Malgré la forte demande, ce type d'habitat, tel que conçu par l'Etat, reste boudé par les promoteurs. Il n'assure pas assez de marge pour les professionnels. L'effet des incitations fiscales est limité. La mobilisation du foncier public peut dynamiser le segment. Le déficit en logements a été certes réduit, passant en cinq ans de 800.000 unités à 500.000. Mais en décortiquant les chiffres, l'essentiel de cet effort s'est fait au niveau du logement social et dans l'habitat destiné à résorber les bidonvilles. L'habitat intermédiaire ou de moyen standing destiné à la classe moyenne n'arrive pas à décoller. Malgré les mesures lancées par l'Etat, le segment ne séduit pas les promoteurs. Actuellement, le dispositif mis en place ne permet pas à la classe moyenne de trouver un produit en corrélation avec son pouvoir d'achat, alors que cette catégorie sociale, estimée à 53% de la population, exprime un besoin annuel d'environ 30.000 unités. Pour rappel, dans la Loi de Finances 2014, de nouvelles dispositions avaient été adoptées pour soutenir le segment. La plus importante a été le passage de 6.000 DH (HT) à 6.000 DH (TTC) comme prix du mètre carré. En effet, la dernière mouture dédiée à la classe moyenne fixe les conditions d'éligibilité à ce produit. Il est destiné aux personnes ayant un revenu mensuel net ne dépassant pas les 20.000 DH. L'appartement doit être affecté à une habitation principale pendant une durée de 4 ans à compter de la date de conclusion du contrat d'acquisition. La superficie couverte doit être comprise entre 80 et 120 m2. Les prix démarrent à partir de 480.000 DH par logement. «Les incitations fiscales mises en place ne peuvent générer la marge souhaitée par les professionnels et le cahier des charges imposé par le gouvernement reste dissuasif», souligne Mohamed Alaoui, expert en immobilier. Dans le logement social, la superficie minimum est limitée à 50 m2 pour une concentration à l'hectare limitée à 250 logements. Alors que dans l'offre pour la classe moyenne, la superficie commence à partir de 80 m2. Il en résulte que le taux de concentration est faible par hectare. «C'est un schéma qui peut être rentable dans les petites ou moyennes villes ou dans les périphéries des métropoles. Mais dans les grandes cités comme Casablanca ou Rabat, ce schéma est inconcevable, les promoteurs cherchant à optimiser le foncier. Ils préfèrent dès lors le haut standing où ils peuvent engranger plus de marges», explique Alaoui. Quelles mesures à prendre ? Pour ce faire, le prochain gouvernement devra se pencher sur la question et investir de nouvelles pistes, comme la mobilisation du foncier public pour remédier à cette problématique. L'expérience de la reconversion de certaines casernes militaires à Casablanca en projets immobiliers a donné des effets tangibles. C'est le cas du premier bataillon médical à Aïn Borja. «Ce sont des cas limités. Il faut savoir que ces appartements ne sont pas à la portée de tout le monde. Ils concernent juste les personnes issues de la classe moyenne supérieure qui ont les capacités financières, puisque les prix démarrent à partir de 600.000 DH», précise Alaoui. Outre le foncier public, l'Etat est appelé à faire plus d'effort au niveau fiscal et revoir le modèle imposé en réduisant la superficie exigible à 60 m2. Dans le cas de la réalisation de programmes sur du foncier privé et pour permettre la rentabilité des projets, il serait souhaitable d'exonérer les opérateurs de la fiscalité locale appliquée à ce type de logements pour la classe moyenne (taxe sur les constructions, taxe de la Protection civile, taxes communales...). Cette proposition, si elle venait à être approuvée, devrait permettre à l'ensemble des professionnels de renouer avec une reprise d'activité significative et contribuer de manière dynamique au renforcement de l'offre en logements. C. Jaidani Ce que proposent les promoteurs La Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI) propose que l'offre dédiée à la classe moyenne fasse l'objet d'une convention Etat/promoteur, portant sur la réalisation d'un minimum de 200 logements sur 5 ans. Sur le plan fiscal et pour réduire le coût d'acquisition, il faudrait appliquer un taux de TVA de 10%. Avec la condition de mise à disposition du foncier public, les promoteurs immobiliers engagés dans la réalisation de ces logements seraient soumis au paiement de l'IS et de l'IR sur ce type de produit. Quant au cahier des charges, les dispositions techniques devraient être révisées de manière à permettre l'exploitation de la verticalité pour renforcer la densité, tout en assurant la réalisation des équipements nécessaires. Pratique : Terrains non bâtis Pour lutter contre la spéculation foncière et doper le marché en offre de terrains, le gouvernement a instauré une taxe sur les terrains non bâtis (TTNB). Elle porte sur les terrains urbains non bâtis situés à l'intérieur des périmètres des communes urbaines et des centres délimités disposant d'un document d'urbanisme, à l'exclusion des terrains nus affectés à une exploitation professionnelle ou agricole de quelque nature qu'elle soit dans la limite de cinq fois la superficie des terrains exploités. Cette taxe est due par le propriétaire et, à défaut de propriétaire connu, par le possesseur. En cas d'indivision, la taxe est établie dans l'indivision à moins que chaque co-indivisaire ne demande que la taxe soit établie séparément sur sa quote-part. Dans ce cas, les co-indivisaires restent solidairement tenus du paiement de la totalité du montant de la taxe. La taxe est assise sur la superficie du terrain au mètre carré. Chaque fraction de mètre carré étant comptée pour un mètre carré entier. Et elle est due pour l'année entière à raison des faits existants au 1er janvier de l'année d'imposition. Le produit de ces taxes revient aux collectivités locales (communes et établissements publics de coopération intercommunale). Elles servent à financer, en partie, leur budget. Certaines catégories de propriétés ne sont jamais imposables comme les terrains des Habous, d'autres bénéficient d'exonérations temporaires. Des dégrèvements sont également prononcés au profit de certains secteurs. Les modalités d'application de la TTNB stipulent que la durée de détention du terrain détermine la valeur imposable. Elle est de 20% si la durée écoulée entre la date d'achat du terrain et celle de sa cession est inférieure à 4 ans; 25% si cette durée est égale au moins à 4 ans et inférieure à 6 ans, et 30% si elle est supérieure ou égale à 6 ans.