie visible de l'iceberg, il y a plusieurs entreprises qui font l'objet de redressements fiscaux disproportionnés par rapport à leur taille dont la presse ne fait pas écho», confie un expert-comptable qui a préféré garder l'anonymat. Cela dit, si les redressements fiscaux continuent de défrayer la chronique, il y a lieu de rappeler que le contrôle fiscal est le corollaire du système déclaratif adopté par le pays. Donc, rien d'étonnant d'assister au foisonnement de contrôles et de redressements fiscaux. Des montants qui donnent le tournis Si certains experts exhortent de placer le curseur de la réflexion au niveau de la clarté des règles fiscales et de la place de l'interprétation, ce qui interpelle le citoyen peu averti, ce sont les gros montants des redressements fiscaux de certaines entités pour ne citer que l'OCP (950 MDH), ou encore Saham Assurances (130 MDH). A en croire notre expert-comptable, généralement les sommes qui filtrent dans la presse sont issues d'une première notification adressée aux contribuables concernés, qui devront à leur tour répondre dans le cadre d'une procédure contradictoire. Partant, les sommes faramineuses annoncées peuvent être revues à la baisse lors de la deuxième notification ou au cours d'un accord à l'amiable. De plus, d'autres voies de recours existent, à l'instar de la Commission nationale de recours fiscal (CNRF) et du tribunal administratif pour contester les sommes réclamées par le Fisc. Au-delà de cet aspect purement financier, force est d'admettre que le contrôle fiscal a un rôle pédagogique et une force de dissuasion pour les entreprises tentées de verser dans la fraude. Contrairement à ce que pense une grande tranche de la population, la loi fiscale donne aux petites entreprises et aux grandes structures la possibilité de trouver un terrain d'entente par voie de négociation avec l'administration en cas de redressement fiscal. Bien entendu, cette possibilité permet d'éviter les batailles judiciaires susceptibles de traîner dans le temps. Le flou persiste Le système fiscal national est perfectible à l'instar des autres à l'échelle mondiale. Des efforts de clarification en matière de l'Impôt sur le revenu (IR) doivent être déployés. L'autre épine dans le pied du système d'imposition a trait au prix des transferts, utilisé par certaines entreprises pour transférer des bénéfices à l'étranger et optimiser leurs charges fiscales. La difficulté actuelle réside dans la fixation du prix de pleine concurrence, discutable et souvent objet de redressement fiscal, même s'il est fixé en fonction d'un benchmark et d'études économiques. Dans l'optique de surmonter ces problématiques, le Maroc a mis en place un système d'accord préalable en matière de prix de transfert, mais pas toujours applicable en raison de l'absence des textes d'application. De l'avis de certains experts, en matière de prix de transfert, l'administration fiscale devrait observer les standards internationaux et ne pas se baser uniquement sur les comparables secrets (informations dont dispose le Fisc). Ces comparables doivent être partagés avec l'entreprise qui fait l'objet de contrôle fiscal, et ce dans l'optique d'établir un débat. «Même si certaines entreprises sont fautives en matière de prix de transfert, le Fisc ne dispose parfois pas d'arguments suffisamment forts susceptibles d'être imposés». Toutefois, il est de bon augure de constater que la Direction générale a mis en place une structure chargée d'imposer les multinationales. Optimisation des contrôles fiscaux En mettant en place un système moderne, la DGI s'est inscrite dans une optique d'optimisation des contrôles fiscaux. Pour preuve, la législation a évolué, car auparavant le contrôle fiscal portait sur les quatre impôts lors des quatre derniers exercices. Aujourd'hui, il s'agit de contrôles ponctuels pouvant porter sur une année et sur un seul impôt. Le nombre d'exercices et d'impôts contrôlés est à la discrétion du Fisc qui opère selon une démarche axée sur les risques. A cela, il faudrait ajouter que le délai de contrôle fiscal a été réduit, notamment à 6 mois pour les grandes entreprises et à 3 mois pour les entreprises de taille moins importante. Au regard de cette optimisation, les agents du Fisc sont contraints de traiter davantage de dossiers. Ce qui n'est pas du goût de certains professionnels, notamment les experts-comptables qui estiment que la pression mise sur les agents du Fisc déteint sur la qualité de leur travail. «Certaines notifications de redressement fiscal faites sous le coup de la pression sont truffées d'erreurs», déplore notre interlocuteur. En définitive, il y a des réglages à opérer dans l'optique de mettre au point le nouveau système de l'administration basée sur l'optimisation des contrôles fiscaux appelés à augmenter (Voir l'entretien avec Rachid Seddik Seghir). Par M Diao Comment éviter les mauvaises surprises ? Afin de limiter au maximum les contrariétés inhérentes au redressement fiscal, les entreprises doivent se faire accompagner par un conseiller fiscal. Or, peu de sociétés en disposent au Maroc. Il est aussi important de faire appel à un professionnel pour l'établissement des revenus fiscaux. Cela permet à l'entreprise d'avoir une meilleure visibilité sur les multiples risques fiscaux. Bien entendu, l'objectif de cette démarche préventive est de maîtriser ceux-ci. D'où le sens de l'adage : «Mieux vaut prévenir que guérir». Pour bon nombre de professionnels, le flou existant au niveau de la législation n'amène pas l'entreprise à circonscrire toute l'étendue d'un risque. De ce fait, recourir à un conseiller fiscal lui permet au moins d'en être consciente.