La Chambre des représentants a voté et adopté, en août dernier, la loi 59-13 portant modification du code des assurances et créant l'assurance Takaful, sans amendements majeurs. Selon l'ACAPS, les textes d'application verront le jour «d'ici la fin de l'année courante». Ils doivent préciser la liste des catégories d'assurance Takaful, le traitement des excédents du compte Takaful ainsi que les règles prudentielles. Lors de son passage en mai dernier dans les locaux de Finances News Hebdo en tant qu'invité de la rédaction, Hassan Boubrik, président de l'Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance (ACAPS), avait promis que le nouveau code des assurances sortirait du circuit législatif en septembre. Promesse tenue. En effet, le projet de loi 59-13 modifiant et complétant la loi 17-99 portant code des assurances, qui introduit notamment l'assurance islamique Takaful, a été adopté par la Chambre des conseillers le 2 août dernier, sans modifications notables. Il s'agit de la dernière étape du processus législatif de ce texte très attendu par les professionnels de la finance participative. Avec ce texte de loi, qui vient s'ajouter à celui de la loi bancaire portant création des banques participatives, le cadre juridique de l'écosystème de la finance participative est bouclé. Pour autant, les choses sérieuses ne font que commencer, puisqu'il s'agit à présent pour l'ACAPS de produire les textes d'application de cette loi. Un exercice technique et surtout fastidieux, comme nous avons pu le constater lors de l'élaboration des circulaires d'application relatives à l'activité des banques participatives. Les textes d'application concernent en premier lieu l'élaboration de la liste des catégories d'assurance Takaful. A ce niveau, la priorité devrait être donnée, au départ, aux produits d'assurances Vie qui accompagneront le démarrage des banques participatives qui, une fois leur agrément en poche, pourront accorder des crédits. D'autres circulaires définissant les règles prudentielles applicables à ce type d'assurance doivent également voir le jour. L'ACAPS doit, par ailleurs, plancher sur un autre texte d'application, qui sera particulièrement scruté par les professionnels de la finance participative, puisqu'il concerne le businessmodel des futurs opérateurs Takaful : il s'agit de définir les dispositions relatives à la détermination des excédents du compte Takaful et des modes de distribution de ce solde. Quel modèle économique ? Plusieurs professionnels marocains de la finance participative souhaitent à ce titre que les opérateurs Takaful puissent être rémunérés sur l'excédent technique, en plus des commissions de gestion (c'est le modèle de la Wakala modifiée appliquée en Arabie Saoudite et en Malaisie). Autre point important à régler : l'émission de Sukuks (équivalent islamique des Bons du Trésor). En effet, les assureurs et les banques islamiques auront besoin de placer de gros volumes en misant sur des titres souverains de bonne qualité et «Sharia Compliant». En juillet dernier, la Banque centrale assurait qu'elle travaillait avec la Direction du Trésor et des finances extérieures pour émettre avant la fin de l'année des certificats de Sukuks. A. Elkadiri Trois questions à Othman Khalil El Alamy, SG par intérim de l'ACAPS Finances News Hebdo : La deuxième Chambre a voté en août dernier la loi 59-13 modifiant le code des assurances. Pouvez-vous nous donner quelques informations sur les prochaines étapes et le calendrier pour le lancement effectif de l'assurance Takaful (décrets ? circulaires ? agréments ? etc.) Othman Khalil El Alamy : Tout d'abord, il y a lieu de préciser que le débat au parlement a porté, essentiellement, sur la compréhension de certaines dispositions du projet, notamment celles relatives aux principes de base de l'assurance Takaful et à la définition de certains concepts. Aussi, les amendements n'ont concerné que quelques points de forme. Pour ce qui est des prochaines étapes, l'application de la loi est, en effet, tributaire des textes d'application qui doivent préciser, notamment, la liste des catégories d'assurance Takaful, les dispositions relatives à la détermination des excédents du compte Takaful et des modes de distribution de ce solde ainsi que les règles prudentielles applicables à ce type d'assurance. Pour l'octroi d'agréments, les procédures applicables à l'assurance Takaful seront les mêmes que celles actuellement appliquées aux autres agréments. Pour les autres dispositions, les textes d'application seront pris, après avis conforme du Conseil supérieur des Oulémas, sous forme de circulaires de l'Autorité, normalement, d'ici la fin de l'année courante. F.N.H. : Quels sont vos projections ou objectifs à moyen terme pour ce marché ? O. K. E. : A vrai dire, l'ACAPS ne dispose pas, à l'heure actuelle, de données précises sur les évolutions futures de l'assurance Takaful au Maroc. Toutefois, certaines études réalisées par différents cabinets sur la finance participative montrent que plus de la moitié des interviewés sont intéressés par des produits de ce type. De plus, le besoin en produits d'assurance Takaful va se faire sentir davantage avec l'installation des banques participatives, surtout en matière d'assurance décès exigée par les banques pour garantir ces emprunts. Sur le plan du chiffrage de ce besoin, les businessplans qui seront présentés par les entreprises d'assurances à l'occasion de la demande d'agrément, donneront plus d'informations sur le volume des contributions qui seront générées par ce type d'assurance. F.N.H. : Le modèle économique préconisé (à savoir la Wakala) n'estil pas trop restrictif (rémunération de l'opérateur uniquement par des commissions de gestion et pas d'intéressement aux excédents techniques) ? N'y a-t-il pas un risque de renchérissement du coût des primes en comparaison avec les assurances conventionnelles ? O. K. E. : Tout d'abord, il faut préciser que la loi ne se prononce ni sur le mode de rémunération de l'entreprise d'assurances au titre de la gestion du compte d'assurance Takaful, ni sur le montant de cette rémunération. Ce mode ainsi que le montant de la rémunération sont fixés par le contrat d'assurance. Les deux parties sont donc libres de choisir le mode de rémunération qui leur convient, sous réserve du respect des préceptes de la Charia. C'est pour cela, d'ailleurs, que le contrat d'assurance Takaful n'est homologué par l'Autorité qu'après avis conforme du Conseil supérieur des Oulémas. Néanmoins, la loi donne à l'Administration la possibilité de fixer, sur proposition de l'Autorité et après avis conforme du Conseil supérieur des Oulémas, le mode de rémunération au titre de la gestion du compte d'assurance Takaful et les critères de détermination du montant de cette rémunération. Cette possibilité ne sera, en principe, mise en œuvre que s'il y a lieu de corriger des aberrations constatées lors du fonctionnement de ce type d'assurance.